Jean-Michel Blanquer dans la tourmente après la révélation de ses vacances à Ibiza
Les révélations sur les vacances à Ibiza du ministre de l’Education nationale, où il a donné son interview polémique sur le protocole à l’école, créent la polémique. Une partie de l’opposition demande la démission de Jean-Michel Blanquer. Le ministre « regrette » la « symbolique ».
Des vacances qui pourraient lui coûter cher. Mediapart révèle que le ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, a donné son interview au Parisien, où il présentait la veille de la rentrée le protocole sanitaire pour l’école, depuis l’ile espagnole d’Ibiza, où il était en vacances. Si un ministre a évidemment le droit de prendre des vacances, le symbole passe mal, alors que beaucoup d’enseignants sont épuisés. A trois mois de la présidentielle, une telle erreur de communication semble pour le moins étonnante.
« La symbolique, je la regrette » reconnaît Jean-Michel Blanquer
Interrogé lors des questions d’actualité au gouvernement à l’Assemblée, qui s’annonçaient houleuses, Jean-Michel Blanquer a esquissé un début de mea culpa, tout en se défendant. « Il se trouve que le lieu que j’ai choisi, j’aurais dû en choisir sans doute un autre. La symbolique, je la regrette », a reconnu le ministre, qui demande : « Est-ce que j’avais le droit de prendre quelques jours de congé après cette année ? Est-ce qu’il y a des réunions ou des éléments que je devais faire pendant cette période que je n’ai pas faits à cause de ça ? Non bien sûr. Et troisièmement, est-ce que les décisions auraient été différentes si j’avais été ailleurs ? Non plus ».
Reste que pour l’opposition, ces vacances sur cette île célèbre pour ses clubs géants et ses DJ stars est du pain béni. Ce mardi matin, plusieurs responsables, surtout de gauche, demandent la démission du ministre. C’est le cas du candidat écologiste à la présidentielle, Yannick Jadot, du premier secrétaire du PS, Olivier Faure ou encore de la députée de La France Insoumise, Mathilde Panot.
« Jean-Michel Blanquer, qui était le bon élève du gouvernement, devient le vilain petit canard » selon Patrick Kanner
Au Sénat, Patrick Kanner, patron des sénateurs socialistes, lui, ne demande pas la démission et tempère plutôt ses critiques. « Cette attitude peut paraître très désinvolte. Un ministre a le droit de prendre des congés, de partir même à l’étranger s’il prévient le premier ministre. C’est une très grosse maladresse qui jette le trouble », estime l’ancien ministre des Sports, « car ça devait sortir à un moment donné, dans une situation aussi critique que celle des écoles, avec l’incompréhension que nous avons connue avec trois protocoles de reprise différents. Manifestement, Jean-Michel Blanquer, qui était le bon élève du gouvernement, devient peut-être le vilain petit canard. C’est au gouvernement de prendre ses responsabilités, si on estime que ce pas de côté mérite une sanction », estime le sénateur PS du Nord. Regardez (images, Fabien Recker) :
Selon Patrick Kanner, « la démission d’un membre de ce gouvernement à trois mois de l’élection n’a pas beaucoup de sens. Mais ça vient aggraver le bilan négatif du quinquennat Macron. La meilleure sanction, c’est de le battre ». S’il ne demande pas la démission de Jean-Michel Blanquer, l’ancien membre du gouvernement Valls sait bien qu’« un ministre, c’est un pion sur un échiquier. Il peut être basculé à la seconde. C’est la vie de tout ministre qui dépend de la volonté du Président et du premier ministre ».
