L’Assemblée honore Clemenceau et Jaurès, avant une polémique sur Pétain
Devenus des références politiques, Jaurès et Clemenceau, la première des victimes et le héros national de la Grande Guerre, ont été honorés...
Par Pierre ROCHICCIOLI
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Devenus des références politiques, Jaurès et Clemenceau, la première des victimes et le héros national de la Grande Guerre, ont été honorés mercredi à l'Assemblée avant, ironie de l'histoire, qu'éclate une polémique sur un hommage à Pétain.
"Il aura fallu cent ans pour que la Représentation nationale s'acquitte d'une dette envers l'Histoire, cent ans pour qu'on appose enfin deux plaques dans l'hémicycle, là où siégeaient Jean Jaurès et Georges Clemenceau", a lancé le président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand, ex-socialiste devenu "marcheur".
Face à lui, dans l'hémicycle, plusieurs ministres et anciens ministres, des centaines de députés de toutes tendances politiques, à l'exception du Rassemblement national, ont applaudi debout pendant de longues minutes l'hommage rendu aux deux figures politiques, en présence de leurs familles.
Quelques heures plus tard, c'est une autre figure de la Grande Guerre, Philippe Pétain, qui a fait irruption dans l'actualité. Emmanuel Macron a justifié la célébration de "ce grand soldat" samedi aux Invalides avec sept autres maréchaux, malgré "des choix funestes" pendant la Seconde Guerre mondiale.
"Ça tombe plutôt mal. Encore un mauvais pas du président de la République", a déploré le communiste André Chassaigne. Durant les questions au gouvernement, la socialiste Valérie Rabault a "regretté" cette conjonction.
Si l'artisan de la Collaboration avec le régime nazi suscite majoritairement le rejet, Jaurès et Clemenceau sont plébiscités par la classe politique. De Jean-Luc Mélenchon à Nicolas Sarkozy en passant par Emmanuel Macron, chacun trouve dans leurs destins politiques hors norme, matière à inspiration ou justification de ses choix politiques.
Adversaires politiques, le socialiste Jaurès, humaniste œuvrant pour l'émancipation de la classe ouvrière, et le radical Clemenceau, incarnation de l'ordre et de la fermeté, ont marqué la vie du Palais Bourbon par leurs duels oratoires.
Tous deux Républicains et ardents défenseurs des libertés, ils ont su taire leurs différences dans leurs combats pour l'innocence du capitaine Dreyfus, la critique du colonialisme, le développement de la protection sociale ou la séparation de l'Église et de l'État.
Jean Jaurès fut assassiné à Paris par un nationaliste trois jours avant le déclenchement de la guerre de 14-18 qu'il avait voulu à tout prix éviter. Chef de guerre victorieux, Clemenceau est sorti du conflit avec le rang de héros national.
- "De la vitamine" -
"Pour un certain nombre d'entre nous, Jaurès, c'est une vitamine. Quand ça va pas fort, quelques pages de Jaurès", a confié à l'AFP le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon, qui avait recherché sa place dans l'hémicycle dès son arrivée en juin 2017.
Dévoilement d'une plaque commémorative apposée sur le fauteuil qu'occupait Jean Jaurès à l'Assemblée Nationale, par le président de cette assemblée Richard Ferrand, en présence de membres de la famille Jaurès. Photo prise à Paris le 7 novembre 2018.
AFP
"Ce sont deux grands héros de la République qui ont été souvent opposés mais qui avaient le même amour de la France", a jugé le président du Conseil constitutionnel Laurent Fabius.
L'ancien président de l'Assemblée, Louis Mermaz, a insisté sur leur capacité "à se retrouver sur les grandes causes nationales et internationales".
Après le général de Gaulle, Valéry Giscard d'Estaing, François Mitterrand et François Hollande, Emmanuel Macron a lui aussi emprunté les mots du "Père la victoire" pour notamment justifier sa détermination. "Dans ces moments marqués par l'angoisse, la peur, les changements profonds, il faut savoir tenir", a-t-il encore repris cette semaine. Il faut tenir jusqu'au dernier "quart d'heure", avait-il déjà affirmé à propos de la lutte contre l'Etat islamique en Syrie.
Avant lui, le socialiste Manuel Valls avait fait du "Tigre" Clemenceau sa référence suprême. "Il y a plusieurs hommes en lui, le médecin des pauvres, l'élu de la Commune de Paris, l'homme de formules assassines et le ministre de l'Intérieur créateur des brigades du Tigre", avait-il expliqué, oubliant son rôle plus contesté de briseur de grèves.
Les zélateurs de Jaurès, fondateur du journal "L'Humanité", ne sont pas moins nombreux à gauche comme à droite. Le président Nicolas Sarkozy a été jusqu'à le citer vingt-sept fois dans un discours de soixante-deux minutes en 2007. Aux Européennes de 2009, Louis Alliot (RN) a lui assorti une affiche d'un "Jaurès aurait voté FN", présentant son parti comme le seul à défendre "les valeurs de justice sociale et d'humanisme".
À trois jours de la décision du tribunal correctionnel dans l’affaire des assistants parlementaires du Rassemblement national, les élus du parti alternent entre discrétion ou sérénité. Plusieurs espèrent que leur candidate sera en mesure de se présenter à la présidentielle, alors que le réquisitoire défend une inéligibilité avec application immédiate.
Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision au sujet d’une question prioritaire de constitutionnalité soulevée par un élu local de Mayotte qui contestait sa peine d’inéligibilité « assortie d’une exécution provisoire », c’est-à-dire non suspensive en cas d’appel. Si la décision est sans impact juridique pour Marine Le Pen qui encourt, elle aussi, une peine d’inéligibilité immédiate, elle envoie néanmoins un message aux magistrats.
C’est d’abord avec une forme d’amusement, puis d’étonnement, que la sénatrice LR Christine Bonfanti-Dossat a reçu à trois reprises sa carte de membre des LR. Une simple « erreur » isolée, assure la secrétaire départementale LR du Lot-et-Garonne. « L’anecdote » reste néanmoins symptomatique de « la désorganisation » qui touche le parti depuis le départ d’Eric Ciotti avec pertes et fracas… et fichiers.
Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision au sujet d’une question prioritaire de constitutionnalité soulevée par un élu local de Mayotte qui contestait sa peine d’inéligibilité « assortie d’une exécution provisoire », c’est-à-dire non suspensive en cas d’appel. Elle est sans impact pour Marine Le Pen, qui encourt, elle aussi, une peine d’inéligibilité immédiate, dans l’affaire des eurodéputés du RN.