La proposition de loi visant à allonger le délai légal de l’IVG a finalement été inscrite à l’agenda du Sénat par le gouvernement. Un revirement inattendu de la part de l’exécutif, qui se disait plutôt défavorable à ce texte, issu des travées de l’Assemblée nationale où il a été adopté le 30 novembre. Certains commentateurs y voient un coup politique de la part d’Emmanuel Macron qui, à la veille de l’élection présidentielle, enverrait un signal à l’électorat de gauche, tout en cornérisant la droite sénatoriale, opposée à la mesure. « C’est pire qu’un coup politique, c’est une grossière manœuvre politique », a commenté le député LR Robin Reda, qui était invité vendredi de « Parlement Hebdo » sur Public Sénat et LCP « Nous sommes dans une période hautement sensible, un débat électoral national approche, et en dernière vitesse, à la fin de la session parlementaire, on ouvre un débat qui touche à l’intime, à l’éthique, qui touche la société », fustige cet élu.
« À titre intime, je ne suis pas opposé à ce qu’on réfléchisse à cet allongement »
L’arrivée de ce texte à la Chambre Haute pourrait aussi être une conséquence de la désignation de Valérie Pécresse comme candidate des Républicains pour la présidentielle. Les réticences de la droite sur ce sujet risquent de mettre en avant le conservatisme de la famille politique de Valérie Pécresse, pourtant réputée plus libérale que ses quatre concurrents à l’investiture, et qui, au lendemain de sa désignation, a enregistré un très fort bond dans un sondage réalisé par Elabe (20 % des intentions de vote, contre 23% pour Emmanuel Macron). « Valérie Pécresse et la droite républicaine sont très à l’aise sur la loi Veil, qui, rappelons-le, a été votée par la droite et des hommes », balaye Robin Reda. « À titre intime, je ne suis pas opposé à ce qu’on réfléchisse à cet allongement », ajoute-t-il. La proposition de loi vise à faire passer la durée légale pour pouvoir procéder à une interruption volontaire de grossesse de 12 à 14 semaines.
Mais selon notre invité, cette proposition d’allongement masque « deux échecs criants » : « l’échec de la prévention santé auprès des lycéens - l’éducation sexuelle n’est pas bien développée dans nos établissements scolaires -, et, par ailleurs, l’échec du gouvernement sur la désertification médicale. »
Vers une pause des réformes sociétales ?
Interrogé sur les réformes de société que la présidente de l’Île-de-France pourrait porter si elle venait à accéder à l’investiture suprême, Robin Reda se montre plus évasif. Sans évoquer explicitement une pause dans les réformes sociétales, il tient à faire valoir d’autres priorités. « On a un enjeu : réparer les fractures de la société française. Il faut relever le pays économiquement et sur le plan sécuritaire. La priorité c’est protéger les Français », martèle le député de l’Essonne.
Par ailleurs, il estime que l’administration et les services publics ne parviennent pas toujours à suivre le rythme des transformations. « On a eu des réformes sociétales importantes ces dernières années : le mariage pour tous, entré dans les mœurs et que la droite républicaine ne remettra pas en cause, la PMA pour toutes… », énumère-t-il. « On voit que cette dernière a du mal à entrer en vigueur, parce qu’il n’y a pas assez de centres et de donneurs », pointe-t-il. « La France n’a pas les moyens d’appliquer les réformes sociétales pour lesquelles le législateur a fait une avancée. Elles sont quasiment inapplicables par manque de donneurs pour la PMA, de centres pour la PMA, de centres pour l’IVG, de gynécologues dans les départements sous-dotés en médecins », énumère Robin Réda. Et de conclure : « Réparons la France sur le plan de la santé publique. »