C’est un coup de gueule qui résume bien la situation à gauche. Lors d’une réunion publique face à des représentants d'associations citoyennes, Alexis Corbière, porte-parole de Jean-Luc Mélenchon, a remis les pendules à l’heure, face à l’éternel débat sur une candidature unique à gauche. « J'ai de la mémoire », lâche-t-il avec colère. « Je ne veux pas me faire donner la leçon par toutes ces forces politiques qui ont participé à ce désastre ». Sous entendu, le dernier quinquennat. Un peu plus tard, Jean-Luc Mélenchon tenait un discours similaire, en meeting au Havre : « J'ai marché mon chemin, sans ne céder à rien, je ne vais pas commencer aujourd'hui! A faire le contraire ou à m'engager dans je ne sais quel arrangement qu'on me suggère de faire. »
Car entre la France insoumise et le Parti socialiste, la rupture semble définitivement consommée, malgré une nouvelle main tendue de Benoît Hamon pour le rejoindre. « Ce n’est pas une main tendue. Benoît Hamon propose qu’on le rejoigne sur un navire bien mal en point qui est celui du parti socialiste » raille Eric Coquerel, Coordinateur politique du parti de gauche. « Au PS, Il y a beaucoup de gens avec qui nous n’avons rien à faire. Le parti socialiste, c’est lui le problème. »
"Hamon propose qu’on le rejoigne sur un navire bien mal en point qui est celui du PS" raille Eric Coquerel
Il faut dire que Jean-Luc Mélenchon est désormais en position de force. Un débat réussi a lancé sa campagne et le met désormais devant son « rival » socialiste dans tous les sondages. « Nous pouvons rattraper François Fillon » assure Eric Coquerel. Symboliquement, ce serait une victoire mais une troisième place ne fait pas un président de la République. D’autant plus que Jean-Luc Mélenchon suit le même parcours qu’en 2012. « On avait observé le même pic et le résultat s’est finalement avéré un peu décevant » note le sénateur communiste Eric Bocquet.
Entre la France insoumise et le Parti socialiste, les communistes, tiraillés, jouent les casques bleus. Le secrétaire national du Parti communiste français, Pierre Laurent a ainsi proposé une nouvelle rencontre qui n’aura finalement pas lieu. « Nous avons essayé, pendant plus d’un an, de créer les conditions d’un rassemblement des forces de gauche, opposées aux politiques d’austérité » souligne ainsi la sénatrice Eliane Assassi, au micro de Public Sénat.
Alliance Hamon/ Mélenchon : "c'est trop tard" juge Eliane Assassi
Sans réussite. Les deux parties se tournent le dos. « Faire du rabibochage de façade, ça ne tient pas la route » admet Eric Bocquet. « Mais ce que je regrette, c’est le refus systématique de parler. » Il faut dire que les tensions sont palpables entre la gauche socialiste et celle qui s’est émancipée du parti, en 2005, après le référendum sur l’Europe qui a divisé le PS. « Les gens ont un passé, une histoire, ça laisse des traces » rappelle le sénateur, évoquant « beaucoup de rancœurs, de déceptions. » Malgré des idées convergentes, les deux gauches semblent irréconciliables.
Alors, fort de sa dynamique, Jean-Luc Mélenchon peut toujours tenter de convaincre Benoît Hamon de le rejoindre dans la dernière ligne droite. « Je ne vois pas ce qu’il a à perdre » poursuit Eric Bocquet. « Mais ce n’est pas non plus l’humiliation qu’il faut demander. » La frontière est mince car cela signifierait que le candidat socialiste soit officiellement crédité de 0% au terme du premier tour.
Si l’alliance est compromise pour l’élection présidentielle, peut-elle avoir lieu pour les législatives ? « Pourquoi pas » relance Eric Bocquet qui ne se fait pas, pour autant, de grandes illusions. Et de citer l’ancien député communiste Etienne Fajon : « L’union est un combat. »