Paris: Jordan Bardella  debate with France’s Prime Minister Gabriel Attal

Ecologie : un séminaire du gouvernement pour « montrer que l’engagement n’a pas diminué »… à dix jours des européennes

Le premier ministre Gabriel Attal a rassemblé ses ministres pour « faire le bilan » de l’action de l’exécutif en matière d’environnement, avant des annonces attendues en juin sur le plan d’adaptation au réchauffement. De quoi faire une piqûre de rappel aux électeurs macronistes déçus, juste avant les européennes. Matignon plaide le « hasard de calendrier ».
François Vignal

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« La politique que je mènerai dans les 5 ans à venir sera écologique ou ne sera pas ». Les promesses d’entre-deux-tours de présidentielle n’engagent-elles que le candidat… ou que ceux qui y croient ? En annonçant un quinquennat sous les couleurs de l’écologie, lors d’un meeting à Marseille, le 16 avril 2022, Emmanuel Macron cherchait à envoyer un message à l’électorat de gauche et écologiste, dont il avait besoin des voix pour battre Marine Le Pen au second tour.

« Bons points »

Un peu plus de deux ans après, malgré une transition écologique menée sous la houlette de l’ex-première ministre, Elisabeth Borne, on retient plus de l’action du gouvernement la réforme des retraites, celle de l’Assurance chômage ou le texte immigration, que le leasing pour les voitures électriques. Avec un séminaire sur l’environnement, organisé ce jeudi matin autour du premier ministre, Gabriel Attal, avec tous les membres du gouvernement, l’exécutif cherche-t-il à se rappeler au bon souvenir de son électorat sensible à la cause écolo, à dix jours d’élections européennes où sa liste est à la peine ?

Du côté de Matignon, on assure que ce n’est pas le but. On plaide un « hasard de calendrier ». « Le séminaire aurait dû se passer beaucoup plus tôt, la semaine dernière », explique-t-on. Mais les événements en Nouvelle-Calédonie ont changé le calendrier. Un ministre présent ce matin s’agace même qu’on y voit un simple calcul électoral :

 On lui reproche de ne pas parler assez d’écologie, mais on s’est tapé la crise des agriculteurs. Et quand il vient sur l’écologie, on dit que c’est pour les européennes, c’est dégueulasse. 

Un ministre.

« Sur le fond, ce séminaire est l’occasion de faire le bilan des deux premières années de la planification écologique », avance Matignon. L’exécutif peut notamment s’appuyer sur un bon résultat, en matière de baisse des gaz à effet de serre : en 2023, le recul est de 5,8 % pour le pays. Des « bons points qui ne se traduisent pas par une écologie punitive », soutient-on du côté de la rue de Varenne, où on préfère parler d’« écologie à la française ». Une « écologie de gouvernement » qui passe par l’économie et l’emploi. Pour cela, l’enjeu est aussi de « mobiliser les ministères ». Soit de mettre du vert dans les rouages gouvernementaux ? « Oui, exactement », acquiesce une conseillère de l’exécutif.

Aucune annonce n’est attendue, ni même possible, à l’issue du séminaire, en raison du droit de réserve avant les élections. Ce qui limite le possible effet électoral au passage. Pour des éléments plus concrets, il faudra attendre un peu. « Le moment voulu, le gouvernement pourra communiquer sur le plan d’adaptation (au réchauffement climatique) », explique le député Renaissance, Jean-Marc Zulesi, président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale. Ce sera « dès la fin de la période de réserve, en juin », promet Matignon. « Comme le premier ministre veut vraiment s’en saisir, il y a un certain nombre d’arbitrages qui sont encore au niveau du premier ministre », ajoute le député Renaissance des Bouches-du-Rhône, qui « préfère un plan très ambitieux » un peu plus tard, « qu’un plan pour raisons purement politiques car il y a les européennes ».

La « bonne nouvelle » de la baisse des émissions de gaz à effet de serre

Pour l’heure, le séminaire permet néanmoins de capitaliser sur la baisse des émissions. « Il y avait une volonté, depuis un moment, que le gouvernement se retrouve autour de cette thématique, d’autant que nous avons eu des bons résultats récemment. C’est une bonne nouvelle, donc c’est important qu’il y ait ce séminaire et donner les perspectives aux pays en matière de transition écologique », avance Jean-Marc Zulezi. Le député insiste sur « l’avenir du leasing social », dont il était rapporteur du texte, « avec la massification attendue, pour renouveler le dispositif l’année prochaine ». Au ministère des Transports, on parle carrément de phase « d’industrialisation ».

Les RER métropolitains, idée lancée par Emmanuel Macron, joueront aussi un rôle dans la décarbonation voulue par le gouvernement. Après une conférence de financement attendue en septembre prochain, les premiers projets seront officiellement lancés début décembre, si tout va bien.

