Fraude fiscale: le Sénat s’attaque au « verrou de Bercy »
Le Sénat a entamé mardi l'examen du projet de loi sur la lutte contre la fraude sur lequel ont été déposés plusieurs amendements pour supprimer...

Fraude fiscale: le Sénat s’attaque au « verrou de Bercy »

Le Sénat a entamé mardi l'examen du projet de loi sur la lutte contre la fraude sur lequel ont été déposés plusieurs amendements pour supprimer...
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Le Sénat a entamé mardi l'examen du projet de loi sur la lutte contre la fraude sur lequel ont été déposés plusieurs amendements pour supprimer le "verrou de Bercy", qui donne au fisc le monopole des poursuites pénales en cas de fraude.

Le Sénat a commencé l'examen du texte en première lecture avant l'Assemblée. Il doit l'achever mercredi.

Il ne comporte pas de disposition sur le "verrou de Bercy", mais pour le rapporteur de la commission des Finances, Albéric de Montgolfier, il donne l'occasion de le supprimer.

"La commission a complété le projet de loi par dix articles additionnels ambitieux", a déclaré M. de Montgolfier. "Elle a intégré deux volets absents du projet de loi: le fameux verrou de Bercy et la fraude à la TVA sur internet. Il s'agit là d'une fraude massive dans le commerce en ligne, y compris sur des sites reconnus".

La commission a décidé "de supprimer le verrou de Bercy et de le remplacer par un mécanisme qui réserve le cumul des sanctions administrative et pénale aux cas de fraudes les plus graves", a-t-il précisé. Celles-ci doivent respecter trois critères cumulatifs: l'application de pénalités d'au moins 80%, un montant supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d'État, enfin, soit une réitération des faits, soit des comportements aggravants.

Gérald Darmanin, ministre français des Comptes publics, a annoncé qu'il donnerait
Gérald Darmanin, ministre français des Comptes publics, a annoncé qu'il donnerait "un accord de principe" à la suppression du verrou de Bercy
AFP

"Pour la première fois, je donnerai non pas un avis favorable, mais un accord de principe" à cette suppression, a déclaré le ministre des comptes publics, Gérald Darmanin. "L'Assemblée nationale souhaitera sans doute améliorer l'écriture de cet article", a-t-il ajouté, estimant que "les clés du verrou se trouvent sans doute au Parlement" à qui il "reviendra d'établir des critères".

Mais pour Éric Bocquet (CRCE, à majorité communiste), "ce texte reste modeste, se contentant de mesures cosmétiques et souhaitant rendre acceptable le maintien du verrou de Bercy".

"Les dispositions qui organisent le verrou de Bercy ne sont pas supprimées", a estimé la socialiste Sophie Taillé-Polian, pour qui "l'aménagement proposé est largement insuffisant". "Il ne s'agit pas d'engorger les tribunaux, mais les critères proposés sont trop restreints et, de surcroît, cumulatifs", a-t-elle jugé.

"On a un texte +Canada Dry+", a lancé Nathalie Goulet (UC). "Ca ressemble à la suppression du verrou de Bercy mais ça ne supprime pas le verrou de Bercy".

M. Darmanin a annoncé qu'il proposerait "par exemple que le critère de réitération ne s'applique pas à une personne soumise à déclaration auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique", faisant ainsi allusion à l'affaire de son prédécesseur PS Jérôme Cahuzac.

Enfin, estimant le montant de la fraude fiscale "entre 20 milliards et 80 milliards d'euros par an", il a invité les sénateurs à une réunion en septembre à Bercy de tous les acteurs spécialistes de ce dossier pour élaborer une méthodologie de chiffrage acceptée par tous.

Les sénateurs ont par la suite confirmé la suppression d'un nouveau service d'enquête fiscale au sein du ministère du budget, proposé par le gouvernement. La rapporteure Nathalie Delattre (RDSE, à majorité radicale) a expliqué qu'il aurait été concurrent de la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF), qui existe déjà à Bercy.

Ils ont aussi prévu de nouveaux droits d’accès à l’information pour les agents chargés de la lutte contre la fraude et précisé les modalités selon lesquelles les plateformes numériques transmettront à l’administration fiscale les informations utiles à la lutte contre la fraude aux prélèvements fiscaux.

Enfin, ils ont confirmé un aménagement de la commission, à savoir que l'administration ne rendrait publiques que les sanctions devenues définitives.

Partager cet article

Dans la même thématique

Paris : session of questions to the government at the Senate
9min

Politique

Face à un « budget cryptosocialiste », la majorité sénatoriale veut « éradiquer tous les impôts » votés par les députés

Ils vont « nettoyer » le texte, le « décaper ». Les sénateurs de droite et du centre attendent de pied ferme le budget 2026 et le budget de la Sécu. Après avoir eu le sentiment d’être mis à l’écart des discussions, ils entendent prendre leur revanche, ou du moins défendre leur version du budget : plus d’économies et faire table rase des impôts votés par les députés.

Le

Marseille: Amine Kessaci candidate
4min

Politique

Assassinat du frère d’Amine Kessaci : le militant écologiste engagé contre le narcotrafic était « sous protection policière et exfiltré de Marseille depuis un mois »

Le petit frère d’Amine Kessaci, jeune militant écologiste marseillais, connu pour son combat contre le narcotrafic, a été tué par balles jeudi soir à Marseille. L’hypothèse d’un assassinat d’avertissement est privilégiée et pourrait faire basculer la France un peu plus vers ce qui définit les narco Etats. C’est ce que craignaient les sénateurs de la commission d’enquête sur le narcotrafic. Le sénateur écologiste de Marseille Guy Benarroche, proche d’Amine Kessaci a pu s’entretenir avec lui, ce matin.

Le

Fraude fiscale: le Sénat s’attaque au « verrou de Bercy »
2min

Politique

Assassinat du petit frère d’Amine Kessaci : revoir le documentaire sur le combat contre le narcotrafic du militant marseillais 

Mehdi, le petit frère d’Amine Kessaci, jeune militant écologiste marseillais, connu pour son combat contre le narcotrafic, a été tué par balles jeudi soir à Marseille. En 2020, c’est l’assassinat de son grand frère Brahim, qui avait conduit le jeune garçon à s’engager en politique. Son parcours est le sujet du documentaire « Marseille, des larmes au combat », Anaïs Merad, à revoir sur Public Sénat.

Le

Fraude fiscale: le Sénat s’attaque au « verrou de Bercy »
3min

Politique

Projet de loi anti-fraudes : « C’est un objet politique qui vise essentiellement à montrer du doigt la fraude sociale »

Invités sur le plateau de Parlement Hebdo, le sénateur Bernard Jomier (Place Publique) et le député Sylvain Berrios (Horizons) sont revenus sur le projet de loi pour lutter contre les fraudes fiscales et sociales, examiné par la Chambre haute depuis mercredi. La majorité rassemblant les élus de la droite et du centre au Sénat ont affermi le texte en commission, y ajoutant une batterie de mesures qui ne fait pas consensus.

Le