Fonction publique : attention chantier sensible
Ce mardi, Gérald Darmanin, le ministre de l'Action et des Comptes publics, dont le portefeuille englobe la fonction publique, a reçu les syndicats de fonctionnaires. Le ministre entend mettre en œuvre la réduction de 120 000 postes dans la fonction publique.

Fonction publique : attention chantier sensible

Ce mardi, Gérald Darmanin, le ministre de l'Action et des Comptes publics, dont le portefeuille englobe la fonction publique, a reçu les syndicats de fonctionnaires. Le ministre entend mettre en œuvre la réduction de 120 000 postes dans la fonction publique.
Public Sénat

Par Pierre de Boissieu

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Le ministre de l’Action et des Comptes publics doit rencontrer neuf organisations syndicales de fonctionnaires, jusqu'à lundi prochain. Ce mardi, il a reçu, à l’Hôtel de Cassini, rue de Babylone à Paris, les membres de la CGT, le premier syndicat représentatif chez les fonctionnaires, de la CFDT, le deuxième syndicat, de FO, le troisième.

Interrogé ce matin sur RTL à propos du nouveau nom de son ministère qui regroupe les fonctions des anciens ministères du Budget et de la Fonction publique, Gérald Darmanin a indiqué que cette fusion permettrait « d’être au rendez-vous de la simplification et des nouvelles technologies. »

Le ministre a précisé que l’objectif d’une réduction de 120 000 postes de fonctionnaires allait être respecté. Il s’est par ailleurs voulu rassurant, expliquant que son gouvernement adopterait une approche « non-comptable. » Il a en effet assuré « qu’on ne supprime pas des fonctionnaires mais des postes de fonctionnaires. »

Cette affirmation répondait à la critique adressée par Annick Girardin, l'ancienne ministre de la Fonction publique de François Hollande, devenue la ministre des Outre-mer d’Emmanuel Macron, le 20 mai dernier sur France Info. Elle y a expliqué que la réforme de la fonction publique « n'est pas une question de nombre. » « Nous avons à revoir nos services publics. Et surtout nous avons à faire en sorte que les services publics soient bien là où ils sont attendus dans les milieux les plus isolés », avait-elle affirmé.

« Un point de rupture » pour la CGT

À l’issue de la première prise de contact, Jean-Marc Canon, le représentant de la CGT fonction publique, a indiqué « qu’il s’agissait d’un premier échange », tout en regrettant l’abandon du terme fonction publique dans le nom du ministère. La suppression de 120 000 postes de fonctionnaires sera considérée comme un « un point de rupture » pour le syndicat qu’il représente. « Les grandes orientations, nous les contestons, et ce matin nous n'avons pas eu d'éléments qui précisent les choses » a déclaré Jean-Marc Canon.

Jean-Marc Canon : « La question du pouvoir d’achat, la valeur du point, les effectifs, la retraite, le jour de carence ont été abordés dans l’entrevue avec le ministre. »
00:38

« La question du pouvoir d’achat, la valeur du point, les effectifs, la retraite, le jour de carence ont été abordés dans l’entrevue avec le ministre », a expliqué ce dernier. Le fait de scinder la valeur du point d'indice des fonctionnaires qui sert à calculer la rémunération dans la fonction publique inquiète également la CGT, a souligné Jean-Marc Canon. Le ministre a par ailleurs confirmé qu'il n'y aurait « pas de hausse de la valeur de ce point d'indice » sous le quinquennat.

