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Européennes : « Reconquête joue sa survie dans cette élection »

Éric Zemmour a annoncé mercredi une liste Reconquête pour les Européennes conduite par Marion Maréchal. Le parti de droite identitaire dispose déjà de quatre eurodéputés élus en 2019 sur la liste RN et qui ont rejoint les rangs du polémiste en 2022. L’objectif fixé par le porte-parole du parti Stanislas Rigault est d’obtenir une dizaine de sièges en ciblant prioritairement l’électorat des Républicains. Reconquête aura du mal à titiller la liste RN de Jordan Bardella, le grand favori des sondages.
Simon Barbarit

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Et si les Elections européennes étaient le scrutin idéal pour réaliser « l’union des droites » chère à Éric Zemmour ? C’est en tout cas l’objectif que s’est fixé le président de Reconquête en annonçant mercredi en fin de journée, dans les colonnes du Figaro, une liste conduite par Marion Maréchal. « Nous avons l’opportunité historique de faire basculer la majorité (du Parlement européen), aujourd’hui tenue par le centre et par la gauche, vers une majorité de la vraie droite », a affirmé une heure plus tard sur le plateau de TF1, la tête de liste.

Après deux échecs électoraux, à la présidentielle et aux législatives, le jeune parti d’extrême droite ne part cette fois-ci pas de rien. Quatre eurodéputés RN avaient rejoint Reconquête lors de la campagne présidentielle : Maxette Pirbakas, Nicolas Bay, Gilbert Collard et Jérôme Rivière. Les deux derniers ont pris depuis de la distance avec Éric Zemmour et ne seront pas réinvestis. « Ce n’est pas encore gravé dans le marbre, mais Nicolas Bay et moi-même seront sur la liste », confirme à publicsenat.fr, Stanislas Rigault, porte-parole de Reconquête. Quant à la présence d’Éric Zemmour sur la liste, l’intéressé, laisse planer le doute. Erwan Lecoeur, sociologue et politologue spécialiste de l’extrême droite est dubitatif à l’évocation d’une liste sans la présence de l’ancien chroniqueur de Cnews. « Que ce soit Marion Maréchal ou Éric Zemmour, les deux ont besoin d’atterrir quelque part. Ils ont besoin d’un salaire et d’un mandat qui leur permettent d’exister politiquement. Cette élection est aussi essentielle pour conserver les troupes qu’ils ont su attirer lors de la campagne présidentielle. Ils doivent bien leur donner quelque chose à grignoter. Et pour ça un mandat européen, c’est parfait, c’est bien payé sans pour autant nécessiter une grande assiduité ».

« Le risque, c’est qu’ils soient victimes du syndrome Dupont-Aignan »

Ne disposant d’aucun député et seulement de deux sénateurs, Stéphane Ravier, transfuge du RN et Sébastien Meurant, ancien de LR même s’il est toujours rattaché administrativement au groupe, Reconquête ne peut se permettre de perdre sa poignée d’élus à Bruxelles s’il veut rester crédible au plan national comme un représentant incontournable des électeurs attirés par la droite identitaire. D’autant que les sondages sont encourageants pour le bloc de droite. Une étude Ifop réalisée pour Sud Radio les 4 et 5 juillet derniers, donnait la liste Reconquête à 7 %, loin derrière la liste RN de Jordan Bardella (26 %) mais à quelques encablures de la liste LR (11 %). En 2019, la liste LR emmené par François-Xavier Bellamy qui avait fait campagne en affichant ses positions conservatrices, notamment sur les questions sociétales comme l’avortement, n’avait récolté que 8,3 %. « Le RN et Reconquête ne jouent pas dans la cour. L’enjeu pour Jordan Bardella est de passer devant la liste de la majorité présidentielle comme il l’avait fait en 2019. Pour Reconquête, le parti joue sa survie dans cette élection. C’est un scrutin vital pour continuer d’exister jusqu’à la prochaine présidentielle. Le risque, c’est qu’ils soient victimes du syndrome Dupont-Aignan en finissant sous la barre des 5 % (Le seuil nécessaire pour envoyer des élus aux Parlement) », analyse Jean-Yves Camus, politologue et spécialiste de l’extrême droite.

