Invité de la matinale de Public Sénat, Mathieu Darnaud, président du groupe Les Républicains au Sénat, a répété ce jeudi que son parti ne participerait pas à « un gouvernement dont le Premier ministre serait de gauche et porterait le programme du Nouveau Front populaire ». Le responsable pointe « l’irresponsabilité » des forces politiques qui ont voté la censure.
En fin de campagne, François Fillon se place dans le prolongement de la primaire
Par Public Sénat
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François Fillon donne-t-il des gages à l’aile droite de son électorat ? À moins d’une semaine du premier tour de la présidentielle, persuadé de réitérer sa percée surprise des primaires, le candidat de la droite s’est placé sur le créneau d’une droite traditionnelle, offensive sur le terrain de la sécurité et des valeurs.
Émanation politique de la Manif pour tous, Sens commun pourrait faire son entrée au gouvernement, en cas de victoire de la droite. « Pourquoi pas », avait répondu François Fillon ce dimanche sur Radio J. Le mouvement, qui l’avait soutenu durant la primaire, avait joué un rôle notable dans l’organisation du rassemblement du Trocadéro. « Sens commun fait partie des hommes et des femmes qui sont fiers de leur pays, attachés à leurs traditions, pour lesquels j’ai beaucoup de respect, c’est des composantes », avait-il expliqué.
Au Sénat, l’entourage du candidat semble en tout cas ne pas être gêné par ce type de majorité. Bruno Retailleau et Jean-Pierre Raffarin répondent tous les deux à notre micro que Sens Commun « fait partie de la majorité ». François Baroin, pressenti à Matignon en cas d’élection de François Fillon, affirme sur BFMTV ne pas avoir « d’a priori » sur ce mouvement.
Malaise chez certains centristes
La possibilité d’un gouvernement qui intégrerait Sens commun a heurté plus d’un député LR dans l’aile centriste. L’ancien ministre Dominique Bussereau, soutien d’Alain Juppé, a ainsi considéré que cette ouverture serait une « faute ».
Le député-maire de Reims, Arnaud Robinet, proche de Bruno Le Maire durant la primaire, a lui aussi exprimé subtilement son opposition sur Twitter :
Face à ces critiques, l’un des tenants de la ligne dure chez les Républicains, Laurent Wauquiez, en appelle au rassemblement et apporte son « soutien » à Sens commun, qu’il voit comme « injustement caricaturé ».
L’appel du MNR (le parti d’extrême droite de Bruno Mégret) à voter François Fillon dès le premier tour, a également fait réagir Hugues Renson, l’ancien conseiller aux affaires sociales de Jacques Chirac. « Pas ma France », s’est exclamé ce soutien d'Emmanuel Macron sur Twitter.
La position de François Fillon n’est pas nouvelle. Le 6 octobre, alors en pleine campagne pour les primaires, le député de Paris imaginait, à l’américaine, « un ticket » avec Madeleine de Jessey, la cofondatrice de Sens Commun :
«Dommage qu'on ne soit pas aux Etats-Unis parce que s'il y avait une vice-présidence, j'aurais proposé de faire un ticket avec Madeleine. »
Si François Fillon se défend de constituer un gouvernement avant l’élection, la déclinaison du programme n’a elle rien d’hypothétique. Dans ses discours du week-end de Pâques, François Fillon place le curseur très à droite dans ses réunions et dans ses discours. Le ton avait déjà été donné lors de son meeting de la porte de Versailles, le 9 avril.
« La sécurité pour tous »
Samedi, au Puy-en-Velay, un haut lieu du catholicisme, il livre un discours centré sur « l’identité de notre nation » et la « culture française ». Avec Laurent Wauquiez à ses côtés, le candidat déclare que « le patriotisme n’est pas un gros mot ». À quelques mètres de la cathédrale, il énumère les références culturelles et littéraires, il parle histoire, géographie ou encore éducation. « Être Français et vivre en France, c’est une chance mais c’est aussi une charge ».
