Défense commune, budget de la zone euro, réformes des politiques migratoires et d’asile… Autant de chantiers qu’Emmanuel Macron souhaite engager au niveau européen. Et pour y parvenir, c’est vers son homologue allemande qu’il entend se tourner. Avec Angela Merkel, il espère retrouver « l’esprit de confiance qui existait jadis entre François Mitterrand et Helmut Kohl. »
Tout en affirmant que « l’Allemagne a besoin de la France pour se protéger et protéger l’Europe », il admet que la chancelière « a fait bouger les choses profondément » en matière de sécurité et de défense : le budget alloué à cet effet par Berlin est désormais plus élevé que celui de la France. « Qui l’eût cru ? » ironise le Président, qui s’est fixé comme objectif « des dépenses équivalentes à 2% du PIB à l’horizon 2025 » avec « une stratégie pluriannuelle ».
Le couple franco-allemand n’a pas vocation à être exclusif puisqu’Emmanuel Macron tient à la mise en place d’une « vraie politique de défense et de sécurité commune », tant au niveau de la coopération policière et judiciaire pour lutter contre le terrorisme qu’en matière économique et sociale.
L’une des idées phare du Président, c’est la création d’un budget de la zone euro « aidé d’une gouvernance démocratique », « seul moyen pour recréer un mouvement de convergence entre nos économies et nos pays ». Une idée à laquelle Angela Merkel s’est dite « ouverte ».
« La France n’aura aucune capacité motrice (…) si elle ne renforce pas son économie et sa société », prévient Emmanuel Macron, à commencer par le droit d’asile et la politique migratoire. Il regrette un délai d’instruction des dossiers trop long - « jusqu’à deux ans » - et demande en conséquence « une réforme en profondeur du système d’asile en France ». Quant aux migrants, « ils n’ont pas vocation à s’établir en France ». Le chef de l’État tient donc à « assurer l’effectivité de leur reconduite à la frontière et travailler étroitement avec les États d’où sont originaires ces personnes ».
« On ne peut pas continuer à faire l‘Europe dans des bureaux »
Une politique migratoire qui doit également se mener au niveau européen. « On ne peut pas continuer à faire l‘Europe dans des bureaux, à laisser les choses se déliter », estime le président de la République. Il prend notamment l’exemple du travail détaché : « En raisonnant comme on le fait, on prend l’Europe à l’envers (…) Les grands défenseurs de cette Europe ultralibérale et déséquilibrée, au Royaume-Uni, se sont fracassés dessus. »
Emmanuel Macron plaide également pour « renforcer les contrôles aux frontières extérieures de l’Union européenne » ainsi que pour « donner plus de moyens à l’Agence européenne des gardes-frontières et des gardes-côtes pour gérer notamment les crises à ses frontières ». Enfin, il rappelle être « attaché à l’espace Schengen ».
Par toutes ces mesures, il espère mettre fin au « doute » que les « classes moyennes de nos sociétés » ont vis-à-vis de l’Union européenne. Un doute dont « la France a fait la cruelle expérience ». Mais elle est loin d’être la seule : « Quand nous regardons la planète, aujourd'hui, que voyons-nous? Une montée des démocraties illibérales et des extrêmes en Europe, la réémergence de régimes autoritaires qui mettent en cause la vitalité démocratique, et des États-Unis d'Amérique qui se retirent en partie du monde » constate-t-il.
Pour lui, l’Europe a une « responsabilité historique » comme terre de naissance de la démocratie. Avec un tel discours, il se place en leader européen. Une position qu’il réfute : « Le leadership ne se décrète pas, il se construit. » Il affirme ne pas prendre pour acquis son élection ni l’acquisition d’une large majorité à l’Assemblée nationale. Et de conclure : « C’est un début exigeant »
Une exigence qu’il dit vouloir avoir à l’égard du Royaume-Uni, « avec qui il ne veu(t) pas de discussions bilatérales (…) pour préserver l’intérêt de l’UE ». Il souhaite toutefois renforcer sa forte relation en matière de défense et de sécurité (…) davantage coopérer en matière de lutte contre le terrorisme et de migration ». Les discussions ne seront donc pas tout à fait rompues avec les Britanniques. Pourtant, le Président l’affirme : « L’Europe n’est pas un supermarché. »
*Le Soir, Le Temps, The Guardian, Corriere della Sera, El Pais, Süddeutsche Zeitung, Gazeta Wyborcza