La CFDT veut privilégier la réflexion sur les missions des fonctionnaires

Mylène Jacquot, la secrétaire générale de la CFDT fonction publique, a indiqué que, pour le syndicat qu’elle représente, toute « modernisation » de la fonction publique devait d’abord passer par une réflexion sur les missions. Interrogée sur le bilan à tirer de cette première rencontre, Mylène Jacquot a déclaré avoir « dit [nos] attentes en matière de carrières et de rémunérations », espérant que le gouvernement « puisse annoncer assez rapidement la tenue d’un rendez-vous salarial dès 2017 » et annoncer « un agenda social. » « On jugera aux actes » a-t-elle précisé. La responsable syndicale a cependant salué un ministre « plutôt à l'écoute » - un pronostic partagé par le représentant de FO - qui dit « vouloir réfléchir à la question des missions et de la modernisation. »

Mylène Jacquot : « J'aimerais que le gouvernement puisse annoncer assez rapidement la tenue d’un rendez-vous salarial dès 2017. »
00:19

« Nous n'irons pas autour d'une table pour discuter de comment on supprime 120 000 fonctionnaires » a cependant affirmé Mylène Jacquot, ajoutant que « s'adapter aux attentes des usagers avec des services publics plus accessibles partout, grâce au numérique notamment, nécessite des accompagnements pour les agents. »

FO regrette des « mauvaises annonces » mais se dit satisfaite de la méthode

Christian Grolier, le secrétaire général de FO fonction publique, a expliqué que le programme était « une mauvaise nouvelle », la réduction du nombre de postes de fonctionnaires étant, pour lui, « une logique comptable contre laquelle FO s’est battue pendant dix ans, sous les quinquennats de Nicolas Sarkozy puis de François Hollande. » « Le postulat de départ de la réduction de 120 000 postes de fonctionnaires ne nous plaît pas » a déploré Christian Grolier.

De même, au sujet du jour de carence des fonctionnaires, le secrétaire général de FO fonction publique a regretté que le rétablissement de ce jour de carence soit à l’agenda du ministre. Ce système, mis en place pour les fonctionnaires par Nicolas Sarkozy en 2011, consiste à supprimer la paie le premier jour d'absence pour maladie. Durant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s'était dit favorable à cette mesure, de même que François Fillon et Marine Le Pen, contrairement à Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon.

La méthode employée par le ministre semble cependant satisfaire FO, à travers la voix de Christian Grolier, et notamment la volonté manifeste de Gérald Darmanin de « trouver un compromis. » Christian Grelier a salué le choix de ce dernier de procéder par réunions bilatérales plutôt que par « grands-messes avec tous les syndicats, comme sous le quinquennat de François Hollande. »

Partager cet article

Dans la même thématique

Restos du Coeur depot departemental des Alpes-Maritimes
7min

Politique

Les associations seront-elles sacrifiées par le serrage de vis budgétaire ?

