La maire d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) a critiqué lundi la politique du gouvernement en matière de logement, au lendemain d'un nouvel incendie qui a fait sept blessés graves, dans un petit immeuble qui n'était pas autorisé selon elle à être habité.
"Partout en France, la crise du logement frappe en premier lieu les populations les plus vulnérables et participe à la prospérité de l'habitat indigne", a dénoncé l'édile communiste Meriem Derkaoui dans un communiqué.
Rappelant qu'Aubervilliers compte "75% de logement privé, dont 42% potentiellement indigne", elle a déploré que l'action de la municipalité contre ce fléau soit "aujourd'hui freinée par les décisions gouvernementales". A commencer par la baisse, selon elle, des fonds alloués à la rénovation urbaine.
"La lutte contre les marchands de sommeil (...) est une priorité du gouvernement", a argué le ministre de la Cohésion des territoires, Jacques Mézard, citant en exemple le projet de loi Elan, adopté au Sénat fin juillet, qui comprend plusieurs mesures contre l'habitat insalubre.
Dans l'incendie dimanche soir, les circonstances restent néanmoins à établir, de même que l'identité du propriétaire de l'immeuble et ses conditions d'exploitation.
L'exécutif a aussi réclamé "l'application par la justice de sanctions exemplaires", "s'il devait s'avérer que les conditions d'occupation de l'immeuble sinistré étaient irrégulières".
Plus tôt, l'édile avait indiqué que, d'après les premiers éléments de l'enquête confiée à la Sûreté départementale, le petit bâtiment, abritant une supérette au rez-de-chaussée, ne disposait d'"aucune autorisation d'urbanisme d'occupation en tant que logement".
"Pour nous, c'est un bail commercial", avait insisté la maire de cette commune populaire de plus de 80.000 habitants au nord de Paris sur BFM-TV.
- Sauvetage "à mains nues" -
Plusieurs riverains avaient indiqué dimanche à l'AFP qu'une famille résidait à l'étage de cette bâtisse située dans le quartier Marcreux, à 400 mètres de l'Hôtel de ville.
Lorsqu'un feu s'y est déclaré vers 19H00, sept personnes ont été grièvement blessées, dont une femme qui a dû être ranimée, et cinq enfants. Toutes étaient encore hospitalisées lundi soir, à l'exception d'un enfant de neuf ans, sorti dans la journée, selon une source préfectorale.
La maire a salué les policiers, arrivés avant les pompiers, qui sont intervenus "presque à mains nues" pour évacuer les habitants. Dix d'entre eux ont été légèrement blessés, comme six autres personnes.
Le ministre et le secrétaire d'Etat, Julien Denormandie, ont aussi remercié "les jeunes d'Aubervilliers qui sont intervenus courageusement pour venir en aide aux victimes".
Ce grave incendie est le deuxième à Aubervilliers en moins d'un mois. Le 30 juillet, un sinistre survenu au 17e étage d'un immeuble HLM avait provoqué la mort d'une mère de 33 ans enceinte et de ses trois enfants âgés de 18 mois à 6 ans. Neuf personnes avaient été blessées.
"La multiplication de ces drames doit nous interroger, même si les causes sont différentes", a réagi sur Twitter le président (PS) du Conseil départemental, Stéphane Troussel.
Fin juillet, c'est un enfant de dix ans qui avait provoqué l'incendie de la tour HLM, en jouant avec un briquet et un torchon.
Le quartier où est survenu le sinistre est concerné par le Programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD) - ces centres-villes souvent investis par des propriétaires qui logent au prix fort et au mépris des règles de sécurité des populations précaires.
Département francilien le plus touché par l'habitat indigne (7,5% du parc privé, avec des pics à 40% dans des communes près de Paris), la Seine-Saint-Denis a intensifié depuis un an sa lutte contre les marchands de sommeil, dont plusieurs ont été condamnés récemment à de la prison ferme.
Le gouvernement a récemment décidé de porter de cinq à dix milliards d'euros l'enveloppe allouée à la rénovation urbaine dans les 480 quartiers concernés en métropole.