« Aurez-vous le courage de Simone Veil ? », demandait le député socialiste, Olivier Falorni, à la ministre de la Santé au sujet de légalisation de l’euthanasie, en novembre dernier. Cette question prend forme aujourd’hui. 156 députés – majoritairement En marche ! - ont signé une tribune dans le journal Le Monde pour « sortir de l’hypocrisie » qui entoure l’encadrement de la fin de vie en France. La loi Clayes-Leonetti de 2016 qui avait autorisé la sédation profonde et continue n’est pas suffisante, selon eux.
Coordinateur du Parti socialiste et sénateur du Val-d’Oise, Rachid Temal appelle les parlementaires à former un groupe de travail commun aux deux assemblées afin de déposer une proposition de loi dans les meilleurs délais. Contacté par Public sénat, Rachid Temal confie avoir déjà discuté avec plusieurs députés signataires, dont le socialiste Jean-Louis Touraine qui s’est déjà illustré dans la lutte pour le droit à mourir dans la dignité.
« Le droit à disposer de sa mort »
Le sénateur socialiste veut œuvrer pour une « conviction profonde » : « le droit à disposer de sa mort ». Comme ses collègues députés, Rachid Temal estime que la loi Claeys-Leonetti ne va pas assez loin. En 2016, cette loi a autorisé la sédation profonde et continue pour les patients atteints d’affections graves et incurables. L’amendement de Jean-Louis Touraine visant à autoriser l’euthanasie active avait alors été rejeté.
Si Rachid Temal voit en ce texte une avancée, il considère également qu’il n’est pas suffisant. La sédation profonde - qui peut s’accompagner d’un arrêt de la nutrition et de l’hydratation – fait débat. « On peut considérer que des gens ne veulent pas vivre cela », argue Rachid Temal qui estime que cette pratique ne « répond pas à tous les drames humains ». Il considère que « le dernier mot doit revenir au patient » et plaide pour l'autorisation de l'euthanasie et du suicide assisté.
« Il n’est pas opportun d’envisager une nouvelle loi sur la fin de vie »
Jean Leonetti s’est opposé publiquement à l’initiative des parlementaires. « Il n’est pas opportun d’envisager une nouvelle loi sur la fin de vie alors qu’une législation de 2016 a été votée à l’unanimité et ne s’applique que depuis un an » a-t-il réagi sur Twitter. Un argument bancal pour Rachid Temal qui rétorque que ce ne serait pas la première fois qu’une loi serait révisée de la sorte.
La ministre de la Santé, elle, partage la position de Jean Leonetti. « La loi actuelle doit faire l’objet d’une évaluation sur ses modalités de mise en œuvre », expliquait Agnès Buzyn en réponse à la question d’Olivier Falorni. Elle ajoutait que le gouvernement n’envisageait pas « de réforme ni de calendrier spécifique concernant le sujet de la fin de vie ». Ces propos tenus en novembre sont-ils susceptibles d’évoluer ? Mis à part les 122 signatures des députés La République en marche, rien ne permet de l’affirmer. Les états généraux de la bioéthique - qui constituent une phase de concertation en vue de la révision de la loi bioéthique prévue fin 2018 - pourraient potentiellement jouer un rôle.
Ces tergiversations contrastent avec une opinion publique qui frôle l’unanimité sur le sujet. Selon un sondage Ifop pour La Croix et le forum européen de bioéthique publié en décembre, 87 % des Français – et 72 % des catholiques pratiquants – pensent que la loi sur la fin de vie doit aller plus loin par l’autorisation de l’euthanasie et/ou du suicide assisté. Le poids de l’opinion publique ne suffit pourtant pas à trancher une question qui touche une problématique sociétale majeure.