Il l’a annoncé mardi, François Bayrou veut faire 43,8 milliards d’euros d’économies. Tous les ministères sont priés de contribuer à l’effort, sauf la défense, la sécurité, la santé et l’écologie. Une des missions qui voit ses crédits diminuer, c’est la mission Sport, jeunesse et vie associative. Cette baisse, conjuguée à la baisse des crédits alloués à la mission Aide publique au développement est un mauvais signal pour les associations françaises, qui sont déjà dans une mauvaise passe. En France, le 1,27 million d’associations sont financées de trois manières : par les subventions de l’Etat, des collectivités locales et par les dons, qui permettent de bénéficier de réduction d’impôts. L’inspection générale des finances chiffre à 53 milliards d’euros le financement public alloué aux associations en 2023. -17,6 % sur la mission Sport, jeunesse et vie associative La mission Sport, jeunesse et vie associative finance de très nombreux dispositifs : la politique en faveur du sport, des Jeux olympiques de 2030, de la politique en faveur de la jeunesse mais aussi de la vie associative. D’autres missions budgétaires participent à ce financement, comme l’Aide publique au développement. Or, ces deux missions voient leurs crédits diminuer dans le projet de budget pour 2026. Dans le tiré à part, le document qui liste les dépenses prévues pour chaque mission budgétaire, présenté le 15 juillet, les crédits de la première sont prévus à 1,2 milliard d’euros pour 2026, contre 1,5 milliard en 2025, soit une baisse de 300 millions d’euros. Pour l’APD, c’est une baisse de 700 millions d’euros. Pour Éric Jeansannetas, sénateur PS de la Creuse et rapporteur des crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative au Sénat, cette baisse est « extrêmement inquiétante ». « C’est une baisse de 300 millions d’euros sur un budget de 1 700 millions, la plus petite mission du budget. On la sacrifie, c’est elle qui perd le plus de crédits en proportion », juge-t-il. Cela inquiète les associations. « 300 millions d’euros, c’est -17,6 % », s’inquiète Pauline Hery, chargée de plaidoyer à France Générosités, « cela montre un recul du financement de la solidarité ». Mais à ce stade, il est difficile pour elle de savoir à quoi s’attendre, le budget n’en est qu’au début de son parcours. Elle n’est pas très optimiste : « On s’attend à des baisses, on sait qu’il y aura des efforts à faire partout ». Lors de son audition devant le Sénat le 16 juillet dernier, Amélie de Montchalin l’a pourtant sous-entendu : ces 300 millions d’euros de baisse ne toucheront pas directement les associations. « 100 millions concerneront l’unification des guichets d’aides aux collectivités territoriales en matière d’équipements sportifs », a-t-elle expliqué. Elle a également assuré que le Service national universel ne serait « pas pérennisé dans sa forme actuelle ». Une explication qui n’a pas convaincu Éric Jeansannetas. « L’année dernière, nous étions tous d’accord au Sénat pour maintenir les crédits de la mission, l’engagement associatif, ce n’est ni de droite ni de gauche », justifie-t-il. 6 % du financement des associations provient d’une niche fiscale Le point d’attention principal du secteur associatif se trouve sur la niche fiscale dont il bénéficie. Pour toutes les associations reconnues d’utilité publique en France, les dons ouvrent le droit à une réduction d’impôts de 66 % du montant donné, dans la limite de 20 % du revenu imposable. Une autre disposition existe pour les associations d’aide aux personnes en difficulté ou victimes de violences, la niche « Coluche » : la réduction d’impôt s’élève alors jusqu’à 75 % du montant, dans la limite de 1 000 €, après quoi le dispositif à 66 % s’applique. Ces deux dispositifs fiscaux représentent 6 % du financement des associations françaises. L’inspection générale des finances a publié, le 16 juillet dernier, un rapport de revue des dépenses publiques en direction des associations. Il pointe une forte augmentation de celles-ci, de 44 % entre 2019 et 2023. S’il reconnaît que « les associations du secteur social, […] paraissent fragilisées par l’inflation et l’augmentation de leur masse salariale », il propose néanmoins de faire un à trois milliards d’euros d’économies. Parmi les pistes de réforme, l’IGF émet l’idée de supprimer la niche « Coluche » et d’abaisser le plafond d’exonération d’impôt de 20 % du revenu à 2000€. Il propose aussi de réformer le crédit d’impôt mécénat, qui s’adresse aux entreprises, en passant d’un système de réduction d’impôt à un système de déduction (c’est l’assiette initiale qui est déduite du montant). Devant ce texte, les associations ont fait part de leur vive inquiétude. « Nous avons été particulièrement alertés par ce rapport. La mise en place des mesures concernant la niche fiscale et le mécénat d’entreprise engendreraient une diminution de 19 à 26 % de la générosité déclarée dans le pays », explique Pauline Hery. Devant l’inquiétude du secteur, François Bayrou a assuré que les dispositifs fiscaux n’étaient pas en danger. « Nous allons y rester attentifs », assure-t-elle. Plus de subventions des collectivités locales ? Autre source d’inquiétude pour les associations : les économies demandées aux collectivités locales, à hauteur de 5,3 milliards d’euros. Elles sont elles aussi pourvoyeuses de financement, et la contrainte sur leur budget risque également de diminuer les subventions. D’après le rapport de l’IGF, en 2023, 49 % des financements publics des associations provenaient des communes, départements et régions. Au sein des collectivités territoriales, ce sont les départements qui pèsent le plus dans les budgets des associations, car ils sont en charge de la politique sociale, et délèguent leurs missions à de nombreuses associations. « Les cinq milliards d’euros d’économies sur les collectivités locales vont mettre un frein aux subventions aux associations », prédit le sénateur socialiste, « les premières victimes de ces réductions budgétaires, ce sont les associations culturelles, sportives ». « Cela nous inquiète depuis l’année dernière », explique Pauline Hery. Les subventions des collectivités, fortement contraintes budgétairement depuis l’augmentation rapide de l’inflation, ont déjà été coupées dans certains cas. « Nous avons beaucoup d’exemples de collectivités qui ont drastiquement coupé les financements des associations dans le secteur de la culture, par exemple. Quand on demande de l’effort aux collectivités territoriales, les associations sont en première ligne sur ces coupes », raconte-t-elle. « Si les financements de la vie associative baissent, cela se répercutera sur les missions d’intérêt général qu’elles mènent » La morosité budgétaire ambiante inquiète. Les coupes budgétaires, combinées à l’année blanche annoncée par le Premier ministre font craindre une augmentation de la pauvreté et des besoins d’aide, par exemple alimentaire. « Si les financements de la vie associative baissent, cela se répercutera sur les missions d’intérêt général qu’elles mènent, et elles devront être remplies par l’Etat, ce qui coûtera plus cher et risque de détruire le tissu social », regrette Pauline Hery, « on a du mal à comprendre que les associations soient mises en première ligne des économies ». Éric Jeansannetas abonde : « Il y aura un retrait des collectivités territoriales des associations d’insertion sociale. Les politiques en direction des jeunes vont être sacrifiées dans ce budget qui va nous être présenté. Cela met en péril nos politiques publiques ». A l’heure où nous écrivons ces lignes, tout reste encore ouvert. La version finale du budget, s’il est voté en temps et en heure, a rarement été aussi imprévisible.

