Edouard Philippe assume une « décentralisation qui accepte les désaccords »

Edouard Philippe assume une « décentralisation qui accepte les désaccords »

Face à la grogne des élus, le Premier ministre a justifié la politique du gouvernement, appelant à poursuivre le dialogue.
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

L’ambiance était glaciale à Marseille, pour la venue, ce jeudi matin au Congrès des Régions de France, du Premier ministre Edouard Philippe. La veille, les élus des communes, départements et régions ont lancé un appel commun pour fustiger la « volonté recentralisatrice de l’Etat » dans un contexte d’efforts financiers réclamés aux collectivités territoriales. Autant dire que le chef du gouvernement, accompagné de plusieurs ministres, devait faire face à une véritable fronde. « Je suis tellement heureux d'être à Marseille que je serais bien arrivé hier mais j'ai compris que c'était compliqué » a-t-il tenté, devant un auditoire silencieux.

A l’instar d’Hervé Morin, qui l’a interpellé durement dans son discours, Edouard Philippe a souhaité répondre avec « franchise et amitié » à ses interlocuteurs. « L’appel, il ne manque pas de style, il ne manque pas d’allure. Peut-être il m’arrive de trouver qu’il manque de nuances » a souligné le chef du gouvernement. 

Peut-être que je ne suis pas complètement dans la cible. Ou peut-être que je suis la cible.

« Dans cet appel, je suis d’accord avec beaucoup de choses » a-t-il tenté de déminer. « Je ne nie pas nos désaccords. Je ne nie pas non plus l’importance des efforts que l’Etat vous demande. Je ne nie pas non plus l’importance des transformations que nous engageons. Mais nous avons été mandaté pour les engager alors nous les engageons. »

Il a surtout critiqué le « débat infondé sur la volonté de recentralisation ou d’ultracentralisation » du gouvernement.

Édouard Philippe critique le « débat infondé sur la volonté de recentralisation »
01:28

« Dans notre Constitution, la décentralisation est aussi incontestable qu’irréversible. Je ne crois pas que nous gagnerions quoique ce soit à laisser penser que nous allons revenir sur une disposition qui est centrale. Personne ne veut revenir sur le caractère décentralisé de la République » 

Edouard Philippe est ensuite revenu sur la question cruciale des dotations. « Toutes les réductions d’impôts ou de charges, sont à la charge de l’Etat » a-t-il rappelé. « Pour pouvoir mettre en œuvre ces baisses d’impôts, il faut pouvoir  avoir une action forte sur la dépense. Sur cet aspect là, en 2018 comme en 2019, l’effort de l’Etat sur sa dépense sera supérieur à celui demandé aux collectivités territoriales. » Et de poursuivre : « Cet effort sera réalisé dans un contexte où les concours de l’Etat aux collectivités locales seront stables. »

« L’effort de l’Etat sur sa dépense sera supérieur à celui demandé aux collectivités » explique Edouard Philippe
01:43

« La vérité, c’est que pour beaucoup d’entre nous, il était plus facile pendant longtemps de supporter la baisse des dotations du point de vue politique » a-t-il lancé. « C’était très désagréable du point de vue budgétaire et financier mais lorsqu’on était maire, président de conseil départemental, président de conseil régional, c’était assez facile de dire :’nous devons comprimer notre dépense parce que l’Etat baisse violement ces dotations’. C’est techniquement difficile à assumer. C’est politique très facile à assumer. »

« Il était plus facile pendant longtemps de supporter la baisse des dotations du point de vue politique » affirme Édouard Philippe
00:45

Et face à la grogne des élus sur la contractualisation financière, le Premier ministre prend « le pari » de sa pérennité. « Ce n’est pas l’appel de Marseille mais le pari de Marseille. A l’avenir, quelque soit les gouvernements, on ne reviendra pas sur cette logique de contractualisation financière » affirme-t-il.

Concernant la Conférence nationale des territoires, dont la prochaine édition, centrée sur les finances locales aura lieu le 15 octobre, il souhaite la rendre « plus fluide, moins formelle » mais rappelle qu’elle « permet à  toutes les tranches des collectivités territoriales, d’échanger » même si cela « n’implique pas qu’elles se mettent d’accord. »

Matignon assume d’ailleurs parfaitement les divergences. « Oui, nous dialoguons et parfois nous ne sommes pas d’accord (…) Moi aussi, je lance mon appel de Marseille. Une décentralisation qui autorise les désaccords. » Malgré les applaudissements polis sur sa conclusion, pas sûr que le Premier ministre ait convaincu son auditoire.

Dans la même thématique

Edouard Philippe assume une « décentralisation qui accepte les désaccords »
5min

Politique

Budget : « C’est un semblant de justice fiscale, mais en réalité, ce sont les plus pauvres qui vont trinquer », selon le député PS Arthur Delaporte

Invités à débattre du budget 2025 sur Parlement hebdo, le rapporteur LR de la commission des finances du Sénat, Jean-François Husson, et le député PS Arthur Delaporte, s’opposent sur le sujet. « Il faudra bien faire des efforts », défend le sénateur LR, quand le socialiste dénonce « un effort incommensurable ».

Le

Edouard Philippe assume une « décentralisation qui accepte les désaccords »
8min

Politique

Budget : « 2024 est une année noire pour les finances publiques », alerte Pierre Moscovici

Auditionné par le Sénat, le président du Haut conseil des finances publiques affirme que les hausses d’impôts prévues dans le budget 2025 ne sont pas de 20 milliards d’euros, comme le dit gouvernement, mais « de 30 milliards d’euros ». Un effort indispensable, insiste Pierre Moscovici : « Le poids de la dette permet-il encore d’agir ? Non. Quand vous avez ce niveau de dette, walou ! »

Le

Edouard Philippe assume une « décentralisation qui accepte les désaccords »
4min

Politique

Propos de Gabriel Attal et de Gérald Darmanin sur le budget : « Certains auraient avantage à se taire ! », tacle Claude Raynal

Ce vendredi, Claude Raynal, sénateur socialiste de la Haute-Garonne et président de la commission des finances du Sénat, était l’invité de la matinale de Public Sénat. Hier soir, le budget pour l’année 2025 a été présenté par le gouvernement. Le sénateur est revenu sur les mesures du projet de loi de finances destinées à faire des économies et a assuré que Gabriel Attal et Gérald Darmanin « auraient avantage à se taire », en évoquant leur opposition à l’augmentation des impôts.

Le