Gaspillage: le gouvernement déclare la guerre aux destructions d’invendus

Gaspillage: le gouvernement déclare la guerre aux destructions d’invendus

Plus de 650 millions d'euros de produits neufs et non périssables jetés ou détruits chaque année en France: face à ce "gaspillage...
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Par Marc PRÉEL

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Plus de 650 millions d'euros de produits neufs et non périssables jetés ou détruits chaque année en France: face à ce "gaspillage scandaleux", l'exécutif a annoncé mardi la prochaine interdiction de la destruction des invendus non alimentaires, au moment où il cherche à muscler sa politique écologique.

Cette mesure, présentée comme une "première mondiale" par le Premier ministre Edouard Philippe, impose aux enseignes de donner ces produits, par exemple à des associations, ou de les faire recycler pour réutiliser les matières.

Selon Matignon, elle s'appliquera à partir de fin 2021 ou de fin 2023 suivant les filières, en complément aux mesures déjà adoptées ces dernières années contre le gaspillage alimentaire.

Vêtements, produits d'hygiène ou de beauté, équipements électroménagers ou électroniques... La destruction de produits est répandue tant parmi les grands distributeurs que les marques de luxe qui y voient une façon de protéger la propriété intellectuelle et d'empêcher la contrefaçon.

Delphine Sarfati-Sobreira, directrice générale de l'Union des fabricants pour la protection internationale de la propriété intellectuelle (Unifab), a réagi aux annonces en disant sa crainte que "les contrefacteurs aient un argument supplémentaire" pour faire croire aux consommateurs que leurs produits sont authentiques tout en étant à prix bradés.

Mais la pratique, épinglée par de nombreuses enquêtes journalistiques et des ONG environnementales, est devenue un des emblèmes du gaspillage moderne. La destruction d'invendus non alimentaires (environ 660 millions d'euros chaque année, selon Matignon) est ainsi cinq fois plus répandue que leur don.

La mesure d'interdiction de l'élimination des "invendus neufs ou en général", a précisé M. Philippe, figurera dans le projet de loi sur l'économie circulaire préparé depuis plusieurs mois par la secrétaire d'Etat Brune Poirson, qui doit arriver en Conseil des ministres en juillet.

Indice de réparabilité des produits, nouvelles filières de responsabilité élargie des producteurs (jouets, articles de sport, bricolage et jardin, cigarettes...), modulation renforcée des éco-contributions jusqu'à 20% du prix des produits pour renforcer l'écoconception des produits, mise en place facilitée de systèmes de consigne: le texte prévoit plusieurs autres mesures écologiques. Mais son calendrier parlementaire, et donc sa date d'adoption, ne sont pas encore connus.

- Une loi, mais pour quand? -

L'exécutif veut "faire en sorte que nous passions à une nouvelle étape de notre modèle économique pour économiser les matières", a affirmé M. Philippe au côté de sa secrétaire d'Etat.

"C'est très ambitieux mais on se demande commet ça va se passer", a réagi auprès de l'AFP Eleonore Kubik, chargée de mission à France Nature Environnement.

"Cette loi va dans le bon sens pour que l'ensemble de la filière se mette à ces pratiques, mais elles sont déjà très répandues", estime Yohann Petiot, le directeur général de l'Alliance du Commerce, qui regroupe 26.000 commerçants, et qui renvoie la balle aux consommateurs: selon lui, "le client doit se mobiliser pour trier ses placards et déposer ses vêtements dans les points de collecte au lieu de les jeter: on ne collecte que 36% des vêtements mis sur le marché".

La mesure annoncée mardi vient compléter une offensive contre le gaspillage alimentaire, initiée lors du quinquennat Hollande. Une loi de 2016 interdit ainsi aux grandes surfaces de plus de 400 m2 de jeter de la nourriture et de rendre leurs invendus impropres à la consommation. Elle oblige les distributeurs à passer des conventions pour les dons réalisés aux associations caritatives.

Le gouvernement vient d'étendre cette obligation de don aux collectivités et à la restauration dans la récente loi Alimentation.

Si la crise des "gilets jaunes" a montré le caractère explosif de certaines mesures écologiques, comme la taxe carbone, le gouvernement essaie ces dernières semaines de convaincre de la sincérité de sa politique environnementale, au bilan jugé mitigé.

Alors qu'elle a choisi l'écologie comme thème numéro un de sa campagne aux européennes, la majorité n'a pas pu empêcher une percée du vote Europe Ecologie-Les Verts (13,5%) lors du scrutin du 26 mai. Un score réalisé sur fond de prise de conscience croissante des effets alarmants du réchauffement climatique et de la progression rapide de la concentration de CO2 dans l'atmosphère.

Aux européennes, les électeurs ayant voté Macron au 1er tour de la présidentielle ont pour 20% d'entre eux donné leur voix à EELV.

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