Retailleau : « Je ne hurle jamais avec les loups »
A droite, on ne suit pas le mouvement qui appelle à la démission du ministre. Pour Bruno Retailleau, président du groupe LR du Sénat, l’essentiel n’est pas là. « Je ne demande jamais la démission des ministres car cette décision ne dépend pas de moi. Et je ne hurle jamais avec les loups », soutient le sénateur de Vendée. « Ce que je reproche à Jean-Michel Blanquer, ce n’est pas tellement Ibiza ou je ne sais où il aurait pu annoncer le protocole sanitaire. Ce que je lui reproche, ce sont deux choses : la grande pagaille qu’il a mise avec ses services bureaucratiques en France. C’est aussi la responsabilité du Président. […] Je lui reproche aussi le bilan mauvais sur l’école. On a reculé dans les bilans internationaux et on a fait du bac non plus un examen national mais on l’a dévalorisé au rang d’un brevet national ».
Le sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques, Max Brisson, spécialiste des questions d’éducation au groupe LR du Sénat, est sur la même ligne. « J’ai bien d’autres reproches au fond à effectuer à l’encontre de Jean-Michel Blanquer, que d’aller lui reprocher d’aller prendre quelques jours de vacances, tout en restant en contact avec son cabinet. Qu’il ait donné son interview depuis Paris ou Ibiza ne change rien à l’affaire. Le fond, c’est le protocole annoncé la veille pour le lendemain, modifier le surlendemain et changé ensuite par le premier ministre », estime Max Brisson.
« Ce qui est très critiquable, c’est de communiquer auprès d’un média plutôt que de le faire auprès des acteurs de l’éducation nationale et de le faire au dernier moment », insiste le sénateur LR, qui ajoute :
C’est une polémique politicienne qui n’apporte pas grand-chose au débat.
Patriat : « J’imagine que les enseignants n’aimeraient pas que l’on parle de leurs vacances »
Dans la macronie, on sort les rames. D’autant que d’après Le Monde, on connaissait la destination du ministre au sein de l’exécutif. Et « Matignon, tout comme une partie de l’entourage de Jean-Michel Blanquer, avait déconseillé au ministre de partir à Ibiza dans ce contexte d’explosion de la vague Omicron ».
Les responsables de la majorité présidentielle interrogés tentent de défendre le ministre tant bien que mal. A l’image de François Patriat, président du groupe LREM du Sénat. « J’imagine que les enseignants n’aimeraient pas que l’on parle de leurs vacances », rétorque le sénateur LREM, invité de la matinale de Public Sénat, ce mardi. Il dénonce « une instrumentalisation ». « On a un ministre à la barre, qui suit les dossiers. En fin de compte, si les décisions étaient tardives, proches de la rentrée, c’est parce qu’elles se sont faites à partir des recommandations du monde médical, qui ont été remises au dernier moment », défend François Patriat. Reste que la politique est faite de symboles. Et celui d’un ministre qui donne au dernier moment des consignes attendues, alors qu’il est sous le soleil, n’est pas très bon. François de Rugy, dont des photos d’un repas aux homards ont abouti à sa démission, en sait quelque chose.
Alors que Donald Trump se prépare à retourner à la Maison Blanche, et qu’une victoire sans appel se dessine face à Kamala Harris, dans la matinale de Public Sénat, politologues et journalistes analysent les premiers éléments du scrutin.
Débats budgétaires hors de contrôle, tensions entre alliés macronistes et LR, manque de cohésion au gouvernement : la vie du « socle commun » n’est pas un long fleuve tranquille. Les deux camps, qui « se foutaient sur la gueule » avant l’été, n’ont pourtant pas d’autres choix que de s’entendre, du moins aujourd’hui.
Invitée de la matinale de Public Sénat, la ministre déléguée chargée de l’énergie, Olga Givernet a défendu une hausse des taxes sur l’électricité. La mesure, particulièrement impopulaire, a été supprimée par les députés du projet de loi de finances 2025.
« Il n’y aura pas de nouvelle taxe, mais il faut réfléchir à une participation possible au fait de vivre dans la ville ou le village », avance la ministre Catherine Vautrin, qui ouvre la réflexion avec les élus. Au Sénat, le président de la délégation aux collectivités, Bernard Delcros, évoque une « réforme de la taxe foncière », quand le vice-président de l’AMF, Philippe Laurent, défend une contribution qui « tient compte très largement du revenu ». Le débat est loin d’être clôt.