En déplacement à Nice, l’un des fiefs de la droite, François Fillon s’est ensuite positionné sur une thématique sécuritaire, promettant « la sécurité partout et pour tous » et « la guerre au totalitarisme islamique » :
« Je protégerai la France. Je protégerai les Français. Je protégerai nos intérêts économiques, je protégerai la paix, par la force si c’est nécessaire. »
Philippe Dominati, présent à la réunion du groupe du Sénat, se réjouit que « les vrais sujets » soient enfin abordés dans la campagne. Exit les affaires. Le sénateur de Paris, laconique, voit dans ces sujets des « thèmes importants dans la campagne », et « qui intéressent les Français ».
« Il réaffirme son projet »
Proche de Nicolas Sarkozy, Alain Joyandet n’observe, lui, pas de durcissement dans la campagne, mais plutôt la continuité de la campagne des primaires :
« Je ne vois pas de changement […] J’ai plutôt le sentiment qu’il réaffirme le projet qui a été le sien depuis le début. Peut-être que nous avions un peu oublié cela à cause de la perturbation que nous avons eue. »
Le positionnement de François Fillon peut-il être un obstacle pour élargir son socle électoral ? « À ce stade des élections, il faut laisser notre candidat exprimer son projet, je pense que ce n’est pas le moment de le gêner encore », répond simplement le sénateur de la Haute-Saône, qui rappelle qu’il s’agit d’une campagne de « premier tour ». « Il ne faut pas penser au deuxième tour avant le premier. La spécificité du candidat sera retenue au premier tour. On premier tour, on affirme son projet. »
Un autre signe montre que le candidat muscle sa campagne. Dans son discours, il déplore l’actuelle surpopulation carcérale dans des termes très durs, déjà entendus plus tôt dans cette campagne :
« Disons-le franchement, la prison est devenue l’université de la délinquance et, dans certains quartiers pénitenciers, l’université du fanatisme islamique ! »
Sa formule rappelle les mots qu’avait employés Marine Le Pen lors de la visite d’un centre pénitentiaire en février. La dirigeante du Front national avait réclamé le « rattachement de la pénitentiaire au ministère de l'Intérieur » et le « renforcement du renseignement pénitentiaire » pour que « les prisons ne deviennent pas l'université du jihad et du fondamentalisme islamiste ». La candidate du Front national, avait même été plus loin lors du débat télévisé du 4 avril en affirmait que la France était « une université des djihadistes ».
Tensions avec la presse lors des meetings
Signe d’une campagne qui se tend, le meeting de Nice a lui aussi été le théâtre de nouveaux incidents vis-à-vis de la presse, sifflée lors du meeting. Plusieurs journalistes rapportent avoir été pris à parti durant l’événement, à commencer par une journaliste de BFMTV qui affirme s’être fait cracher dessus.
Deux journalistes du site Buzzfeed rapportent avoir été malmenés par le service d’ordre, alors qu’ils filmaient. Un tableau qui rappelle celui de la porte de Versailles le 9 avril.
« Si la presse se fait siffler, ce n’est pas à ma demande », se défend François Fillon ce matin sur Europe 1, qui se refuse d’excuser les actes de certains de ses partisans :
« Il faut juste parfois vous poser la question de savoir si vous avez zéro responsabilité dans cette situation. Pendant deux mois et demi ou trois mois, on a fait du Fillon-bashing tous les jours […]. Donc il y a un peu de colère chez les militants […] Je la comprends cette colère, je ne l’excuse pas. »
Ces comportements n’ont pas été du goût de Christian Estrosi. Le président de la région Paca a lui aussi été chahuté par le public alors qu’il s’attaquait à Marine Le Pen et à ses déclarations sur le Vél’ d’Hiv.
Le soutien de Nicolas Sarkozy : « dimanche prochain, je vous demande de vous rassembler derrière François Fillon »
À cinq jours du premier tour, les choix de François Fillon sont en tout cas peu commentés à droite, qui fait bloc derrière son candidat et se met à rêver à nouveau d’alternance. Un seul mot d’ordre : « mobilisation générale », nous raconte Jean-Pierre Raffarin.
Comme une illustration de ce « rassemblement », Nicolas Sarkozy a appelé ce mardi soir les électeurs à voter pour François Fillon « sans état d’âme ».
« L'intérêt de la France impose à chacun d’entre nous de voter, sans état d'âme, pour François Fillon. C’est ce que je ferai. »