Mis en place le 24 mars dernier, le Comité analyse recherche et expertise (Care) présidé par Françoise Barré-Sinoussi assure le suivi des études thérapeutiques autorisées en France et les essais engagés sur les traitements à l’étranger. Il accompagne aussi la réflexion des autorités sur la doctrine des tests et sur la mise en place d’une stratégie numérique d’identification des personnes ayant été au contact de malades. Le Care a pour mission « d’éclairer les autorités sur les innovations thérapeutiques, scientifiques et technologiques », a expliqué sa présidente.
Analyse prospective
Depuis sa mise en place, le Comité analyse recherche et expertise (Care) a reçu « 162 fiches pour avis », des propositions de recherche sur le Covid-19 qui ne sont pas soumises à des appels à projet. Le Care a rédigé une douzaine de notes sur les tests, les traitements, les vaccins, ou encore sur l’amélioration de la structuration de la recherche. Devant les sénateurs, la virologiste a estimé qu’il était « possible qu’avec la sortie du confinement on s’oriente vers une analyse prospective sur le plus long terme ».
Coordonner la recherche
Interrogée par Catherine Deroche, sénatrice LR du Maine-et-Loire, sur la « dégradation de certaines études publiées sur le nouveau coronavirus », Françoise Barré-Sinoussi a rappelé que le Comité analyse recherche et expertise préconisait de « limiter le nombre d’études et de regrouper celles qui ont des protocoles d’essai thérapeutique similaires » afin de mieux coordonner la recherche sur le Covid 19.
Développer des tests fiables
Sur les tests, la Prix Nobel de médecine reste sceptique. Car à l’heure actuelle « nous ne savons pas quand une personne a des anticorps si elle est contagieuse ou pas, ou si ces anticorps sont protecteurs ». Françoise Barré-Sinoussi a souligné que les différents types de TROD, les tests rapides d’orientation diagnostique, ne sont pas encore validés. Les TROD qui détectent les antigènes « ne sont pas performants », et « il y a trop peu » de tests qui détectent le matériel génétique du virus. La présidente du Care insiste : « Il faut absolument accélérer la recherche sur le sujet ».
Oxford
Interrogée par le sénateur PS de l’Aisne Yves Daudigny, sur le vaccin développé par l’université d’Oxford, « qui semble avoir prouvé son efficacité sur l’animal », Françoise Barré-Sinoussi se veut prudente. Tout en rappelant qu’à Oxford les chercheurs ont utilisé un adénovirus impliqué dans des rhumes chez les primates, la Prix Nobel de médecine a souligné que ce vaccin avait été testé sur 6 animaux seulement pour le moment.
Moderna
Françoise Barré-Sinoussi a cité également le vaccin du laboratoire pharmaceutique américain Moderna développé aux États-Unis qui est en phase 1 depuis fin mars. La phase 1 permet de regarder la toxicité et l’immunogénécité d’un vaccin mais pas son efficacité. Il devrait être testé très prochainement sur l’être humain pour des premiers résultats en juillet. Enfin le vaccin basé sur celui de la rougeole, préparé par l’Institut Pasteur, doit démarrer très prochainement en phase 1 pour des résultats au cours du 1er semestre 2021. Actuellement en France, il y a 45 essais cliniques en cours incluant 2 000 patients.
Recherche fondamentale
Mais selon Françoise Barré-Sinoussi, « il ne faut pas oublier la recherche fondamentale ». « C’est une recherche un peu longue, il faut mettre en place une plateforme d’immunologie pour mieux comprendre les mécanismes de protection qu’un vaccin contre le Covid 19 doit induire ».
Associatifs
Enfin celle qui a beaucoup travaillé avec les associations de malades dans la recherche sur le VIH, « regrette énormément » que les associations ne soient pas plus impliquées dans la recherche sur le Covid 19. Françoise Barré-Sinoussi plaide pour qu’une personnalité de la société civile rejoigne le Comité qu’elle préside.
Confinement versus tests
Interrogée par René-Paul Savary, vice-président LR de la commission des affaires sociales, sur l’expérience à tirer de cette épidémie : « Si nous avions eu 700 000 tests à disposition au début de l’épidémie, le confinement aurait-il pu être évité ? » Françoise Barré-Sinoussi a avoué « ne pas être totalement convaincue qu’on aurait pu éviter le confinement de la population » citant l’Allemagne, qui, malgré une politique massive de tests a quand même dû recourir au confinement.