“Gaz hilarant”: les sénateurs veulent interdire la vente aux mineurs

“Gaz hilarant”: les sénateurs veulent interdire la vente aux mineurs

Le Sénat examine mercredi en première lecture une proposition de loi transpartisane visant à interdire la vente aux mineurs du...
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Par Véronique MARTINACHE

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Le Sénat examine mercredi en première lecture une proposition de loi transpartisane visant à interdire la vente aux mineurs du protoxyde d'azote, un gaz utilisé dans les siphons de cuisine, détourné de son usage pour des effets euphorisants.

Pour la centaine de sénateurs signataires, au premier rang desquels des élus du Nord, département particulièrement touché par le phénomène, ce texte sonne comme un cri d'alerte.

"Nous sommes au début d'un phénomène qui risque de se répandre", craint la sénatrice centriste du Nord Valérie Létard, auteure de la proposition de loi.

Très facilement accessible dans le commerce, le protoxyde d'azote, ou encore "proto" ou "gaz hilarant", se vend sous forme de cartouches destinées notamment aux siphons à chantilly.

Dans son usage détourné, le gaz que contiennent les cartouches est déversé dans un ballon de baudruche puis inhalé. Quelques inhalations provoquent une euphorie comparable à une ivresse, accompagnée d'un fou rire irrépressible. L'effet est quasiment instantané, mais bref, d'où la tentation de répéter l'expérience.

"Ce gaz n'est pas identifié comme un produit dangereux", souligne Mme Létard.

Pourtant, il y a une quinzaine de jours, les autorités sanitaires françaises se sont alarmées d'une "augmentation des cas de troubles neurologiques graves" liés à un usage "récréatif" du gaz hilarant.

Depuis le début de l'année, "25 signalements d'effets sanitaires sévères" ont été enregistrés, dont 10 cas "graves avec des séquelles pour certains", comme des paralysies des membres à des degrés divers. Huit de ces cas graves ont été recensés dans les Hauts-de-France.

En Grande-Bretagne, où le phénomène est plus ancien, "plus de 30 morts ont été enregistrés depuis 2001", souligne Mme Létard.

- "Porte d'entrée " -

La mesure phare de la proposition de loi est l'interdiction de la vente aux mineurs, y compris sur les sites de commerce en ligne. Les industriels auraient en outre l'obligation d'indiquer sur l'emballage la dangerosité du produit.

Le texte adopté en commission propose aussi de pénaliser l’incitation d’un mineur à faire un usage détourné d’un produit de consommation courante pour en obtenir des effets psychoactifs. Il prévoit encore d'accompagner la politique de prévention menée à l’école.

Pour la rapporteure Jocelyne Guidez (centriste), "il ne s’agit pas d’empêcher quiconque de détourner des produits de consommation courante de leur usage ordinaire", car de telles pratiques existeront toujours, "il s’agit plutôt de limiter, autant que possible, le premier contact des plus jeunes avec ce produit, qui peut avoir des effets graves sur leur santé".

Parmi les risques immédiats encourus, les autorités sanitaires citent les brûlures par le froid à l'expulsion du gaz, pertes de connaissance, asphyxie par manque d'oxygène... Une utilisation régulière ou à forte dose peut entraîner "atteinte de la moelle épinière, carence en vitamine B12, anémie, troubles psychiques".

L'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) a identifié une utilisation festive, notamment dans les "soirées étudiantes". Mais les élus pointent aussi une consommation chez les jeunes ados, lycéens voire collégiens. D'où la crainte que le gaz hilarant soit "une porte d'entrée dans les consommations addictives".

Pour le président de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildeca), Nicolas Prisse, "il est urgent de débanaliser cet usage qui, depuis deux ans, touche de plus en plus de jeunes qui n'ont pas conscience des risques encourus".

Mme Létard avait déjà interpellé la ministre de la Santé Agnès Buzyn sur ce sujet, en février dernier, lors d'une séance de questions au gouvernement.

Le secrétaire d'Etat Adrien Taquet avait alors déclaré que l'interdiction de vente aux mineurs paraissait "assez peu efficace".

"En définitive, la meilleure chose à faire est probablement de mieux communiquer sur les usages et les pratiques à risques auprès des jeunes", avait-il estimé.

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