Irak : le diagnostic d’un Etat malade

Irak : le diagnostic d’un Etat malade

La chute du régime Bassiste en 2003 puis le retrait bâclé de l’armée américaine en 2011 ont définitivement sonné le glas d’une Irak unie et monochrome. Si depuis, le terrorisme n’a eu de cesse de se propager à l’échelle planétaire, le mal interne dont souffre le pays est celui des guerres confessionnelles. Peut-on sauver l’Irak? Le pays est-il condamné à sombrer ? Coup de projecteur sur les fractures qui rongent les habitants d’un Irak opprimé et de sa capitale emmurée.
Public Sénat

Par Salomé Rouzerol-Douglas

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Un espace vide d’Etat

Après avoir envahit l’Irak en 2003, la seconde erreur commise par les Etats-Unis selon Georges Malbrunot, grand-reporter au Figaro, est de s’être retirés. Derrière eux, les forces armées laissent un  Etat « dans l’état » oublié, semble t-il, par le Conseil de sécurité de L’ONU. Aucun processus démocratique de sortie de crise n’apparaît à l’ordre du jour. Cet Etat désormais   sans drapeau, sans hymne ni souveraineté devient le berceau idéal de l’exacerbation des aspirations et des particularités populaires locales. Pour Agnès Levallois, consultante sur le Moyen-Orient, les populations ont soif d’un regain d’identité nationale et d’un sentiment citoyen alors même que le gouvernement lutte pour se maintenir au pouvoir et échappe au fantasme d’un Etat fort et souverain. Aussi, l’incarnation d’une « irakité » demeure difficile dans cet espace vide d’Etat. Ainsi, Agnès Levallois se questionne sur la réhabilitation d’un contrat social qui puisse tenir compte des spécificités dans une appartenance commune à la citoyenneté irakienne. Il s’agit donc, comme l’exprime Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères, de s’interroger sur la façon de « gagner la paix » après avoir gagné la guerre

Une polarisation conflictuelle

Dans le documentaire, Bagdad, chronqiue d'une ville emmurée, Lucas Menget et Laurent Van der Stockt peignent le portrait d’une capitale meurtrie aussi bien par l’occupation que par les guerres civiles communautaristes. En effet, depuis plus de dix ans, Bagdad est une ville ségréguée qui voit se déchirer sa population entre d’une part les sunnites, qui tentent d’asseoir leur domination et, d’autre part, les chiites, fréquemment considérés comme des renégats. Cette extrême communautarisation progresse aussi bien dans les esprits que sur le terrain, comme nous l’explique Myriam Benraad. Pour cette chercheuse à l’Iremam et spécialiste du Moyen-Orient, ces antagonismes culturels et religieux présentent un véritable atout pour les djihadistes qui s’en servent comme « un des piliers majeurs de leur stratégie ».

Le soft Saddam : une alternative ?

Ce débat nous invite à appréhender la problématique irakienne, trop souvent éclipsée par le conflit syrien. Pour autant, la sujétion que joue aujourd’hui l’Etat islamique affecte pareillement ces deux Etats du Moyen-Orient. Aujourd’hui, le premier enjeu est moins d’éradiquer l’Etat que de trouver un « soft Saddam » comme rempart à la crise irakienne et tentative d’unité de l’Etat. Au pays de l’or noir, Georges Malbrunot prescrit une nouvelle Constitution et un retour à un contexte vierge de l’occupation américaine comme « pêché originel ». Mais tous les espoirs restent encore permis. D’ailleurs, Donald Trump a déjà promis de faire de la question de Mossoul et de Raqqa une de ses priorités dès le premier mois de son mandat. Alors, devons-nous présager une politique isolationnisme ou interventionnisme ? Attendons !


Retrouvez l’émission Un Monde en Docs consacrée à l’Irak le samedi 21 janvier à 22h sur Public Sénat. 
Rediffusion le dimanche 22 janvier à 9h.

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