En un an, Macron a multiplié les réformes mais doit encore convaincre
En un an, Emmanuel Macron a déjà déroulé une bonne partie de son programme de réformes d'inspiration libérale et veut les poursuivre pour...
Par Laurence BENHAMOU
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En un an, Emmanuel Macron a déjà déroulé une bonne partie de son programme de réformes d'inspiration libérale et veut les poursuivre pour transformer en profondeur le pays mais il doit encore convaincre de son action.
"Nous avons immensément à faire parce que notre pays doit reconstruire les 50 prochaines années de progrès", a lancé le président de la République jeudi sur TF1, lors de l'une des deux interviews télévisées qu'il donne cette semaine pour convaincre les sceptiques.
De fait, si Emmanuel Macron a arrondi les angles sur certains dossiers, il a déjà réalisé ou mis en chantier une trentaine de réformes majeures dans tous les domaines: code du travail, justice, moralisation de la vie politique, ISF, accès à l'université, réduction du nombre de parlementaires et des mandats consécutifs, immigration ou encore assurance chômage et SNCF.
Son gouvernement, dirigé par le juppéiste Edouard Philippe, a aussi décidé de nombreuses mesures qui touchent directement la vie quotidienne: baisse de cinq euros des aides au logement, dédoublement des classes de CP dans les quartiers défavorisés, 11 vaccins obligatoires, hausse du prix du tabac, amendes pour le harcèlement de rue, limitation de vitesse à 80 km/h sur la plupart des routes secondaires, modification du bac et création d'un service national pour les jeunes.
Pour les initier, le pouvoir a pu bénéficier d'une nette embellie économique, avec une croissance revenue à 2% en 2017 - au lieu des 1,5% prévus - et un chômage en décrue, qui a permis une réduction du déficit public plus forte que prévu. En 2017, pour la première fois depuis dix ans, la France est revenue sous les 3% de PIB de déficit public, à 2,6%.
La liste des réformes est si longue et le rythme si rapide que les Français ont du mal à les mémoriser et avoir une vue d'ensemble de l'action du pouvoir. La cote de popularité du tandem de l'exécutif a baissé mais une partie des Français dit attendre pour juger, selon les sondages.
Les réformes à venir sont toutefois encore plus délicates, en particulier l'uniformisation annoncée des régimes de retraites, véritable boîte de Pandore.
- Pragmatisme -
Elu sur la promesse d'une politique "en même temps" de gauche et de droite, Emmanuel Macron est désormais perçu comme penchant nettement à droite, selon les sondages, en particulier en raison de la suppression partielle de l'ISF et d'un projet de loi sur l'immigration jugé sévère pour ceux qui ne bénéficient pas du droit d'asile.
Le chef de l’État Emmanuel Macron (G) et le premier ministre Édouard Philippe, dans la cours des Invalides lors de l'hommage à Arnaud Beltramme, le 28 mars 2018
POOL/AFP
Sa cote de confiance a en conséquence reculé dans les classes populaires, où elle n'est plus que de 27%, et dans les classes moyennes (-6 points à 41%), alors que, parallèlement, elle progresse chez les cadres, à 65%, selon un récent sondage Elabe.
A l'international, l'action réformiste et l'image très dynamique du nouveau chef de l'Etat a considérablement rajeuni et amélioré l'image de la France à l'étranger. Mais ses ambitieux projets de réforme de l'Europe, dont il veut accroître l'intégration et le rôle international, se heurtent pour l'instant à la réticence des pays du nord qui prêchent la rigueur. Le chef de l'Etat tente aussi de renouveler les relations entre l'Europe et l'Afrique en prônant le partenariat plutôt que l'aide.
En décidant de mener dans la nuit de vendredi à samedi, aux côtés des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne, des frappes en Syrie, Emmanuel Macron s'est aussi mué en chef de guerre.
Utilisant tous les pouvoirs dont le dote la Ve République, assumant formules choc et autorité, Emmanuel Macron veut aussi "changer les mentalités" en vantant régulièrement des valeurs comme l'effort individuel, la réussite des "premiers de cordées qui tirent les autres", et l'égalité des chances, plutôt que la redistribution des revenus, chère à la gauche.
Son maître-mot, c'est le pragmatisme, qui, selon lui, rend ses choix inévitables et de bon sens. Au point qu'il revendique un "humanisme pragmatique" à propos de sa loi asile-immigration, dénoncée par la gauche et quelques membres de sa majorité.
Mais sur ses choix politiques et sociaux, comme sur ses relations avec certains dirigeants internationaux autoritaires ou contestés qu'il ménage - de Donald Trump et Vladimir Poutine à l'Egyptien Abdel Fattah Al-Sissi - ce "en même temps" qui l'a fait élire l'oblige à cheminer sur une délicate ligne de crête.
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