Politique
Issu des travaux d’une commission d’enquête, le Sénat examine, mercredi, une proposition de loi de lutte contre le blanchiment portée par la sénatrice, Nathalie Goulet (centriste) et le sénateur RDSE, Raphaël Daubet.
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Par Henri Clavier
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En juin 2024, juste après la dissolution de l’Assemblée nationale, les profils des candidats présentés par le Rassemblement national dans plusieurs dizaines de circonscriptions avaient défrayé la chronique. Des candidats qualifiés de « brebis galeuses » par le président du parti Jordan Bardella. Parmi ces « brebis galeuses », on retrouvait notamment une personne ayant participé à une prise d’otage, une autre ayant posé avec une casquette nazie ou encore une personne sous curatelle, une mesure qui interdit de se présenter à des élections. L’inéligibilité n’ayant pas été relevée dans le délai imparti, Thierry Mosca, candidat du RN dans la 2e circonscription du Jura, avait pu se qualifier pour le second tour de l’élection.
Malgré la défaite du candidat RN, le Conseil constitutionnel a annulé l’élection en février 2025 considérant que sa présence au second tour avait « affecté de manière déterminante la répartition des suffrages exprimés par les électeurs ». A l’approche des élections municipales, où le volume de candidatures sera nettement supérieur à celui observé pour les élections législatives, la sénatrice RDSE, Sophie Briante Guillemont a souhaité profiter de la niche parlementaire de son groupe, le jeudi 6 novembre, pour déposer une proposition de loi visant à créer un répertoire des personnes inéligibles.
« L’idée, c’est de pouvoir offrir un outil permettant de sécuriser et fiabiliser le processus électoral », explique la sénatrice Sophie Briante Guillemont. Le répertoire recenserait donc les personnes rendues inéligibles par une décision de justice, qu’elle soit émise par le juge pénal, par le juge électoral ou par le juge judiciaire. Dans ce dernier cas, l’inéligibilité découle du placement de la personne sous tutelle ou curatelle ce qui la rend, de fait, inéligible. Ainsi, l’inéligibilité fonctionnelle qui désigne l’interdiction faite à certains fonctionnaires, en raison de leurs fonctions, de présenter leur candidature aux élections dans la circonscription où ils exercent n’est pas incluse dans le périmètre du répertoire.
« Il est très difficile d’expliquer que l’on annule une élection pour des raisons administratives », explique Sophie Briante Guillemont qui assure que les objectifs de son texte étaient partagés par les sénateurs lors de l’examen de la proposition par la commission des lois.
En créant un répertoire regroupant les personnes inéligibles, le texte permettrait de faciliter le contrôle a priori des candidatures. « Actuellement, beaucoup de situations passent à travers les mailles du filet et le contrôle est souvent effectué a posteriori par le juge électoral », détaille le sénateur centriste Olivier Bitz, rapporteur de la proposition de loi. Pour être enregistrée, la candidature doit être déposée auprès de la préfecture qui délivre alors un récépissé temporaire avant de donner un récépissé définitif une fois que les services se sont assurés que la candidature respectait les différentes conditions. « Les préfectures n’ont que 4 jours pour délivrer le récépissé définitif, c’est un délai qui ne permet pas d’interroger le casier judiciaire national afin d’obtenir des informations relatives aux condamnations des candidats », résume le sénateur de l’Orne.
« Il est matériellement impossible de tenir les délais de transmission des casiers judiciaires B2 », abonde Sophie Briante Guillemont, « l’idée c’est donc de simplifier l’accès à cette donnée ». Un accès facilité qui permettrait aux services préfectoraux de renforcer la qualité de leur contrôle a priori des candidatures. Un enjeu majeur puisque les services du ministère de l’intérieur estiment que plus de 900 000 personnes pourraient être candidates aux élections municipales de mars 2026.
Néanmoins, les chances de voir ce répertoire créé avant les élections municipales sont quasiment nulles. Si le texte et son article unique suscitent un soutien transpartisan au Sénat, une adoption rapide ne suffirait pas. D’une part, le répertoire doit s’appuyer sur un fichier recensant les personnes placées sous tutelle et curatelle, prévu par la loi « Bien vieillir » de 2024, dont la création est attendue pour la fin de l’année 2026. Ensuite, le déploiement de ce type d’outil se révèle particulièrement long comme l’illustre l’exemple du répertoire électoral unique, permettant une actualisation continue des listes électorales, dont la création a duré trois ans.
« Nous prévoyons une mise en œuvre du répertoire au 31 décembre 2029 », indique Olivier Bitz qui rappelle qu’un certain nombre de mesures réglementaires doivent être prises en cas d’adoption du texte. Des mesures qui doivent notamment permettre de déterminer l’autorité compétente pour gérer ce répertoire ou encore prendre les dispositions assurant que le répertoire ne contrevient pas au respect des droits des personnes figurant dans le fichier. « La CNIL est favorable car cela permet une meilleure protection et un meilleur accès à la donnée pertinente. Ensuite, contrairement à l’extrait de casier judiciaire, le répertoire ne donnerait qu’une information sur l’éligibilité ou non de la personne », rapporte Sophie Briante Guillemont.
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