Henri Emmanuelli, la gauche au coeur
Premier secrétaire, président de l'Assemblée nationale, plusieurs fois ministre, Henri Emmanuelli, décédé mardi à l'âge de 71 ans des suites d...

Henri Emmanuelli, la gauche au coeur

Premier secrétaire, président de l'Assemblée nationale, plusieurs fois ministre, Henri Emmanuelli, décédé mardi à l'âge de 71 ans des suites d...
Public Sénat

Par Jordane BERTRAND

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Premier secrétaire, président de l'Assemblée nationale, plusieurs fois ministre, Henri Emmanuelli, décédé mardi à l'âge de 71 ans des suites d'une longue maladie, fut un poids lourd du Parti socialiste, forte personnalité qui n'a jamais renié ses convictions à l'aile gauche du PS.

Président de l'Assemblée nationale (1992-1993), Premier secrétaire du PS (1994-1995), deux fois au gouvernement -- secrétaire d'Etat chargé des DOM-TOM de 1981 à 1983, puis chargé du Budget de 1983 à 1986 --, ce Corse d'origine et Béarnais de naissance était né le 31 mai 1945 aux Eaux-Bonnes (Pyrénées-Atlantiques).

Issu d'un milieu populaire, diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, il entre à la Compagnie financière de Banque (CFB) d'Edmond de Rothschild en 1969. En 1972, il adhère au PS, dirigé depuis 1971 par François Mitterrand. Elu député des Landes en 1978, il devient président du Conseil général en 1982.

Epais sourcils et voix profonde, Henri Emmanuelli fut un mitterrandiste historique. Pourfendeur des "dérives social-libérales" de la social-démocratie européenne et au sein même du PS, il n'a jamais varié dans son parcours politique.

Henri Emmanuelli et  Lionel Jospin aux Universités d'été des jeunes pour le socialisme,  le 30 août 1991 à  St-Lary
Henri Emmanuelli et Lionel Jospin aux Universités d'été des jeunes pour le socialisme, le 30 août 1991 à St-Lary
AFP/Archives

En 1995, il est l'âme d'un pôle d'opposition au "social-libéralisme" au sein du PS dont il était alors Premier secrétaire. Pour la présidentielle en 1995, il se porte candidat à la candidature, mais Lionel Jospin l'emporte largement dans le vote militant.

Deux ans plus tard, Henri Emmanuelli voit sa carrière brutalement mise entre parenthèses par sa condamnation dans l'affaire URBA de financement illégal du PS, en tant que trésorier du parti (1988-1993), condamnation à dix-huit mois de prison avec sursis et deux ans de privation de ses droits civiques.

Ce purgatoire achevé, il retrouve tous ses mandats dans les Landes, dont il redevient député et président du Conseil général. Il sera réélu à ces deux postes sans discontinuer.

- Caractère entier -

Jean-Luc Mélenchon et Henri Emmanuelli le 10 mai 2015 à Paris
Jean-Luc Mélenchon et Henri Emmanuelli le 10 mai 2015 à Paris
AFP

Plaidant sans relâche pour un PS clairement ancré à gauche, il devient compagnon de route de Jean-Luc Mélenchon, encore membre du PS, au sein du courant Nouveau Monde après l'échec de la gauche à la présidentielle de 2002. Il fait ensuite équipe avec Arnaud Montebourg, Vincent Peillon, et Benoît Hamon au sein du Nouveau Parti socialiste (NPS).

En 2005, il se fait l'avocat du non au Traité constitutionnel européen, contre l'avis de la majorité des militants. S'il s'affirme européen, il précise: "Cela ne veut pas dire qu'on accepte n'importe quelle Europe".

Pendant le quinquennat de François Hollande, il dénonce l'état de son parti, tombé, selon lui, "dans un coma profond" et qui "n'existe plus, ni à l'attaque ni en défense". En 2014, il s'abstient lors du vote de confiance au Premier ministre, Manuel Valls.

Henri Emmanuelli et Benoît Hamon le 29 août 2014 à La Rochelle
Henri Emmanuelli et Benoît Hamon le 29 août 2014 à La Rochelle
AFP/Archives

En janvier, il avait apporté son soutien à Benoît Hamon dans la primaire du PS, tout en émettant des réserves sur son projet de revenu universel.

Ses proches soulignent sa "sensibilité profonde", ses indignations "vraies" devant l'injustice et son caractère entier. "Il n'est pas cynique pour un sou et, quand il sort de ses gonds, il ne fait pas semblant", disait-on de lui dans son entourage.

