Nicolas Hulot, le ministre de la Transition écologique, présente jeudi un "plan climat" qui doit dessiner la stratégie de la France pour limiter ses émissions de gaz à effet de serre et traduire en actes la volonté d'Emmanuel Macron de défendre l'accord de Paris.
Mardi, le Premier ministre Edouard Philippe a déjà annoncé ou confirmé des engagements du candidat Macron: fin des nouveaux permis d'exploitation d'hydrocarbures, convergence de la fiscalité essence et diesel avant 2022, montée en puissance de la fiscalité sur les émissions de CO2 ("compensation carbone") et division par deux des déchets mis en décharge d'ici à 2025.
Le Premier ministre a aussi fixé l'horizon 2050 pour arriver à une "neutralité carbone", c'est-à-dire pour que le niveau des émissions de gaz à effet de serre ne soit pas plus élevé que les émissions capturées (par les forêts ou d'autres procédés de captage à définir).
Ce nouvel objectif constitue un rehaussement de l'ambition qui jusqu'ici était de diviser par quatre les émissions françaises entre 1990 et 2050, avec une baisse de 40% en 2030.
"C'est la première fois que la France s'engage aussi clairement sur un objectif de neutralité carbone en 2050", a relevé le WWF France.
Le "plan climat" dévoilé jeudi par Nicolas Hulot doit préciser les leviers d'action que le gouvernement souhaite actionner en cohérence avec l'accord de Paris et les financements prévus. Il avait été promis début juin par le président de la République, souhaitant être à l'offensive après le retrait des Etats-Unis.
Reçues à l'Elysée, les ONG environnementales s'étaient dites "rassurées" mais sont impatientes de pouvoir jauger la détermination présidentielle avec des éléments concrets.
"On voudrait entrer +dans le dur+, on attend une déclinaison opérationnelle, un calendrier", résume Benoît Hartmann du CLER-Réseau pour la transition énergétique.
"La transition écologique repose largement sur la transition énergétique, il faut donc œuvrer pour réduire les besoins (en énergie) dans plusieurs secteurs: bâtiments, transports, industrie, consommation", explique-t-il.
- Des mesures pas tranchées -
Les ONG et les industriels des énergies renouvelables espèrent également des mesures (simplification réglementaire, appels d'offres, raccordements, etc.) pour accélérer le développement du secteur, alors que la France est en retard sur son objectif 2020 de 20% d'énergie renouvelable.
Sur la rénovation thermique des bâtiments, un chantier déjà engagé mais à un rythme trop lent, "on voudrait un calendrier et savoir quels financements vont être mobilisés", plaide Célia Gautier du Réseau action climat.
Les mesures que va présenter Nicolas Hulot ont reçu l'aval de Matignon mais d'autres ne sont pas encore tranchées.
Il s'agit par exemple de la taxe européenne sur les transactions financières, en gestation depuis des années, qu'Emmanuel Macron s'était engagé à faire aboutir cet été. Mais Bercy y est opposé, selon Armelle Le Comte d'Oxfam, reçue mardi au ministère de l'Economie.
Son produit, qui serait de l'ordre de 20 milliards d'euros annuels, serait en partie affecté à la transition énergétique et à l'aide à l'adaptation au changement climatique des pays pauvres.
"Macron nous avait agréablement surpris début juin à ce sujet, mais depuis, devant ses partenaires européens, il a changé de discours et souhaité attendre le Brexit pour instaurer cette taxe", déplore-t-on chez Oxfam.
Sur le volet nucléaire et la nécessaire fermeture de certains réacteurs pour respecter la loi sur la transition énergétique et ramener à 50% la part de l'atome dans la production d'électricité, une clarification est aussi attendue, mais pas forcément dès jeudi.
Il sera également question de chantiers à venir.
Pour favoriser les transports propres, des assises de la mobilité pourraient déboucher sur un projet de loi. Elisabeth Borne, la ministre des Transport, a aussi évoqué mercredi la piste d'une taxe sur les poids lourds, suscitant une vive réaction des transporteurs routiers.
L'accompagnement social de la fermeture annoncée des centrales à charbon est un autre défi à relever.
Enfin, la feuille de route de M. Hulot pourrait aborder l'ambition climatique européenne, insuffisante, et du rôle que la France veut jouer pour la rehausser.