Emplois présumés fictifs du FN: les juges alourdissent la mise en examen de Marine Le Pen
Marine Le Pen a vu vendredi sa mise en examen aggravée dans l'affaire des emplois fictifs présumés du FN (devenu RN) au Parlement...

Emplois présumés fictifs du FN: les juges alourdissent la mise en examen de Marine Le Pen

Marine Le Pen a vu vendredi sa mise en examen aggravée dans l'affaire des emplois fictifs présumés du FN (devenu RN) au Parlement...
Public Sénat

Par Nathalie ALONSO et Anne RENAUT

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Marine Le Pen a vu vendredi sa mise en examen aggravée dans l'affaire des emplois fictifs présumés du FN (devenu RN) au Parlement européen, désormais qualifiée en "détournements de fonds publics", lors d'une audition à laquelle elle a refusé de répondre sur le fond.

Convoquée vendredi matin au tribunal de Paris, elle devait être entendue pour la première fois sur le fond de l'affaire après sa mise en examen en juin 2017 pour "abus de confiance" et "complicité d'abus de confiance".

La présidente du Rassemblement national n'a fourni aucune réponse aux magistrats Claire Thépaut et Renaud Van Ruymbeke, qui ont toutefois procédé à la requalification de sa mise en examen pour "détournements de fonds publics".

Ce développement, qui était prévisible après une jurisprudence récente, accentue la menace judiciaire sur la patronne du RN: le délit de "détournements de fonds publics" est passible de dix ans d'emprisonnement et d'un million d'euros d'amende, contre trois ans de prison et de 375.000 euros d'amende pour l'abus de confiance.

En outre, l'affaire fait planer sur Marine Le Pen un risque de peine d'inéligibilité en cas de condamnation par un tribunal.

"Nous sommes totalement innocents des faits qui nous sont reprochés", a-t-elle déclaré à l'AFP vendredi, précisant qu'elle suspendait ses réponses aux magistrats à une décision de la Cour de cassation sur un recours.

- "Séparation des pouvoirs" -

Ce n'est pas la première fois que Marine Le Pen esquive les questions des enquêteurs. Déjà lors de sa mise en examen en juin 2017, elle s'était contentée d'une déclaration, en contestant tout emploi fictif et en déniant aux magistrats le droit d'enquêter sur cette affaire.

"L'autorité judiciaire ne peut s'ériger en arbitre du contenu du travail politique d'un député et de son bien fondé sauf à violer le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs", a-t-elle invoqué au sujet de ce recours devant être examiné le 27 novembre par la plus haute juridiction judiciaire.

Marine Le Pen avait formé un pourvoi sur une décision de la cour d'appel du 4 juin qui l'avait déboutée de ses recours pour faire annuler la procédure.

"J'ai indiqué aux magistrats que je répondrai à l'ensemble de leurs questions après que la chambre criminelle ait tranché cette question de principe qui est absolument primordiale par sa nature constitutionnelle, puisqu'elle touche à l'essence même des principes démocratiques de la République", a-t-elle développé.

Depuis fin 2016, les juges Claire Thépaut et Renaud Van Ruymbeke enquêtent sur un possible "système" organisé "de manière concertée et délibérée" par le parti et sa présidente pour financer des salaires de ses permanents sur les deniers de l'Union européenne, en détournant les enveloppes des eurodéputés réservées à l'emploi d'assistants parlementaires.

L'enquête cible 17 députés et une quarantaine de collaborateurs parlementaires pour un préjudice évalué par le Parlement européen à 6,8 millions d'euros entre 2009 et 2017.

- Autres fronts judiciaires -

En juin, les magistrats avaient ordonné une saisie de 2 millions d'euros sur des subventions publiques, redoutant que le parti, très endetté, ne puisse pas s'acquitter d'éventuels dommages en cas de condamnation. Ce montant a finalement été ramené à 1 million d'euros par la cour d'appel de Paris le 26 septembre, pour tenir compte de la situation financière du parti.

Le RN affirme n'avoir toujours pas reçu le million qui doit lui être restitué, et craint de nouvelles difficultés financières "dans les 10 jours", selon Marine Le Pen.

L'information judiciaire cumule à ce stade une quinzaine de mises en examen connues, pour "abus de confiance", complicité ou recel de ce délit dont le Front national, comme personne morale, et Louis Aliot, le compagnon de la présidente.

Les magistrats entendent désormais requalifier toutes les mises en examen, confortés par une jurisprudence récente de la Cour de cassation, qui autorise les poursuites pour "détournements de fonds publics" contre des parlementaires.

Avant Marine Le Pen, le coprésident du groupe du RN au Parlement européen Nicolas Bay avait déjà vu sa mise en examen requalifiée. L'eurodéputé Bruno Gollnisch pourrait être concerné à son tour lundi.

Outre cette affaire, d'autres fronts judiciaires d'ampleur menacent le parti, ses dirigeants ou des proches: deux procès ont été ordonnés dans les affaires de financement des campagnes de 2012, 2014 et 2015.

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