Invité de la matinale de Public Sénat, le coordinateur de La France insoumise, Manuel Bompard redoute une entrée en vigueur du budget sans vote. En effet, si les débats excèdent 70 jours, une disposition de la Constitution permet au gouvernement de faire appliquer son projet de loi de finances par ordonnance.
Emmanuel Macron, le parler cash comme outil de communication
Par Public Sénat
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Un parler sans filtre très contrôlé par l’Élysée
12 juin 2018, Emmanuel Macron prépare son discours sur la politique sociale qu’il prononcera le lendemain devant les acteurs mutualistes. Le président teste ses éléments de langage et l’un d’eux fait le buzz : « On met un pognon de dingue dans les minima sociaux ».
Une expression d’argot intergénérationnelle « qui ne vielli pas et que tout le monde comprend » comme le souligne la linguiste Danièle Manesse.
Quelques jours plus tard, Emmanuel Macron commémore l’appel du 18 juin, appel à la résistance lancé depuis Londres par le général de Gaulle en 1940.
Interpellé par des collégiens, il réclame le respect de la part de l’un d’entre eux :
« Tu ne m’appelles pas Manu, tu dis Monsieur le président de la République ou Monsieur. Si un jour tu veux faire la révolution, tu apprends d'abord à avoir un diplôme et à te nourrir toi-même ».
Mais alors pourquoi le locataire d’Élysée recadre-t-il sévèrement ce jeune homme alors qu’il utilise parfois lui aussi un langage populaire ? Y a-t-il une contradiction dans l’usage qu’Emmanuel Macron fait de ces mots…
Pour Danièle Manesse, le président « décide de ne pas occuper sa place tout le temps », un moyen de jouer avec les registres entre « solennité et proximité » souligné par le communicant Gilles Masson.
« Il y a chez lui un parler cash très étonnant, qui a l’air d’être un parler sans filtre mais qui est très contrôlé par l’Élysée ».
Un moyen d’imposer son rythme et de mettre en mouvement un pays que le président considère comme trop immobile selon le communicant.
Inventer le registre de langage qui va frapper l’opinion
Tout comme le président Chirac avait inventé des mots comme « abracadabrantesque », le président Macron « imprime sa marque » en utilisant des mots qui ne laissent pas l’opinion indifférente selon le psychanalyste Jean-Pierre Winter.
« Il y a dans la démocratie, un pouvoir des mots dont il sait faire usage… quitte à choquer mais ça fait partie du jeu ».
Et même si ces mots ont parfois plus de résonance que le fond du sujet lui-même, c’est une communication parfaitement maîtrisée pour Jean-Pierre Winter.
Emmanuel Macron invente ainsi « le faire semblant spontané », un moyen de casser les codes du politique « à la marge ».
À la différence de certains qui, comme Jean-Luc Mélenchon ou Marine Le Pen, cherchent à « renverser la table », pour le psychanalyste, le président tient compte des institutions restant toujours « sur la limite, sur la marge, de sorte qu’on ne puisse pas trop le lui reprocher ».
En inventant son style « sur le fil », Emmanuel Macron invente donc sa posture présidentielle, une posture contrôlée qui n’est pas sans risque de surenchère.
Retrouvez l’intégralité de l’émission Déshabillons-Les, le débat prisonnier des mots, samedi 21 juillet à 15h sur Public Sénat.