Handicap : le Sénat modifie le texte du gouvernement

Handicap : le Sénat modifie le texte du gouvernement

La majorité sénatoriale a porté à 250 salariés, au lieu de 20, le seuil des entreprises devant obligatoirement embaucher 6% de travailleurs handicapés. Mais elle a dans le même temps rétabli des incitations faites aux employeurs, que le gouvernement veut supprimer.
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Dans le projet de loi avenir professionnel, qui touche autant à l’apprentissage qu’à l’assurance chômage, les sénateurs ont adopté les articles portant sur le travail des personnes en situation de handicap, non sans les modifier.

Sur ce dossier, les choses bougent. Jeudi, les représentants des entreprises adaptées, destinées aux travailleurs handicapés, ont signé avec l'État un « engagement mutuel » dont la principale ambition est de doubler les embauches dans ce secteur d'ici 2022 grâce à des financements publics supplémentaires. L'objectif est de « permettre à 40.000 personnes handicapées supplémentaires d'avoir accès à un emploi d'ici à 2022 », a expliqué la ministre du Travail Muriel Pénicaud.

Dans son projet de loi, le gouvernement prévoit de réaffirmer le maintien d’une obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les employeurs, avec un taux de 6 %, et introduit une clause de revoyure tous les cinq ans.

Taux de chômage de 19% pour les personnes handicapées

« 2,7 millions de personnes en âge de travailler sont en situation de handicap. Mais 30 ans après la mise en œuvre de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, le taux d’emploi direct dans les entreprises du secteur privé est de 3,4% pour un objectif de 6%. Il atteint 5,2% dans la fonction publique. Le taux de chômage des travailleurs handicapés reste trop élevé, avec un taux de 19% », contre 9 % pour l’ensemble de la population, rappelle la sénatrice LREM Patricia Schillinger (voir la vidéo).

Mais la sénatrice du Haut-Rhin dénonce une modification apportée par la majorité LR-UDI en commission sur l’obligation d’emploi de 6%. « Elle la limite de facto aux entreprises de plus de 250 salariés (contre 20 actuellement, ndlr). Le rapporteur dira qu’il s’agit de protéger les TPE et PME » a pointé Patricia Schillinger, pour qui « ce n’est pas acceptable ». L’amendement des sénateurs vise précisément les entreprises multi-établissements.

La majorité sénatoriale a en revanche rétabli en commission les incitations faites aux employeurs privés d'embaucher des travailleurs handicapés dont le handicap est particulièrement lourd, en situation de chômage de longue durée ou qui viennent d'une entreprise adaptée. Le gouvernement avait introduit dans son projet de loi une disposition visant à supprimer ces incitations.

« Sommes-nous vraiment face à une vraie réforme ou face à un coup de communication ? »

Derrière l’ambition affichée par le gouvernement, la sénatrice PS, Nadine Grelet-Certenais, se demande quelle est la réalité des faits. « Sommes-nous vraiment face à une vraie réforme ou face à un coup de communication ? Car de nombreuses mesures proposées ressemblent à l’état du droit actuel et s’apparente à des allégements pour les entreprises, notamment concernant l’acquittement de l’obligation d’emploi » a souligné la sénatrice de la Sarthe. Nadine Grelet-Certenais ajoute : « Hier, une convention très engageante a été signée pour doubler le nombre de créations d’emplois dans le secteur adapté. Mais en même temps, le gouvernement réduit drastiquement la prime d’activité pour les salariés percevant une pension d’invalidité, (…) une mesure d’économie de 20 millions d’euros qui plombe des familles monoparentales dans la misère ».

La sénatrice PCF, Cathy Apourceau-Poly, a elle dénoncé dans un amendement la volonté du gouvernement d’inclure dans son texte « les salariés liés par un contrat temporaire (stage, interim) aux effectifs permettant le calcul des 6 % ». On le voit, si tout le monde s’accorde pour faire de l’aide aux handicapés une priorité, les solutions proposées ne font pas l’unanimité.

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