Le

PARIS, Conseil constitutionnel, Constitutional Council, Palais Royal
7min

Politique

Municipales : après le dépôt de plusieurs recours, l’avenir de la loi « Paris-Lyon-Marseille » entre les mains du Conseil constitutionnel

Adoptée le 10 juillet, la proposition de loi visant à « réformer le mode d’élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et de Marseille » doit désormais passer sous les fourches caudines du Conseil constitutionnel. Au moins deux recours ont été déposés sur ce texte, dont l’un porté par la droite sénatoriale. Passage en revue des points litigieux.

Le

Paris: Les Jeunes Republicains au Parc Floral de Paris avec Valerie Pecresse
11min

Politique

Entre House of Cards et Kill Bill : les dessous de la législative partielle qui pourrait opposer Rachida Dati à Michel Barnier à Paris

Rien ne va plus dans la 2e circonscription de Paris, où les prétendants de marque se bousculent pour la législative partielle prévue à la rentrée. L’ancien premier ministre LR, Michel Barnier, vise cette circonscription en or pour « revenir dans l’arène », tout comme la ministre de la Culture, Rachida Dati, qui pourrait en faire un « lancement de campagne » pour les municipales, sans oublier sa collègue du gouvernement, Clara Chappaz, pour Renaissance…

Le

Algérie : la droite salue la « fermeté » de Bruno Retailleau, les socialistes dénoncent une « diplomatie indexée sur la campagne des LR »
9min

Politique

Gel des pensions, abattement de 10 % : les LR font-ils leur mue sur la participation des retraités à l’effort budgétaire ?

Alors que François Bayrou veut mettre à contribution les retraités par le gel de leur pension et la limitation de l’abattement forfaitaire de 10 %, son allié LR critique cette double contribution, mais sans fermer la porte à un effort des retraités. Une évolution pour la droite, qui avait pour habitude de se montrer très sourcilleuse sur les inactifs, qui constituent une part essentielle de son électorat.

Le