« Rassurez-nous. » Le mot d’ordre des sénateurs au ministre de l’Education nationale a eu le mérite d’être clair. Auditionné pour la première fois depuis sa nomination par la Haute assemblée, Pap Ndiaye a pris le temps de répondre aux questions de la commission de la Culture, de l’Éducation et de la communication, au cours de deux heures trente d’audition.
« Votre nomination est considérée par beaucoup comme une rupture avec l’esprit laïc et républicain qu’incarnait votre prédécesseur »
La première « inquiétude » a été formulée par le sénateur LR Jacques Grosperrin qui pointait « ses propos passés ». « Vos déclarations ont toujours été approuvées et utilisées par ceux qui considèrent qu’il y a un racisme d’Etat en France », a fustigé l’élu du Doubs. Et d’ajouter : « Votre nomination est considérée par beaucoup comme une rupture avec l’esprit laïc et républicain qu’incarnait votre prédécesseur ».
D’un ton calme et posé, le ministre de l’Education nationale a invité le sénateur LR à lire ses ouvrages et à ne pas se limiter à des phrases extraites de leur contexte. « La notion de racisme d’Etat, je ne l’utilise pas et je l’ai même combattue […] Je suis un citoyen laïc et républicain », s’est défendu le ministre en insistant sur « son attachement à la République et à ses valeurs, une République fidèle à ses valeurs, celles des droits humains ». Pap Ndiaye assume, par ailleurs, des « points d’inflexion » avec Jean-Michel Blanquer mais une continuité sur un certain nombre de sujets, comme l’enseignement des savoirs fondamentaux.
Cependant, ce procès n’a pas été du goût des sénateurs de gauche. « Honte à ceux qui vous font un procès anti-républicanisme. Nous ne vous jugerons que sur les actes », s’est ainsi indigné Yan Chantrel (PS).
« Il y aura-t-il bien un professeur dans chaque classe à la rentrée 2022 ? »
Un autre sujet de taille a occupé une bonne partie de l’audition : la crise de recrutement des enseignants. « Plus de 4 000 postes n’ont pas été pourvus à l’issue des concours pour la rentrée 2022. Il y aura-t-il bien un professeur dans chaque classe à la rentrée 2022 ? », a interrogé Jacques Grosperrin.
« Il y a une politique de recrutement d’enseignants contractuels », a répondu le ministre en reconnaissant que « la situation n’est pas idéale ». Selon lui, la revalorisation des salaires est indispensable, il évoque en ce sens des hausses de rémunération à 1 800 euros à Bac + 5. « Il y a d’autres enjeux, notamment sur les trajectoires de carrière. Il faut réfléchir à des itinéraires moins linéaires que par le passé », a-t-il ajouté.
Il a aussi été question du statut des professeurs sur un angle plus symbolique. Olivier Paccaud, sénateur LR, a notamment souligné les violences physiques et verbales auxquelles peuvent être confrontés les enseignants. « Nous ne pratiquons pas la politique de l’autruche sur ce sujet », a assuré Pap Ndiaye.
Le dispositif Parcoursup pour les admissions postbac a été brocardé par les sénateurs. Alexandra Borchio-Fontimp a rappelé qu’une étudiante a envoyé une recette de cuisine en guise de lettre de motivation et a été admise. « Parcoursup est un dispositif perfectible, on progresse d’année en année. Parcoursup n’est pas parfait mais la situation précédente était particulièrement injuste », a défendu le ministre en rappelant que la crise sanitaire n’avait simplifié les choses.
Le ministre a également été interrogé sur le port de tenues islamiques à l’école, après la publication d’une note des renseignements territoriaux. Le président du groupe Les Républicains, Bruno Retailleau, avait demandé au ministre de se montrer « intransigeant face à l’islam politique ».
Le ministre de l’Education nationale, Pap Ndiaye, a indiqué avoir lancé une collecte d’informations sur le port de signes religieux ostentatoires dans les écoles.
Pap Ndiaye a rappelé devant les sénateurs les dispositifs existants et assuré disposer « d’une équipe très solide ». « Il y a des équipes « Valeur de la République » pour les atteintes à la laïcité ainsi que le Conseil des sages de la laïcité », a-t-il indiqué en précisant qu’il existait « des points de vigilance dans certains endroits ».
Lors de cette audition, le ministre s’est également voulu rassurant sur la situation des AESH (accompagnants des élèves en situation de handicap), ou sur l’école du futur expérimentée à Marseille. Devant la chambre des territoires, Pap Ndiaye a dit vouloir agir en « concertation avec des élus locaux pour éviter la verticalité venant de la rue de Grenelle ».
« Sachez que vous aurez avec moi un partenaire attentif et respectueux de vos prérogatives », a-t-il conclu s’assurant, pour le moment, la gratitude des sénateurs.