La composition du gouvernement de Michel Barnier se fait attendre et la question d’une éventuelle hausse d’impôt, comme le casting, cristallisent les tensions. Le premier ministre a annulé au dernier moment une rencontre avec Gabriel Attal. Au sein de Renaissance, on met en garde Michel Barnier sur la tentation d’une politique trop éloignée du bloc central.
Emmanuel Macron : « On ne choisit pas une part de la France »
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Emmanuel Macron a célébré aujourd’hui les 150 ans de la proclamation de la IIIè République en tenant un discours au Panthéon devant des collégiens et cinq Français récemment naturalisés. Une symbolique censée faire le lien entre les grands hommes et grandes femmes célébrées par le fronton de l’édifice et les nouveaux (et futurs) membres de la communauté nationale. Le Président de la République explicite ce lien dès le début de son discours en rappelant que le 4 septembre 1870, c’est Léon Gambetta, « un fils d’immigré récemment naturalisé, français de sang-mêlé » qui proclame la IIIè République du balcon de l’Hôtel de Ville. Emmanuel Macron retrace une filiation qu’il veut multiple entre ces « figures françaises non par leur héritage mais par leurs combats », en citant notamment Marie Curie, Joséphine Baker, Félix Eboué ou Gisèle Halimi : « Autant de destins dont vous êtes les légataires » intime-t-il à son auditoire.
« Une forme de gravité lucide face aux menaces qui pèsent sur la République »
Ces figures étaient donc « françaises par leurs combats » et le chef de l’État entend faire perdurer cette conception de la citoyenneté comme une défense quotidienne de la République : « C’est votre tour désormais. » Emmanuel Macron insiste : « La République doit être un combat de chaque aube. La République n’est pas donnée, elle n’est jamais acquise, c’est une conquête à toujours protéger » par un « patriotisme républicain de chaque instant ».
En fin de discours, Emmanuel Macron est revenu sur cette idée d’une République à défendre : « En ce jour anniversaire ce n’est pas la joie qui domine, mais une forme de gravité lucide face aux menaces qui pèsent sur la République. » L’unité de cette généalogie tracée par le Président semble se trouver dans cette défense de la République menacée, qu’il oppose implicitement à une simple célébration naïve des rites républicains : « Ne croyez pas que ce ne sont que des mots, c’est toute une histoire : à chaque fois que certains menaceront la République, il faudra la défendre car d’autres avant vous l’ont défendue. C’est à vous de faire vivre la promesse républicaine, reprendre le flambeau et le confier à notre jeunesse qui doit continuer de garder ce goût des rites républicains. »
Mais quelles sont donc ces « menaces » qui pèsent sur la République ? Dans son discours, Emmanuel Macron les a identifiées en déclinant le triptyque républicain « Liberté, Égalité, Fraternité » sous le prisme du « bloc », reprenant ainsi la formule consacrée de Georges Clemenceau, prononcée à la Chambre des députés le 19 janvier 1891 : « La Révolution est un bloc ».
« Les lois de la République sont supérieures aux lois particulières »
Un 4 septembre, la référence tertio républicaine semble à propos. Mais pour Clemenceau, si la Révolution est un bloc et qu’on ne peut donc trier dans son histoire ce que l’on accepte et ce que l’on n’accepte pas, c’est parce que cette Révolution « dure encore » et se « trouve aux prises avec les mêmes ennemis » au début de la IIIè République. En somme, ceux qui veulent « éplucher » la Révolution sont des monarchistes déguisés et la République doit par conséquent faire « bloc » derrière son héritage révolutionnaire.
Emmanuel Macron réactualise donc ce raisonnement en filant la métaphore d’une devise républicaine comme « bloc » que tout citoyen devrait accepter dans sa totalité pour défendre une République menacée. Ainsi « la liberté, dans notre République est un bloc » et donc la liberté individuelle est « indissociable à la soumission aux urnes » qui exprime « la liberté collective du peuple ». En fait, au « bloc » révolutionnaire de Clemenceau destiné à lutter contre un régime politique antagoniste, Emmanuel Macron substitue le « bloc » républicain du « en même temps » et des « droits et des devoirs », qui doit garantir l’unité nationale face au « séparatisme religieux ». En cela, Emmanuel Macron rejoint plus Aristide Briand le libéral, père de la loi de 1905, que Clemenceau l’anticlérical : les citoyens ont des libertés comme « la liberté de conscience et la laïcité, une liberté unique au monde de croire ou de ne pas croire » mais qui est en même temps « inséparable d’une liberté d’expression qui va jusqu’à la liberté de blasphème », que le chef de l’État a tenu à réaffirmer dans le contexte de l’ouverture du procès des attentats de Charlie Hebdo.
De même, si « l’égalité est un bloc », elle ouvre des droits, qui « ne sont pas encore effectifs dans notre République » : « La marche vers l’égalité effective est encore inachevée. Chaque citoyen doit pouvoir construire son destin par son travail et son mérite, mais combien de portes fermées à des jeunes femmes, des jeunes hommes parce qu’ils n’avaient pas les bons codes, n’étaient pas nés au bon endroit ? L’égalité des chances n’est pas encore effective aujourd’hui dans notre République, c’est pourquoi elle est plus que jamais une priorité de ce quinquennat. » Mais pour le chef de l’État, l’égalité implique aussi que « les lois de la République sont supérieures aux lois particulières. Il n’y aura jamais de place en France pour ceux qui au nom d’un Dieu, souvent aidés par de puissances étrangères, entendent imposer la loi d’un groupe. La République, parce qu’elle est indivisible, n’admet aucune aventure séparatiste. »
« On ne choisit pas une part de la France »
Enfin, « la Fraternité est un bloc : elle ne peut perdurer que si chacun reconnaît l’autre comme digne d’être aidé ». Ainsi, si la fraternité est la base de « notre système social unique au monde », elle présuppose aussi que les citoyens ne soient « pas seulement unis par un contrat social mais par des valeurs, une culture commune et un destin commun dans lequel chacun se sent engagé ».
Le Président de la République a insisté, être français, c’est « aimer nos paysages, notre histoire, notre culture, en bloc, toujours : du sacre de Reims à la fête de la Fédération », c’est-à-dire accepter toutes les parties de l’histoire de France : « C’est pour ça que nous ne déboulonnons pas des statues : on ne choisit pas une part de la France. »