Après une journée de polémique, le Medef a reculé vendredi en annulant un débat prévu dans le cadre de son université d'été auquel était conviée Marion Maréchal, par ailleurs au centre de multiples tentatives de recomposition politique à droite et à l'extrême droite.
C'est par un tweet matinal que le président de l'organisation patronale Geoffroy Roux de Bézieux a mis un terme à la polémique ouverte jeudi par une information de l'Express: l'invitation faite à l'ex-députée du Front national (devenu RN) de venir débattre dans le cadre des prestigieuses universités d'été, au sein d'un panel de responsables politiques.
"Il n'y aura ni intervenants RN ni intervenants LFI", a écrit M. Roux de Bézieux, annulant "purement et simplement" un débat sur le "populisme" dont la nièce de Marine Le Pen promettait d'être l'attraction principale.
Le Rassemblement national a protesté contre cette décision, le député Louis Aliot fustigeant "l'extrême élite" qui "montre son vrai visage", "celui de l'exclusion, de la discrimination, du sectarisme".
La décision de M. Roux de Bézieux intervient après un tir nourri de contestations dans le champ politique, avec les menaces de boycott venues de la majorité, notamment le député Roland Lescure, ou encore les vives réactions venues de différents bords.
"Plutôt Hitler que le Front populaire. Dans le haut patronat, il y a des choses qui ne changent pas", a réagi le communiste Ian Brossat sur Twitter.
L'ancienne porte-parole de La France insoumise Raquel Garrido a elle affirmé vendredi avoir été "décommandée" par le Medef d'une table ronde "sur les hauts salaires patronaux".
"Sur consigne de LREM, leur université d'été ne sera donc qu'une rencontre de l'oligarchie entre elle", a-t-elle accusé sur Twitter.
- "Lunettes d'avant 2012" -
Étaient également invités à l'université d'été du Medef le député européen François-Xavier Bellamy, tête de liste LR aux élections européennes, ainsi que la présidente de la Manif pour tous Ludovine de La Rochère, a indiqué le Medef.
Les "gilets jaunes" Jacline Mouraud et Priscillia Ludosky figurent également sur la liste, selon cette source, pour débattre respectivement avec les ministres Jacqueline Gourault (Territoires) et Bruno Le Maire (Économie) selon le magazine l'Express. Autre convié: l'ancien ministre et homme d'affaires Bernard Tapie.
L'invitation de Mme Maréchal avait aussi suscité des critiques dans les rangs patronaux, notamment l'ancienne patronne du Medef Laurent Parisot, auteur en 2011 d'un livre sur la "menace" du parti d'extrême droite.
"Parisot a gardé les lunettes d'avant 2012 quand on pouvait se demander si le Front national était un parti républicain. Aujourd'hui le paysage politique a énormément évolué et on s'inquiète de la montée des populismes en Europe", fait valoir une source proche du Medef.
Pour l'organisation patronale, cette polémique intervient juste avant la réunion mardi de son assemblée générale, pour recueillir l'avis des délégués au projet de réforme de M. Roux de Bézieux, élu il y a un an.
Ce projet, qui doit être approuvé à une majorité des deux tiers pour être validé, prévoit notamment le renoncement progressif à certains financements issus du paritarisme, par lesquels l'organisation patronale veut renforcer son indépendance financière, ainsi qu'un poids renforcé de la représentation des territoires et des femmes dans ses instances.
L'invitation de Mme Maréchal, qui défend une politique économique libérale, était venue s'ajouter au différentes initiatives prises autour de l'ex-députée FN du Vaucluse, qui est sortie de sa réserve une semaine après les européennes et le score désastreux des Républicains (LR) pour rappeler son credo d'une "grande coalition" entre le RN et "la droite populaire".
Mme Maréchal, dont la stratégie diverge de celle affichée par sa tante et patronne du RN Marine Le Pen, a dîné mardi avec plusieurs élus LR dont le député Xavier Breton et le sénateur Sébastien Meurant. Les principaux hiérarques de LR, de Jean Leonetti à Christian Jacob, ont fermement condamné cette initiative, le président du Sénat Gérard Larcher jugeant même que les participants s'étaient "mis eux-mêmes en dehors des valeurs de [leur] formation politique".