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Invitée de la matinale de Public Sénat, la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, évoque le blocage de certains sites pornographiques pour protester contre l’obligation de vérification de l’âge des utilisateurs.
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Par Marius Texier
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Et si le sujet de la proportionnelle venait briser ce qu’il reste du « socle commun » ? Ce lundi, le Premier ministre a échangé avec les cadres des Républicains (LR) dont le président du groupe à l’Assemblée nationale Laurent Wauquiez, et Mathieu Darnaud, président du groupe au Sénat. Bruno Retailleau a lui été convié non pas en tant que ministre de l’Intérieur, bien qu’il ait la charge de la tenue des élections, mais en tant que président du parti Les Républicains.
Le ministre de l’Intérieur n’a pas changé de position après son entretien avec le Premier ministre. Il refuse toujours de « porter » une telle réforme du mode du scrutin pour les législatives laissant planer le doute sur une éventuelle démission. « Toutes les options sont ouvertes », a-t-il déclaré.
Déjà mercredi dernier, le bureau politique des Républicains avait réaffirmé sa « ferme opposition à l’introduction de la proportionnelle ». Dans un communiqué, le bureau composé notamment de Bruno Retailleau, Laurent Wauquiez et Gérard Larcher, a pointé le risque d’instabilité gouvernementale de ce type de scrutin, saluant leur héritage « gaulliste » et le risque d’un « retour du régime des partis ». Ils ont également annoncé se lancer « de toutes leurs forces dans cette bataille contre la proportionnelle ».
Dans un entretien accordé hier à La Tribune, le président du groupe Les Républicains au Sénat, Mathieu Darnaud, a qualifié la proportionnelle de « poison pour la démocratie » générant de « l’instabilité gouvernementale » et un « régime des partis politiques ». Le 30 avril dernier, à l’occasion des questions d’actualité au gouvernement au Sénat, Mathieu Darnaud avait interpellé le Premier ministre, pointant le « risque d’instabilité gouvernementale ». François Bayrou lui avait alors rétorqué que « 75 % des sénateurs sont élus à la proportionnelle » sans que cela ait « provoqué de l’instabilité ».
Le message est donc clair pour le Premier ministre : Les Républicains vont tout faire pour empêcher son projet de voir le jour. D’autant qu’une proposition de loi a été déposée le 28 mai dernier à l’Assemblée nationale par le député Les Républicains, Alexandre Portier. L’objectif ? « Inscrire dans la Constitution le mode de scrutin uninominal majoritaire à deux tours pour les élections législatives et contre la proportionnelle ». Le texte est soutenu par plusieurs cosignataires dont Laurent Wauquiez.
Avec ce texte, certains proches de Bruno Retailleau, contactés par BFMTV, reprochent à Laurent Wauquiez de vouloir tendre un piège au ministre de l’Intérieur en le mettant dans une situation inconfortable. Ils l’accusent de vouloir mettre en jeu la participation du parti Les Républicains au sein du gouvernement si François Bayrou persiste sur la proportionnelle. Cela impose donc à Bruno Retailleau de tenir une position claire sur le sujet, ce qui risque de compromettre sa place au ministère de l’Intérieur.
En plus de cela, même au sein de son propre camp, le Premier ministre se trouve esseulé. Mis à part le Modem qui est favorable de longue date au projet, la majorité présidentielle demeure réticente à la proportionnelle. Le parti Horizon d’Edouard Philippe y est opposé et le groupe Ensemble pour la République (EPR) ne se montre pas très enthousiaste malgré les promesses électorales d’Emmanuel Macron en 2017 et en 2022 d’introduire une dose de proportionnelle.
Mais du côté des oppositions, la proposition est la bienvenue. Lors du lancement des consultations, le 30 avril dernier, le président du groupe socialiste au Sénat, Patrick Kanner affirmait au micro de Public Sénat se montrer « favorable » tout comme son groupe au « principe de la proportionnelle » tout en réclamant plus de précisions de la part du Premier ministre.
Invité de la matinale de Public Sénat le 28 avril, le coordinateur national de LFI, Manuel Bompard, s’était également montré « favorable à un mode de scrutin vraiment proportionnel » sans scrutin avec une prime majoritaire de 50 %.
Après sa consultation avec François Bayrou le 30 avril, Marine Le Pen s’était aussi montrée satisfaite des discussions soulignant que la « proportionnelle de 86, c’est-à-dire la proportionnelle intégrale par département » lui paraissait « être un moindre mal par rapport à un système majoritaire ». « C’est sur ce mode de scrutin de 1986 que l’Assemblée sera saisie. Si c’est sur celui-là que l’on retombe, le Rassemblement national le défendra », avait-elle ajouté.
Pour venir conclure ses consultations, François Bayrou doit prochainement recevoir le groupe Les Écologistes qui, à l’image des oppositions, devrait se montrer plutôt favorable à l’introduction d’une dose de proportionnelle. Le 30 janvier dernier, le Sénat a adopté par 162 voix contre 152 une résolution de la sénatrice écologiste Mélanie Vogel appelant à l’introduction de la proportionnelle pour les élections législatives. Le 10 juillet 2024, la même sénatrice avait déposé une proposition de loi pour introduire le scrutin proportionnel.
Le Premier ministre peut également se satisfaire de l’adhésion des Français au scrutin proportionnel. D’après le dernier baromètre Odoxa réalisé avec Mascaret pour Public Sénat, 75 % des Français se déclarent favorables à une mise en place du mode de scrutin proportionnel sans pour autant distinguer les différentes modalités de proportionnelles. Invité de BFMTV, mardi dernier, François Bayrou a assuré qu’il « proposerait à l’Assemblée nationale, qui est souveraine, qu’elle examine cette question qui traîne depuis des décennies ».
Un texte pourrait être présenté d’ici l’automne, un peu avant les discussions sur le budget. Il devrait prendre la forme du mode de scrutin utilisé pour les législatives de 1986 soit une proportionnelle intégrale par département, sans prime majoritaire. Le même type de scrutin qui avait permis à François Bayrou d’être élu pour la première fois député en 1986. Cela explique peut-être sa détermination.
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