Elections sénatoriales en Isère : dans un match de sortants, le candidat macroniste en difficulté

Après 26 ans de mandats nationaux et locaux, André Vallini figure de la vie politique iséroine ne se représente pas. A qui reviendra son siège ? C’est toute la question, dans un département ou les autres sénateurs sortants, eux, ont décidé de repartir en campagne.
Audrey Vuetaz

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La voix robotique du GPS indique qu’il faut tourner à gauche. «T’es sûre que c’était là Fred ? », Michel Savin doute, mais sa colistière Frédérique Puissat le rassure. Entre les deux, la mécanique est bien huilée : il conduit, elle écrit. Les deux sénateurs LR sortants profitent de la route pour travailler leurs arguments de campagne.

« On n’a pas envie d’être en retard, par respect pour les grands électeurs qui nous reçoivent à 14h en plein milieu de l’après-midi, » indique Frédérique Puissat. Sur la route qui les amène à Saint-Sorlin-de-Vienne, ils jouent la carte de l’humilité, pourtant, de prime abord ils sont en position de force : sortants, ils ont un bilan à défendre et ils ont derrière eux une région et un département acquis à leur cause avec deux présidents LR Laurent Wauquiez et Jean-Pierre Barbier qui les soutiennent.

« Oui mais en 2020 on a de grosses communes de la métropole grenobloise qui ont basculé à gauche, Meylan 18200 habitants, Saint-Egrève 16200 habitants ça ne joue pas en notre faveur », précise Michel Savin. Lui, sait que son siège est presque assuré, il est en première position sur la liste d’Union des droites, « il faut qu’on sécurise celui de Frédérique, c’est l’objectif. »

 

« L’objectif c’est de visiter 275 communes sur les 512 de l’Isère »

 

Et pour cela ils ont sorti les grands moyens avec une campagne commencée dès le mois de juin « on a calé 55 journées avec 5 réunions par jour. En fait, c’est comme une campagne de municipales, on va voir nos électeurs, un par un », souligne le sénateur LR et Frédérique Puissat complète « chaque jour on a une fiche avec les communes visitées, le nombre de kilomètres qui les sépare et le nombre de grands électeurs. »

Un coup d’avance, ils l’espèrent, sur d’autres listes déclarées en dernière minute en préfecture. Celle de Gérard Dezempte maire de Charvieu-Chavagneux, exclu de la majorité départementale LR pour son soutien à Eric Zemmour ; celle (Divers centre) de Fréderic Robin et les listes d’Isabelle Nuel (Débout la France) et d’Alexandre Moulin-Comte (RN).

 

« On veut au moins 100 sénateurs de gauche dans l’hémicycle »

 

A gauche de l’échiquier on trouve l’écologiste sortant Guillaume Gontard qui arrive ce soir-là, tout sourire pour tenir une réunion publique à Saint-Marcellin. « Ça se passe bien cette campagne ? », l’interpelle un militant. « Oh oui, ça se passe très bien ! »  Et pour cause, il a réussi un petit exploit, faire la quasi-union des gauches en Isère. Sur scène, la photo de famille a de l’allure ; en deuxième position on trouve la communiste Frédérique Penavaire suivie du socialiste Erwann Binet, rapporteur du projet de loi sur le mariage pour tous quand il était député.

En Isère il y a 5 sièges à pourvoir avec un scrutin à la proportionnelle, plus une liste fait de voix et plus elle a de chances de faire passer les membres de sa liste. Mais, en troisième position Erwann Binet est lucide, ses chances sont extrêmement minces. « Je préfère tout de même l’union à la désunion, c’est pour cela que j’ai rejoint Guillaume Gontard. »

L’écologiste qui a bon espoir. « On va renforcer le pôle de gauche. Lors de la précédente mandature, il y a eu des frustrations, certains textes ne sont pas passés à quelques voix près, cette fois-ci on veut au moins 100 sénateurs de gauche dans l’hémicycle. »

Et pour cela, il espère que sa numéro 2 occupera une place laissée vacante à gauche par André Vallini. Petite révolution dans le monde isérois, l’ancien ministre, président du Conseil général, député et sénateur socialiste a choisi de ne pas se représenter après 26 ans de mandats.

De quoi donner des idées à Alban Rosa qui porte une liste LFI, faute d’accord national mais aussi à Jean-Yves Brenier le maire de Leyrieu, 900 habitants au nord du département qui se présente en dissident à gauche. Il souligne que s’il est élu il siègera avec le groupe socialiste.

 

« Le nord du département est complètement délaissé »

 

Un peu stressé en interview de son propre aveu, cela lui convient « Moi je ne suis pas sénateur sortant, je suis élu d’une petite commune et si cela se voit ce n’est pas grave. »

Certains voient dans sa candidature un match à distance entre Christophe Ferrari le président socialiste de la Métropole grenobloise qui le soutient et Eric Piolle le maire écologiste de Grenoble qui soutient la liste d’union. Jean-Yves Brenier s’en défend : « Nous voulions monter une liste qui représente mieux le nord du département, ce qui n’est pas le cas avec les sénateurs actuels. »

Il a d’ailleurs été très inspiré d’organiser ce jour-là une réunion à la mairie voisine de Chavanoz à 8 kilomètres. « C’est drôle je suis élu depuis 2008 et je n’étais jamais venu. »

Mais pour les grands électeurs qui le reçoivent, le geste est important, « aucun politique ne vient ici, on est loin de tout, on n’intéresse personne » et pour cause, la commune de 2000 habitants, regarde vers Lyon à une quarantaine de kilomètres ; d’ici, Grenoble, capitale du département parait si loin.

 

« En tant que Macroniste, je n’ai pas le vent dans le dos »

 

En tout, 9 listes ont été acceptées par la préfecture, pour 5 sièges et Didier Rambaud sénateur Renaissance sortant, aimerait beaucoup garder le sien, « mais ce n’est pas facile, » concède-t-il un peu dépité. Pour lui la campagne est plus difficile, en 2017 il a bénéficié d’une partie des voix de la gauche dont il est issu mais aujourd’hui il souffre des liens distendus entre Emmanuel Macron et les élus. La suppression de la taxe d’habitation et de la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, un impôt local payé par certaines sociétés, lui coûtent des points. « C’est sûr, je n’ai pas le vent dans le dos, mais je ne m’en cache pas, j’ai été le premier marcheur en Isère, le premier à soutenir Emmanuel Macron et aujourd’hui je pense que c’est important que je sois élu pour représenter la diversité politique en Isère. »

De son handicap il aimerait faire une force, car il l’assure il a l’oreille du président pour faire remonter les problématiques locales D’après les observateurs il bénéficie aussi d’un fort encrage, avec des communes qui ont confiance en lui et qui le voient comme travailleur. Assez pour conserver son siège ?  Il le saura dans quelques semaines.

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