La crise sanitaire ? Un « retour de l'Histoire », estime Jean-Christophe Rufin, écrivain, médecin et ancien diplomate. C'est de chez lui, du côté du Mont Blanc, que Jean-Christophe Rufin, confiné mais au grand air, observe les ravages du coronavirus.
« L'Histoire, c'est des guerres, des épidémies, des famines...et cela on l'avait oublié. Tout cela semblait très loin », dit-il dans l’émission littéraire Livres & Vous que nous avons enregistrée à distance.
Pourtant, l'académicien pressentait la catastrophe. Ce petit quelque chose qui altère les douceurs de la vie et qui insidieusement inquiète. « Il y avait quelque chose qui flottait dans l'air. On sentait que quelque chose allait arriver, on sentait que le système ne fonctionnait plus. Comme si, de manière générale, on avait trop tiré sur la corde. » Jean-Christophe Rufin se sent « rattrapé par la Nature ».
De cette crise, il va nous rester une notion de fragilité
L'épidémie actuelle mène aussi à la modestie. « Oui la modestie, voilà ce qu'elle m'inspire, souligne l'auteur, Prix Goncourt au début de ce siècle. On n’a pas fait le tour de toutes les menaces de la Nature. On ne maîtrise pas tout. De cette crise, il va nous rester cette notion de fragilité et nous devrons vivre avec. »
Le Dr Raoult, un artiste ?
Confiné mais pas isolé, Jean-Christophe Rufin demeure un observateur attentif de la seule actualité du moment. Et des polémiques qu'elle charrie. Comme celle du débat toujours en cours autour de l'efficacité de la chloroquine, cette molécule défendue par le Pr Didier Raoult à Marseille. « Il y a un retour de l'humain dans son discours. C'est en fait la médecine de toujours, loin des items statistiques et des contrôles juridiques. Presque une forme d'art. »
Reste que, comme pour beaucoup, le confinement pèse sur les épaules de Jean-Christophe Rufin là où les montagnes, la Nature, lui ouvre ses bras. « J'essaye d'éviter les gendarmes », sourit-il, plus préoccupé encore par les atteintes aux libertés que génère la crise sanitaire.
« Une démocratie peut aller très loin dans les contrôles. Elle peut aller très vite aussi dans le sens de l'anéantissement total des libertés. » Alors, parfois, Jean-Christophe Rufin, l'œil fixé sur les sommets sent monter des réflexes de « maquisard ».