Justice : « Le rappel à la loi est la réponse judiciaire qui produit le moins de récidives », assurent les magistrats du parquet devant le Sénat
Lors d’une table ronde organisée par la commission des lois, les magistrats du parquet ont défendu l’efficacité du rappel à la loi pourtant supprimé par les députés lors de l’examen, en première lecture, du projet de loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire ».
C’est une table longue riche, plus de trois heures, qui s’est déroulée ce matin en commission des lois du Sénat. Différents acteurs de la chaîne pénale (procureur, juge d’application des peines, directeur d’administration pénitentiaire) étaient auditionnés dans la perspective de l’examen en septembre du projet de loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire ». « Notre commission a voulu organiser deux tables rondes en réalité, à la suite des évènements qui se sont déroulés au mois de mai et singulièrement à la suite de la manifestation des syndicats de police devant l’Assemblée nationale […] Nous avons tous ici ressenti les germes d’un climat parfaitement inacceptable. On ne peut pas laisser s’instaurer un quelconque conflit entre le monde de la police et le monde de la justice », a souligné le président LR de la commission, François-Noël Buffet, rappelant que la semaine dernière, ce sont les syndicats de policiers qui avaient été auditionnés.
« Aucun de ceux qui participaient n’a remis en cause la confiance qui existe dans le travail quotidien entre la police judiciaire et la justice », a tenu a rappelé le président de la commission en début de l’audition. Même sentiment réciproque du côté des magistrats ce mercredi. « Nous n’avons pas été affectés par ce malaise exprimé par les syndicats car nous sommes renvoyés au quotidien de cette relation de qualité », a confirmé Damien Savarzeix, procureur de la République près le tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône, représentant la Conférence nationale des procureurs de la République.
Pour Virginie Peltier, professeur de droit privé et sciences criminelles à la Faculté de droit et science politique de l’Université de Bordeaux, « ce procès en laxisme de la justice est d’abord fait par les chaînes d’information continue et les réseaux sociaux qui véhiculent toujours les mêmes faits divers dont l’auteur est un récidiviste ».
Symbole de ce procès en laxisme fait au monde judiciaire : le rappel à la loi. Au lendemain de la manifestation des syndicats de policiers, le gouvernement avait déposé en urgence un amendement au projet de loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire », alors en examen à l’Assemblée nationale, pour supprimer le rappel à la loi du code de procédure pénale. Le 19 mai, jour de la manifestation, interrogé aux questions d’actualité du gouvernement du Sénat sur l’efficacité de la réponse pénale, le Premier ministre, Jean Castex avait brocardé ce premier niveau de la réponse pénale qui, expliquait-il, « ne sert à rien et qui ridiculise l’autorité de l’Etat ».
« L’apparence de laxisme n’est parfois qu’une apparence »
Entre le monde politique et judiciaire, c’est peu dire que le niveau d’appréciation du bien-fondé de cette suppression diffère. « Le rappel à la loi ne doit pas être regardé comme quelque chose de forcement inefficace », a indiqué Damien Savarzeix. Le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône, représentant la Conférence nationale des procureurs de la République, a d’abord rappelé aux sénateurs. « Pour les délinquants qui présentent un très faible risque de récidive, et nous en avons, et bien le rappel à la loi, c’est-à-dire le traitement minimal, est la réponse judiciaire qui produit le moins de récidives […] Il faut être bien conscient qu’il a son utilité. Il est très adapté à toute une série de situations que nous traitons […] Un jeune qui a fait une bêtise qui a subi une interpellation et une audition, le rappel à la loi par OPJ (officier de police judiciaire) est, paradoxalement, ce qui produira les mêmes effets, avec moins de risque de traumatisme sur le long terme qu’une réponse pénale plus lourde […] Ce qui pose problème, c’est son utilisation en tant qu’instrument mécanique de gestion des flux », a-t-il appuyé, tout en appelant à « sortir des idées préconçues » : « L’apparence de laxisme n’est parfois qu’une apparence parce que ça constitue un traitement très efficace d’une partie de notre délinquance ».
Jean-Olivier Viout, magistrat honoraire, ancien procureur général près la cour d’appel de Lyon s’est également dit « très attaché » au rappel à la loi. Il chiffre à 47 % le taux d’alternatives aux poursuites. Mais « lorsque l’alternative aux poursuites est vidée de toute substance », « ça participe à ce sentiment d’incompréhension », relève-t-il. Car, selon lui, le transfert de la charge du rappel à la loi à l’enquêteur de police judiciaire en « a fait une variable d’ajustement de l’évacuation des flux pénaux ». « Nous avons en France plus de 1,3 million d’affaires poursuivables […] On a fait de ces rappels à la loi, des classements sans suite qui ne disaient pas leurs noms et qui nourrissaient des éléments de langage abusivement flatteurs quant au taux de réponse pénale », a-t-il indiqué.
Avertissement judiciaire
Pour autant, les deux magistrats ne sont pas hostiles à une nouvelle dénomination et à une nouvelle forme de cet instrument. « On peut l’appeler avertissement judiciaire. On peut le solenniser en interdisant le rappel à la loi par OPJ (officier de police judiciaire) et avoir recours à un tiers, un délégué du procureur… Pourquoi pas », a proposé Damien Savarzeix.
En conclusion de ce point sur le rappel à la loi, François-Noël Buffet s’interroge : « Faut-il comprendre de votre propos que nous disposons sur le plan juridique de l’arsenal suffisamment complet en termes de réponses adaptées à chaque situation et que la difficulté première est la capacité à les mettre en œuvre et les moyens humains et matériels qui pourraient être d’un plus grand volume ?
« Vous avez parfaitement résumé et compris l’essence de mes propos », répond Damien Savarzeix.
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