« Il faut qu’on soit en capacité de mieux montrer l’intérêt du premier ministre sur ce sujet »

Le séminaire est aussi l’occasion pour le premier ministre, qu’on a beaucoup entendu sur les sujets régaliens, de compenser ce qui pourrait paraître comme une lacune, en termes d’image, pour ne pas dire un désintéressement sur le fond. Un reproche infondé, selon le président de la commission du développement durable.

« J’en ai discuté pas mal avec lui. Il a une vraie sensibilité sur le sujet », assure Jean-Marc Zulezi, selon qui « il faut qu’on soit en capacité de mieux montrer l’intérêt du premier ministre sur ce sujet ». Gabriel Attal peut aussi se placer dans les pas de sa prédécesseure, et ainsi profiter du travail déjà lancé, remarque un autre macroniste… « Il reprend ce que faisait Borne qui avait un engagement fort sur la question. C’est un moyen de montrer que l’engagement n’a pas diminué. Depuis qu’il est arrivé au gouvernement, Attal a eu à gérer la crise agricole, la Nouvelle-Calédonie. Tenir ce séminaire montre qu’il ne se détourne pas des sujets de fond », souligne cet élu.

Les européennes dans toutes les têtes

Si l’objectif est officiellement désintéressé, reste que l’approche des européennes est bien dans toutes les têtes. Jean-Marc Zulezi voit « une opportunité intéressante entre une extrême droite presque climatosceptique et une gauche en faveur de l’écologie punitive ».

« On ne valorise jamais notre bilan. Les Français ne s’en souviennent pas. Si c’est l’occasion de rappeler tout ce qui a été fait, et certaines décisions ont été difficiles et nous ont mis en difficulté, comme les ZAN (zéro artificialisation nette), ce n’est pas une mauvaise chose de le rappeler. On aurait tort de s’en priver, et encore plus à la veille des échéances électorales », assume le président du groupe des sénateurs macronistes (RDPI), François Patriat. Le sénateur Renaissance rappelle l’enjeu pour la tête de liste Valérie Hayer :

 On a besoin de récupérer des voix qui ont voté Macron en 2017 et en 2022. Il nous en manque, ils n’ont pas envie de voter. 

François Patriat, président du groupe RDPI du Sénat.

« Il y a toujours besoin de rappeler notre bilan et surtout, de ne pas avoir le Green deal honteux », avance Nathalie Loiseau

Et porter le bilan du gouvernement, comme celui au plan européen, les deux s’imbriquent. « Je ne sais pas si c’est utile mais c’est cohérent avec le bilan et le projet que nous portons. Il y a toujours besoin de rappeler notre bilan et surtout, de ne pas avoir le Green deal honteux, dans la mesure où certains ont voulu faire du Green deal le responsable de la crise agricole », avance l’eurodéputée Horizons, Nathalie Loiseau, porte-parole de la liste de la majorité pour les européennes.

Emmanuel Macron a pourtant appelé à une « pause » dans la réglementation environnementale européenne, en mai 2023. Puis face à la crise agricole, l’Europe a levé le pied sur l’ambition écologique. Un « en même temps » assumé par l’ancienne ministre des Affaires européennes. « Mais heureusement, car entre le moment où certains textes ont été votés, et aujourd’hui, il y a eu la guerre en Ukraine. Si par dogmatisme, on ne s’adaptait pas, on se demanderait au service de qui on a été élu. On est capable de prendre en compte les événements extérieurs qui amènent à ajuster. Il faut le revendiquer comme une méthode qui permet de faire une politique au service des gens, pas d’une idéologie », défend Nathalie Loiseau, qui appelle à « une phase 2 en matière de transition écologique, pour laquelle il faut des investissements massifs ».

Un coup de « rabot » sur l’écologie qui passerait mal

Qui dit investissements, dit argent. Or le gouvernement cherche des économies à tous les étages. Et l’écologie pourrait en faire à nouveau les frais. Selon Les Echos, « il a été demandé au ministère de la Transition écologique de trouver 1,4 milliard d’euros d’économies supplémentaires » dès cette année, dans le cadre du nouveau plan d’économies de 10 milliards d’euros que compte faire Bercy. Ils s’ajouteraient aux 2,2 milliards déjà demandés à l’écologie lors du premier plan d’économie de 10 milliards, déjà annoncé en février. De quoi sérieusement réduire la hausse de 7 milliards d’euros, initialement prévu dans le budget 2024. Pour l’heure, rien n’est encore totalement arrêté et les arbitrages sont en cours.

Mais de tels signaux contradictoires auraient de quoi faire tousser, jusqu’au sein de la majorité. « Il faut faire des économies, c’est évident. L’Etat, ou plutôt les services publics vivent au-dessus de leurs moyens. Mais la tactique du rabot qui consiste à viser tous les ministères, c’est le contraire de ce qu’il faut faire. Il faut sortir de cette logique. Il faut des réformes de fond » pour se concentrer sur « les politiques prioritaires », grince un responsable d’Horizons, qui aimerait « un vrai arbitrage à Matignon, et pas des décisions prises au ministère du Budget… » Il faudra peut-être organiser un nouveau séminaire pour en parler.

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