C’est le grand jour pour la commission des finances du Sénat, qui cherche à faire la lumière sur le pilotage du Fonds Marianne. Lancé en octobre 2020, par Marlène Schiappa, alors ministre chargée de la Citoyenneté, ce fonds avait pour but de financer des projets visant à « promouvoir les valeurs républicaines ». Interloqués par les révélations de plusieurs enquêtes de presse sur le fonctionnement du fonds ces dernières semaines, les sénateurs se sont constitués le 10 mai en commission d’enquête, afin de comprendre comment ces dotations publiques ont été attribuées.
En vertu de ses pouvoirs d’investigation, le président (PS) de la commission des finances, Claude Raynal, a déjà pu obtenir fin avril des documents auprès de l’administration sur les subventions accordées et leur contrôle. La commission va désormais pouvoir approfondir ses recherches, en auditionnant sous serment plusieurs personnalités à partir de ce 16 mai. Ses travaux devraient durer un mois.
Le préfet Christian Gravel sera le premier à être entendu, à 14 h 30. Proche de Manuel Valls, il est le secrétaire général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR). C’est ce comité qui était chargé de sélectionner les associations soutenues financièrement par le Fonds Marianne. Les sénateurs vont notamment s’intéresser aux critères sur lesquels a reposé la sélection, dans le cadre d’un appel à projet. Selon Mediapart, trois collaborateurs de Marlène Schiappa ont participé à la sélection des candidatures.
Interrogations sur les critères de sélection des associations qui ont candidaté pour ce fonds
Deux structures ont bénéficié de l’essentiel des subventions : l’Union des sociétés d’éducation physique et de préparation militaire (USEPPM), dont les contenus publiés en ligne ont été peu suivis, ou encore « Reconstruire le commun », qui n’avait aucune activité connue au moment de sa candidature. Selon de nouvelles révélations de Mediapart publiées hier, ces deux candidatures reposaient sur des dossiers laconiques. « Insignifiants sur le fond comme sur la forme » affirment même les journalistes. La fiche de présentation de l’USEPPM reposerait sur un document A4 contenant en tout et pour tout sept pages seulement.
Sur la base d’un autre document établi par le comité de sélection, Mediapart s’interroge également sur une « politisation » du fonds Marianne. On apprend que l’association « Coexister » a suscité « a minima une certaine réserve ». Son « positionnement est explicitement en opposition avec la ligne gouvernementale » peut-on lire sur le document, détaille le média d’investigation.
Les interrogations des sénateurs auront une limite : elles ne devront pas empiéter sur les faits relevant de l’enquête judiciaire en cours. Le Parquet national financier a ouvert une information judiciaire portant sur des soupçons de « détournement de fonds publics par négligence », « abus de confiance » et « prise illégale d’intérêts ».