La défaite limitée de la liste de la majorité et surtout la déroute des Républicains dimanche lors des élections européennes confortent Edouard Philippe comme Premier ministre et pôle d'attraction de la droite modérée, éloignant la perspective d'un remaniement gouvernemental.
Le chef du gouvernement "a l'entière confiance du président de la République", et son maintien à Matignon est "une évidence", a déclaré lundi matin le porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, affirmant "n'avoir pas entendu parler" d'un remaniement ministériel.
"Pour qu'un remaniement serve à quelque chose, il faut qu'il soit incarné par des personnes qui porteraient un cap politique différent", a écarté un autre fidèle du président, le président de l'Assemblée Richard Ferrand.
Si Edouard Philippe a accueilli les résultats "avec humilité", admettant que la deuxième place de la liste Renaissance de la majorité n'était pas une victoire, le score désastreux et sans précédent de son ex-parti des Républicains (8,48%) est une bonne nouvelle pour lui.
"Ca valide le fait qu'avoir un pôle de droite dans la majorité. Ca veut dire que le pari stratégique et politique du président fonctionne", se réjouit un membre de son entourage.
Selon Ipsos, les électeurs de François Fillon au 1er tour de la présidentielle ont voté dimanche à 27% pour la liste macroniste, quand 15% d'entre eux se sont rabattus vers le RN. Accentuant encore le scénario des législatives, où l'apport de la droite modérée avait offert un raz-de-marée à l'Assemblée à Emmanuel Macron.
Chargés depuis mai 2017 d'enfoncer un coin - "faire travailler la poutre", selon l'expression d'Edouard Philippe - dans leur ancien camp, le Premier ministre et les ex-LR du gouvernement (Darmanin, Le Maire, Lecornu) auraient été fragilisés en cas de bon score de leur ancien parti.
Début mai, les sondages esquissaient une remontée de François-Xavier Bellamy et trois grands maires LR jugés Macron-compatibles (Jean-Luc Moudenc à Toulouse, Christian Estrosi à Nice et Arnaud Robinet à Reims) tournaient le dos à la macronie en apportant leur soutien au philosophe conservateur.
Ces signaux d'alarme ont coïncidé avec l'entrée en campagne d'Edouard Philippe, qui a fustigé une "droite du Trocadéro" velléitaire et mené une série de meetings ciblant les mairies de centre droit.
- LREM "nouveau parti de la droite" ? -
Des villes où la majorité présidentielle a plutôt obtenu des bons scores dimanche (Angers 28,2%, Orléans 26,6%, Valenciennes 24,4%...) et où LR n'a pas dépassé les 13%. Quant à Nice (11,7%), Toulouse (7,4%) et Reims (8,6%), la liste Bellamy y a aussi sombré.
"Il y a plein de gens de droite modérée, libéraux mais sociaux. Ces gens-là ne votent plus LR", se réjouit-on à Matignon.
La liste macroniste fait parmi ses plus grands scores dans des bastions bourgeois et fiefs de droite, comme le XVIe arrondissement de Paris (46,1%), Neuilly-sur-Seine (47,9%), Boulogne-Billancourt (40,6%), arrivant même première dans le fief de M. Bellamy à Versailles.
De quoi donner du grain à moudre à ceux qui accusent LREM de pencher très sérieusement à droite ou d'être l'étendard de la France qui va bien.
"Le phénomène nouveau ce soir, c’est que LREM est devenu le parti de la droite. Édouard Philippe va pouvoir rester à Matignon, comme Premier ministre d’un parti de droite", a taclé le patron du parti socialiste Olivier Faure.
Mauvaise nouvelle pour le chef du gouvernement, à dix mois des municipales : dans sa ville du Havre, où son successeur à la mairie a démissionné après un scandale sexuel, le Rassemblement national est arrivé en tête avec 22,55% des voix, contre 21,5% pour la liste Renaissance.