Imaginée comme une réponse aux émeutes urbaines de juin 2023, qui ont impliqué de nombreux mineurs, la proposition de loi de l’ancien Premier ministre, Gabriel Attal, a été définitivement adoptée par les deux chambres après le compromis trouvé en commission mixte paritaire (CMP), il y a quelques jours. La déclinaison législative de la formule : « Tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies, tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter », répétés à de nombreuses reprises par l’ancien chef du gouvernement a été adopté définitivement, avec 223 sénateurs pour et 112 contre. L’Assemblée avait approuvé la proposition de loi à l’identique mardi, par 341 voix pour et 187 contre.
« Ce texte ne va pas révolutionner le monde. Ce n’est pas loin d’être de la communication. Mais il s’adresse aux parents défaillants pour leur rappeler leur responsabilité, mais aussi à ceux qui utilisent les mineurs pour leurs trafics », estimait la semaine dernière la sénatrice centriste, Dominique Vérien qui a voté en faveur de la version de compromis en CMP.
« Une appréciation de la justice des mineurs du type café du commerce »
« Pour nous, il n’y a aucun changement positif par rapport à la version du Sénat. On reste dans une appréciation de la justice des mineurs du type café du commerce, laissant croire que les mineurs ne sont pas responsables de leurs actes », avait taclé, de son côté, la sénatrice socialiste, Laurence Harribey, qui annonce qu’une saisine du Conseil constitutionnel à l’initiative des groupes de gauche du Sénat, est en préparation.
Sur le fond, le texte rétablit la comparution immédiate pour les justiciables mineurs de plus de 16 ans. La version sénatoriale avait étendu cette possibilité aux mineurs de 15 à 16 ans pour des délits punis de plus de 5 ans de prison, et les mineurs de plus de 16 ans pour des délits punis de plus de 3 ans de prison. En CMP, les parlementaires sont revenus à la version initiale.
Autre ajout du Sénat qui n’a pas survécu, l’amendement de la sénatrice Marie-Claire Carrère-Gée qui ouvrait la voie au prononcé de courtes peines d’emprisonnement « lorsque la gravité des faits et la personnalité du mineur l’exigent ». Laurence Harribey et Dominique Vérien rappellent que le sujet des courtes peines de prison sera traité dans leur mission d’information sur « l’exécution des peines ».
Autre mesure emblématique : l’instauration d’une dérogation à l’excuse de minorité, un principe constitutionnel qui permet d’atténuer les peines prononcées contre un mineur. Si l’excuse de minorité demeure, la juridiction devra motiver son application pour les mineurs de 16 à 18 ans responsable d’un délit puni d’une peine d’au moins cinq ans d’emprisonnement, commis en état de récidive légale. Il s’agit d’un renversement du mécanisme actuellement en vigueur : aujourd’hui, c’est sa non-application qui doit être justifiée.
En ce qui concerne les parents, le texte étend le régime de responsabilité civile pour les dommages causés par leurs enfants mineurs, en supprimant notamment la condition de cohabitation, à moins que l’enfant n’ait été placé par suite d’une décision administrative ou judiciaire.