« Note objectif, c’est de remplacer les Républicains »

Stanislas Rigault ne cache pas qu’il louche sur un autre électorat que celui du RN. « Note objectif, c’est de remplacer les Républicains. Nous sommes aux coudes à coudes dans les sondages et leurs cadres ont des positions qui se rapprochent des nôtres. On l’a vu pendant les émeutes, avec les déclarations de Bruno Retailleau (président du groupe LR au Sénat). Les électeurs de LR et même Nicolas Sarkozy sont en faveur d’une alliance des droites avec Eric Zemmour », veut croire le porte-parole en référence au dernier livre de l’ancien chef d’Etat.

Quelle campagne pour Reconquête ?

Erigés au rang d’enjeu civilisationnel, la lutte contre l’immigration et « l’islamisation » du continent européen sera le cœur de la campagne de Reconquête. Et si Jordan Bardella  (RN) souhaite la tenue d’un référendum sur l’immigration le jour de l’élection, Éric Zemmour veut lui carrément faire de ce scrutin « un référendum sur l’immigration. « Au niveau européen, la vision du monde portée par Marion Maréchal et Éric Zemmour a plutôt le vent en poupe. On le voit en Allemagne, en Italie, en Espagne… C’est l’extrême droite ultralibérale sur le plan économique un peu à la manière de Jean-Marie Le Pen dans les premiers temps. Le RN se place plutôt dans un courant qu’on pourrait qualifier de populiste nationaliste », note Erwan Lecoeur.

Quel groupe pour Reconquête ?

Au Parlement européen, la vingtaine d’élus RN est membre du groupe Identité et démocratie (ID). Le groupe représente 10 % des 705 sièges du Parlement avec une soixantaine d’élus eurosceptiques, dont les Italiens du Mouvement 5 étoiles et les Allemands de l’AFD. Les quatre élus Reconquête figure actuellement chez les non-inscrits, mais au prochain renouvellement, si la liste d’Éric Zemmour envoie des élus au Parlement, ils se verraient bien siéger chez les Conservateurs et réformistes européens (CRE), comme le confirme Stanislas Rigault. Il s’agit du deuxième groupe d’extrême droite au Parlement comprenant également une soixantaine d’élus, libéraux et conservateurs sur le plan sociétal. On y retrouve les Polonais du parti Droit et justice (PiS), les Espagnols de Vox, et aussi le parti de la présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni, Fratelli d’Italia. A noter qu’aucun élu Français ne figure dans ce groupe.

Mais comme l’explique, Gilles Ivaldi, chercheur CNRS et au centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), si la liste conduite par Marion Maréchal obtient des eurodéputés, ils pourraient bien se retrouver chez les non-inscrits. « Au sein du CRE, ce sont des partis qu’on pourrait qualifier de fréquentables, avec des positions euroréalistes et avec un euroscepticisme plus modéré qu’à l’ID. C’est également un groupe atlantiste et très anti-russe. Or, Éric Zemmour a affiché lors de la campagne présidentielle, des positions pro-Poutine, ce sera très compliqué pour les Polonais du parti Droit et justice (PiS), ou les élus de Fratelli d’Italia, d’accueillir en leur sein un parti pro-russe. Certes, le groupe CRE a pour projet de réaliser l’Union des droites mais Éric Zemmour est perçu comme très radical en avançant sur des thèmes comme la remigration ou le grand remplacement. Tout dépendra du score que fera liste Reconquête, mais je ne vois pas pour l’instant un alignement de planètes pour voir des élus Reconquête au sein du CRE ». Quant à l’hypothèse pour la liste d’Éric Zemmour d’intégrer le groupe ID, elle n’est pas non plus crédible pour le politologue. « Ce groupe est quand même centré autour du RN et Marine Le Pen sait très bien qu’Éric Zemmour sera candidat à la présidentielle en 2027. Pour le placardiser, elle a tout intérêt à le laisser chez les non-inscrits. Quand vous êtes non-inscrits au Parlement européen, vous n’existez pas ».

 

 

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