En Outre-mer, des collectivités aux statuts variés
Le ministre des Outre-mer a souhaité ouvrir la voie à un débat sur l’autonomie de la Guadeloupe alors que l’île vit une grave crise sociale. Une déclaration qui a fait bondir l’opposition d’un bout à l’autre de l’échiquier politique. Cependant, le débat n’est pas nouveau et les territoires d’Outre-mer connaissent des statuts de plus en plus différenciés. Tour d’horizon.

En Outre-mer, des collectivités aux statuts variés

Le ministre des Outre-mer a souhaité ouvrir la voie à un débat sur l’autonomie de la Guadeloupe alors que l’île vit une grave crise sociale. Une déclaration qui a fait bondir l’opposition d’un bout à l’autre de l’échiquier politique. Cependant, le débat n’est pas nouveau et les territoires d’Outre-mer connaissent des statuts de plus en plus différenciés. Tour d’horizon.
Public Sénat

Par Héléna Berkaoui

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« Il n’y a pas de mauvais débat », voulait croire le ministre des Outre-mer avant de soulever une vague de protestations dans les rangs de l’opposition. Avant sa visite en Guadeloupe - qui connaît une grave crise déclenchée par le rejet de l’obligation vaccinale - Sébastien Lecornu s’est dit prêt à évoquer la question de l’autonomie de l’île, si cela pouvait permettre de « résoudre les vrais problèmes du quotidien des Guadeloupéens ».

« C’est une forme de démembrement de l’unité nationale », a fustigé Xavier Bertrand (LR), tandis que Jean-Luc Mélenchon (LFI) a jugé cette annonce « stupéfiante », enjoignant le gouvernement à parler du statut de la Guadeloupe « le moment venu ».

Dans Le journal du dimanche, le ministre a précisé son propos, insistant sur le fait que « l’autonomie, ce n’est certainement pas l’indépendance ». Et d’ajouter que cette autonomie « existe déjà pour certaines collectivités d’outre-mer à des degrés divers, le modèle le plus poussé étant, par exemple, la Polynésie ».

Collectivités d’Outre-mer : une diversification amorcée de longue date

En effet, depuis les années 70 les collectivités d’outre-mer connaissent une diversification croissante de leurs statuts. « Les statuts uniformes ont vécu et chaque collectivité d’outre-mer doit pouvoir désormais, si elle le souhaite, évoluer vers un statut différencié, en quelque sorte, un statut sur mesure », déclarait dans cet esprit Jacques Chirac, en mars 2000.

Depuis la révision constitutionnelle de 2003, il existe deux régimes législatifs pour l’ensemble des collectivités (à l’exception de la Nouvelle-Calédonie et des Terres australes et antarctiques françaises, à « statut particulier »). Le régime de l’identité législative (article 73 de la Constitution) concerne la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et à partir de 2011 Mayotte. Le régime de spécialité législative et d’autonomie (article 74 de la Constitution) englobe lui la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna.

Polynésie française et Nouvelle-Calédonie : une autonomie administrative

Aujourd’hui, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie ont un statut leur conférant une forme d’autonomie parmi les plus abouties. La Polynésie française bénéfice d’un système politique avec un président et un gouvernement local. L’Assemblée de Polynésie est élue au suffrage universel direct tous les cinq ans. Son organisation s’éloigne donc du droit commun puisque l’exécutif local est en capacité de promulguer les « lois du pays » néanmoins soumises à un contrôle spécifique du Conseil d’Etat. Pour autant, la Polynésie française jouit d’une autonomie administrative mais les pouvoirs régaliens restent aux mains de l’Etat central.

La Nouvelle-Calédonie dispose d’un statut à part défini par l’accord de Nouméa de 1998. Le processus de décolonisation de cet accord prévoit la tenue de trois référendums sur l’autodétermination du territoire dont le dernier doit se tenir le 12 décembre prochain. Un scrutin a l’avenir contrarié dans la mesure où les indépendantistes ont annoncé leur refus de prendre part au vote, notamment à cause de la crise sanitaire. En l’état actuel du droit, la Nouvelle-Calédonie a de nombreuses institutions autonomes : le Congrès, le gouvernement, le Sénat coutumier, le Conseil économique, social et environnemental et les conseils coutumiers.

Les Calédoniens connaissent également une citoyenneté particulière, il est ainsi nécessaire de justifier d’au moins dix ans de résidence pour voter aux élections des assemblées provinciales et du Congrès. L’Etat reste cependant compétent dans les domaines du contrôle de l’immigration, la monnaie, le Trésor, la défense nationale, la fonction publique de l’État, le maintien de l’ordre, l’enseignement supérieur et la recherche.

Les collectivités territoriales uniques de Martinique et de Guyane

Le statut de la Martinique et de la Guyane a évolué suite au mouvement social de février-mars 2009. Des consultations ont eu lieu en 2010 où les électeurs ont approuvé la création d’une collectivité unique après avoir rejeté la transformation en collectivité d’outre-mer. Un vote qui acte la création de ces deux nouvelles collectivités et leurs institutions : l’Assemblée de Guyane et l’Assemblée de Martinique. Ces assemblées exercent les compétences attribuées à un département d’outre-mer et à une région d’outre-mer et toutes les compétences qui leur sont dévolues par la loi pour tenir compte de leurs caractéristiques et contraintes particulières. La création d’une collectivité territoriale unique a été proposée aux électeurs de la Guadeloupe en décembre 2003 mais avait été rejetée, le département a donc conservé le même mode d’organisation locale avec un conseil départemental et un conseil régional.

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