Après le Sénat, l'Assemblée nationale se penche à partir de lundi sur le sort des maires, réunis au même moment en Congrès à Paris, auxquels un projet de loi est dédié dans la perspective des élections municipales de mars.
Défendu par le ministre chargé des Collectivités territoriales Sébastien Lecornu, ce texte devant faciliter la vie des élus locaux est au menu du Palais Bourbon jusqu'à vendredi, avec quelque 1.500 amendements à la clé.
"Des maires seront dans les tribunes", ce qui "évitera la démagogie", glisse un député, alors que le 102e congrès de l'Association des maires de France (AMF) se tiendra de mardi à jeudi à quelques encablures.
Après des mois de tensions avec l'exécutif, ce projet de loi Engagement et Proximité se veut une réponse concrète aux attentes des maires exprimées lors du Grand débat national, et tout particulièrement ceux des communes rurales.
Baisse de dotations, "marche forcée" vers les grandes intercommunalités et aussi, dans une certaine mesure, défiance vis-à-vis du politique: les maires et plus généralement les 600.000 élus locaux, très majoritairement bénévoles, se sentent dépossédés, déclassés, impuissants.
Voté à une très large majorité au Sénat, le projet de loi est plutôt bien accueilli à l'Assemblée mais plusieurs groupes politiques attendent de voir son évolution pour fixer leur position de vote.
Les Républicains souhaitent notamment inscrire le respect du "principe de laïcité" dans la charte de l’élu local, reprenant par là une proposition de Bruno Retailleau, président des sénateurs LR.
- Pas de "grand soir des compétences" -
Le texte gouvernemental repose sur deux piliers majeurs: redonner des libertés locales afin de répondre au sentiment d'impuissance des maires. Et décliner une série de mesures pour faciliter le quotidien des élus (revalorisation des indemnités, frais de garde des enfants, droit à la formation...), autant d'encouragements à s'investir ou renouveler son engagement dans la vie politique locale, à cinq mois des municipales.
"Les +marcheurs+ ne sont pas déracinés ou éloignés des réalités locales. Nous serons des aiguillons", promet Sacha Houlié, chef de file des députés LREM sur ce texte.
En octobre, les sénateurs, majoritairement de droite, ont largement réécrit le projet de loi, notamment en poussant un peu plus loin le rééquilibrage des relations communes/intercommunalité et en proposant une "intercommunalité à la carte".
"Le Sénat a voulu faire le grand soir des compétences. Nous allons retenir ce qui peut l'être", indique un responsable de la majorité à l'Assemblée.
Dès l'examen en commission, les députés sont revenus sur nombre d'ajouts de la chambre haute. Ils ont aussi esquissé des compromis, par exemple en aménageant le transfert obligatoire des compétences "eau" et "assainissement" des communes à l'intercommunalité, transfert dont le Sénat ne voulait pas.
Les députés ont aussi mis leur patte: alors que le scrutin de liste paritaire ne s'applique actuellement qu'aux communes de plus de 1.000 habitants, ils ont abaissé le seuil à 500 habitants à compter de 2026.
Certains élus dans la majorité plaident pour aller plus loin en faveur de l'entrée de femmes dans les conseils municipaux, mais avec le risque que des listes ne puissent se monter dans certaines communes, à l'heure de la crise des vocations.
Le gouvernement a aussi quelques amendements nouveaux pour la séance, sur les indemnités des élus, pour remettre en circulation des licences IV permettant la vente d'alcool dans les débits de boissons, dans les communes rurales en soutien au commerce. Ou encore pour prévoir, en cas de crise, une information des maires par le préfet, après l'incendie de Lubrizol, dans le sens souhaité par le Sénat.
Le gouvernement entend "bâtir un consensus le plus large possible" et souhaite une adoption définitive rapide du texte, pour une mise en oeuvre dès début 2020.