Fraude fiscale: le Sénat s’attaque au « verrou de Bercy »

Fraude fiscale: le Sénat s’attaque au « verrou de Bercy »

Le Sénat a entamé mardi l'examen du projet de loi sur la lutte contre la fraude sur lequel ont été déposés plusieurs amendements pour supprimer...
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Le Sénat a entamé mardi l'examen du projet de loi sur la lutte contre la fraude sur lequel ont été déposés plusieurs amendements pour supprimer le "verrou de Bercy", qui donne au fisc le monopole des poursuites pénales en cas de fraude.

Le Sénat a commencé l'examen du texte en première lecture avant l'Assemblée. Il doit l'achever mercredi.

Il ne comporte pas de disposition sur le "verrou de Bercy", mais pour le rapporteur de la commission des Finances, Albéric de Montgolfier, il donne l'occasion de le supprimer.

"La commission a complété le projet de loi par dix articles additionnels ambitieux", a déclaré M. de Montgolfier. "Elle a intégré deux volets absents du projet de loi: le fameux verrou de Bercy et la fraude à la TVA sur internet. Il s'agit là d'une fraude massive dans le commerce en ligne, y compris sur des sites reconnus".

La commission a décidé "de supprimer le verrou de Bercy et de le remplacer par un mécanisme qui réserve le cumul des sanctions administrative et pénale aux cas de fraudes les plus graves", a-t-il précisé. Celles-ci doivent respecter trois critères cumulatifs: l'application de pénalités d'au moins 80%, un montant supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d'État, enfin, soit une réitération des faits, soit des comportements aggravants.

Gérald Darmanin, ministre français des Comptes publics, a annoncé qu'il donnerait
Gérald Darmanin, ministre français des Comptes publics, a annoncé qu'il donnerait "un accord de principe" à la suppression du verrou de Bercy
AFP

"Pour la première fois, je donnerai non pas un avis favorable, mais un accord de principe" à cette suppression, a déclaré le ministre des comptes publics, Gérald Darmanin. "L'Assemblée nationale souhaitera sans doute améliorer l'écriture de cet article", a-t-il ajouté, estimant que "les clés du verrou se trouvent sans doute au Parlement" à qui il "reviendra d'établir des critères".

Mais pour Éric Bocquet (CRCE, à majorité communiste), "ce texte reste modeste, se contentant de mesures cosmétiques et souhaitant rendre acceptable le maintien du verrou de Bercy".

"Les dispositions qui organisent le verrou de Bercy ne sont pas supprimées", a estimé la socialiste Sophie Taillé-Polian, pour qui "l'aménagement proposé est largement insuffisant". "Il ne s'agit pas d'engorger les tribunaux, mais les critères proposés sont trop restreints et, de surcroît, cumulatifs", a-t-elle jugé.

"On a un texte +Canada Dry+", a lancé Nathalie Goulet (UC). "Ca ressemble à la suppression du verrou de Bercy mais ça ne supprime pas le verrou de Bercy".

M. Darmanin a annoncé qu'il proposerait "par exemple que le critère de réitération ne s'applique pas à une personne soumise à déclaration auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique", faisant ainsi allusion à l'affaire de son prédécesseur PS Jérôme Cahuzac.

Enfin, estimant le montant de la fraude fiscale "entre 20 milliards et 80 milliards d'euros par an", il a invité les sénateurs à une réunion en septembre à Bercy de tous les acteurs spécialistes de ce dossier pour élaborer une méthodologie de chiffrage acceptée par tous.

Les sénateurs ont par la suite confirmé la suppression d'un nouveau service d'enquête fiscale au sein du ministère du budget, proposé par le gouvernement. La rapporteure Nathalie Delattre (RDSE, à majorité radicale) a expliqué qu'il aurait été concurrent de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF), qui existe déjà à Bercy.

Ils ont aussi prévu de nouveaux droits d’accès à l’information pour les agents chargés de la lutte contre la fraude et précisé les modalités selon lesquelles les plateformes numériques transmettront à l’administration fiscale les informations utiles à la lutte contre la fraude aux prélèvements fiscaux.

Enfin, ils ont confirmé un aménagement de la commission, à savoir que l'administration ne rendrait publiques que les sanctions devenues définitives.

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