Ombrageux, cassant, connu pour ses accès de mauvaise humeur, mais aussi son sens de l'humour, cet homme à la haute stature, affaibli par une neuropathie détectée en 2006, il ne se déplaçait ces derniers temps qu'en fauteuil roulant.

Il fut aussi un spécialiste des questions financières. Membre de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, dont il fut président à trois reprises, ce banquier de profession présida aussi activement la commission de surveillance de la Caisse des Dépôts (CDC), défendant une plus grande indépendance de l'organisme vis-à-vis de l'Etat.

A la tête de son fief des Landes, où il fut réélu dès le premier tour en 2015 comme conseiller départemental, il batailla avec succès pour la réintégration des régies des eaux dans le secteur public.

Il est aussi un des premiers à introduire l'informatique à l'école dans les années 1980, il mène plusieurs actions pour le "bien vieillir", rend les transports des collégiens gratuits. Il met en oeuvre le projet de "Village Alzheimer", premier du genre en France, pour maintenir au maximum les malades dans une vie sociale ordinaire.

Marié à une ancienne professeure de gymnastique, Henri Emmanuelli était père de deux enfants.

Partager cet article

Dans la même thématique

Henri Emmanuelli, la gauche au coeur
3min

Politique

« L’humour est de gauche » selon l’humoriste belge Alex Vizorek

C’est l'un des Belges les plus connus de la scène humoristique francophone. Passé par France Inter, il officie désormais à RTL. Comment un humoriste est-il passé d’un public à l’autre ? Comment faire indifféremment rire un public de droite et de gauche ? Cette semaine, Alex Vizorek est l’invité de Rebecca Fitoussi dans l’émission Un monde, un regard.

Le

Henri Emmanuelli, la gauche au coeur
3min

Politique

Parlement européen : « la droite traditionnelle pro-européenne joue avec l’extrême droite » pour Javier Moreno Sanchez   

« Un discours ferme et rassembleur ». Pour la députée centriste du groupe Renew, Fabienne Keller, les propos tenus par Ursula von der Leyen sont « absolument essentiels en ce moment historique où nous sommes en tension maximum avec Vladimir Poutine ». La présidente de l’exécutif européen a en effet annoncé une esquisse de nouvelles sanctions contre la Russie. Dans ce contexte, l’eurodéputée française estime que « la défense que l’on n’a pas voulue dans les années 50, s’impose à nous » désormais.   « C’est un peu tard mais elle commence à réagir »   Concernant le conflit israélo-palestinien, l’eurodéputé espagnol Javier Moreno Sanchez espère que qu’Ursula von der Leyen ira plus loin dans la condamnation des actes commis par l’Etat hébreu. « Ce que nous lui demandons, c’est qu’elle agisse avec la même fermeté dans les deux guerres qu’on a à nos portes ». A la surprise générale, la présidente de la Commission a annoncé vouloir suspendre une partie de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, mais pour le social-démocrate, c’est l’ensemble de ce texte qui doit remis en cause.     Mais pour l’eurodéputé espagnol, l’urgence est de ne pas revenir sur les grands textes des précédentes mandatures de la Commission. Qu’il s’agisse du pacte migratoire ou des mesures écologiques, « il ne faut pas qu’Ursula von der Leyen démonte les propositions qu’elle a faites (…) on ne savait pas que la droite traditionnelle pro-européenne allait jouer avec l’extrême droite ».  « Ce n’est pas une Europe sociale, mais une Europe militariste »   Le groupe des Conservateurs et réformistes est nettement plus critique vis-à-vis du grand oral de la présidente de la commission. L’élu roumain Gheorghe Piperea souhaite la démission de la commissaire allemande. En juillet, il faisait déjà partie de ceux qui avait voté une motion de censure à l’encontre de cette dernière. Pour cet eurodéputé conservateur l’Union européenne nourrirait le conflit ukrainien en multipliant ses aides, notamment militaires. Ce député a par ailleurs dénoncé l’accord commercial conclu « sur un terrain de golf en Ecosse » entre Ursula von der Leyen et Donald Trump, le qualifiant « d’échec ».    Retrouver l’intégralité de l’émission en intégralité ici  

Le

Avis d’arret de travail Illustration
9min

Politique

Report de congés pour cause d’arrêt maladie : la délégation aux entreprises du Sénat saisit Sébastien Lecornu face à une décision « terrible » pour les PME

« Je saisis par courrier le premier ministre pour qu’une action au sommet de l’Etat soit engagée dans les plus brefs délais auprès des instances européennes », annonce à publicsenat.fr le président de la délégation aux entreprises du Sénat, le sénateur LR Olivier Rietmann, alors qu’un salarié malade pendant ses vacances pourra reporter ses congés, selon une décision de la Cour de cassation.

Le