Fin des « contrats de Cahors » : réactions mitigées après le discours d’Elisabeth Borne

Fin des « contrats de Cahors » : réactions mitigées après le discours d’Elisabeth Borne

La première ministre Elisabeth Borne a annoncé que le gouvernement ne maintiendrait pas de « mécanisme de sanction » pour les communes qui ne limitent pas assez leurs dépenses. « Une bonne chose », salue la sénatrice centriste Françoise Gatel. Mais le président de l’Association des maires de France, David Lisnard, craint qu’il n’y ait pas « l’inflexion nécessaire et attendue » de la part de l’exécutif.
François Vignal

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Elle assure avoir entendu les communes. La première ministre Elisabeth Borne a annoncé qu’il n’y aurait pas de contrat de confiance entre l’Etat et les communes, une nouvelle forme des « contrats de Cahors », qui avaient été tant décriés par les élus locaux. « Notre intention n’est pas de maintenir un mécanisme de sanction. Nous ne voulons pas de nouveaux contrats de Cahors », a assuré la première ministre, en clôture du Congrès de l’Association des maires de France (AMF).

Les communes devront cependant limiter leurs dépenses – objectifs qui étaient contraignants dans les contrats de Cahors – mais cette fois, « les collectivités et l’Etat seront soumis au même niveau d’exigence », a-t-elle précisé.

« On fait déjà des efforts. Les communes votent des budgets à l’équilibre »

Pour le président de l’AMF, le maire LR de Cannes, David Lisnard, le compte n’y est pas totalement, même s’il salue un progrès. « Non, ce n’est pas satisfaisant. Bien sûr, qu’il n’y ait pas de contrainte, c’est une avancée considérable, obtenue par l’AMF. Mais la petite phrase ajoutée après, qu’il y aura une équivalence dans l’effort », pose problème au numéro 1 de l’AMF, qui a réagi sur le plateau de Public Sénat depuis le congrès (voir la vidéo). Car, a-t-il rappelé, « nous, on fait déjà des efforts. On vote des budgets à l’équilibre ». Les communes sont dans l’obligation de le faire.

« Il est temps de sortir maintenant de cette fiction d’une problématique des comptes publics pour la France, par les collectivités », exhorte le maire de Cannes, qui ajoute :

Sur le principe même d’une vision très Bercy, qui consiste à penser que les collectivités peuvent être ponctionnées, je ne suis pas sûr qu’on ait l’inflexion nécessaire et attendue.

« Un jeu de dupe »

« Nous verrons bien. Chat échaudé, craint l’eau froide » réagit pour sa part Patrick Kanner, président du groupe PS du Sénat, qui souligne que « d’une manière ou d’une autre, des efforts seront demandés aux collectivités ».

Il souligne que la hausse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de 320 millions d’euros est « deux fois voire trois fois » inférieure à « l’inflation attendue en 2023. C’est un jeu de dupes. Nous demandons une indexation de la DGF sur l’inflation », que vient justement de voter le Sénat, dans le cadre de l’examen du Budget. Mais le gouvernement pourra revenir dessus lors du retour du texte à l’Assemblée.

« Qu’on renonce aux contrats de Cahors est une bonne chose »

De son côté, la sénatrice Françoise Gatel, présidente de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, salue malgré tout le geste. « Qu’on renonce aux contrats de Cahors est une bonne chose. Il faut rappeler que les collectivités ne font qu’exercer une série de missions essentielles, pour le compte de l’Etat ».

Quant aux efforts, la sénatrice UDI d’Ille-et-Vilaine souligne que les collectivités sont déjà « dans une logique très prudente. Elles ne savent pas comment vont se passer les choses en 2023 et 2024. Et elles ont déjà balayé ce qu’elles pouvaient optimiser comme dépenses. Elles sont déjà dans une logique de responsabilité et je rappelle qu’elles ont une obligation de comptes à l’équilibre ». Mais encore une fois, « ce qui est bien, c’est qu’Elisabeth Borne renonce clairement aux contrats de Cahors, il faut souligner ça. J’acte le geste. J’espère que c’est compris ».

« Des collectivités vont se retrouver dans d’énormes difficultés dans l’année 2023 »

Concernant les aides pour faire face au coût de l’énergie, il faudra, pour la présidente de la délégation aux collectivités, certainement aller plus loin que l’amortisseur et le filet de sécurité. « Le président de la commission des finances (le socialiste Claude Raynal, ndlr) a dit qu’on allait avoir en 2023 des collectivités en grande difficulté, qui n’arrivent pas à équilibrer leurs budgets, alors qu’elles ont déjà éliminé des dépenses », alerte Françoise Gatel.

Pour la sénatrice, « il faut prévoir à un moment une sorte d’enveloppe d’urgence pour des collectivités qui vont se retrouver dans d’énormes difficultés dans l’année 2023. Quand vous entendez des maires dirent qu’ils ne savent pas comment ils vont payer leur électricité ou la cantine… ». Françoise Gatel souligne que le Sénat a déjà prévu d’élargir et de simplifier le filet de sécurité, ainsi qu’une indexation de la DGF sur l’inflation donc. « C’est un milliard d’euros en plus ». Pour la centriste, « si l’Etat avait accepté l’indexation, on n’était pas obligé d’inventer des filets de sécurité aussi compliqués ».

Dans la même thématique

Fin des « contrats de Cahors » : réactions mitigées après le discours d’Elisabeth Borne
3min

Politique

Meurtre d’Aboubakar Cissé : « Le ministre de l’Intérieur n’a pas exprimé une émotion à la hauteur », dénonce Guillaume Gontard

Le président du groupe écologiste du Sénat, Guillaume Gontard, reproche la mollesse de la réponse « des plus hautes autorités de l’Etat », après l’assassinat d’Aboubakar Cissé, fidèle musulman, tout en saluant les « mots justes » employés par François Bayrou. « Le drame du Gard est épouvantable » a rappelé le premier ministre.

Le

Paris : Jordan Bardella and Marine Le Pen at Matignon
4min

Politique

Législatives : Marine Le Pen prête à « défendre » le retour de la proportionnelle intégrale de 1986

La présidente du groupe RN de l’Assemblée nationale, Marine le Pen et le président du parti, Jordan Bardella ont entamé le cycle de consultations à Matignon sur le scrutin proportionnel aux législatives. A la sortie, Marine le Pen a indiqué que le Premier ministre penchait pour un retour du mode de scrutin de 1986, « c’est-à-dire la proportionnelle intégrale par département ».

Le

Illustration facade et entree d une Mairie.
11min

Politique

Polémique sur une nouvelle « contribution » locale : « Ça confirme que c’était une connerie de supprimer la taxe d’habitation »

En avançant l’idée d’une « contribution modeste » pour recréer le lien entre communes et citoyens, le ministre François Rebsamen a relancé ce débat sensible de la fiscalité locale. Au Sénat, tous les sénateurs dénoncent la suppression de la taxe d’habitation par Emmanuel Macron. A la place, le sénateur Bernard Delcros, président de la délégation aux collectivités, soutient l’idée d’une « contribution » qui serait « différentiée, en fonction des revenus des habitants », via « une remise à plat » des impôts locaux.

Le