L’union de la gauche à l’épreuve des sénatoriales
PS et EELV n’ont que le mot « union » à la bouche mais échouent à trouver un accord aux sénatoriales. Du moins nationalement. L’union se fera plutôt à la carte dans certains départements. Les discussions semblent meilleures entre PS et PCF, mais « jusqu’au bout, les choses vont s’ajuster ».

L’union de la gauche à l’épreuve des sénatoriales

PS et EELV n’ont que le mot « union » à la bouche mais échouent à trouver un accord aux sénatoriales. Du moins nationalement. L’union se fera plutôt à la carte dans certains départements. Les discussions semblent meilleures entre PS et PCF, mais « jusqu’au bout, les choses vont s’ajuster ».
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La gauche a passé le week-end à parler union, à Blois, à l’université d’été du PS. Premiers travaux pratiques dès le 27 septembre, avec les élections sénatoriales, où la moitié des sièges est en jeu. Et comme pour la présidentielle de 2022, la volonté est là, mais ce n’est pas gagné. Entre les formations de gauche, c’est l’accord… à la carte.

Pas d’accord national entre le PS et EELV

Avant la pause estivale, le Parti socialiste et Europe Ecologie-Les Verts avaient entamé les discussions. Résultats : c’est en partie un échec. « Avec EELV, il n’y a pas d’accord national, mais il y a des accords locaux où ils soutiennent nos candidats ou l’inverse » explique Patrick Kanner, à la tête du groupe PS du Sénat, dont 36 des 71 sénateurs sont renouvelables. Le sénateur du Nord compte sur « une bonne dizaine de départements avec accord », d’ici la date limite de dépôt des listes, fixée au 11 septembre. Patrick Kanner ajoute :

Les sénatoriales, c’est de la dentelle et de l'alchimie en même temps. Mais on a eu très peu de temps pour affiner les accords, à cause du second tour des municipales le 28 juin.

« La semaine qui s’ouvre va être encore une semaine de négociation à la marge » ajoute l’ancien ministre. Mais dans beaucoup de départements, « ils (les écologistes) se comptent. Mais le fait qu’il n’y ait pas de liste commune ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’accord » positive Patrick Kanner. Surtout que le système d’élection des sénateurs, avec les grands électeurs et la proportionnelle dans les départements élisant trois sénateurs et plus, pousse les partis à réaliser de savants calculs. « Parfois, il vaut mieux être ensemble. Et parfois, il vaut mieux être séparés pour récupérer un siège supplémentaire » rappelle le président du groupe PS.

EELV « espère avoir entre 4 et 6 nouveaux sénateurs écologistes »

Tout va bien alors ? Chez EELV, la tonalité est un peu moins enthousiaste. « Nous étions favorables à un accord national. Mais les discussions n’ont pas abouti. Ça ne nous garantissait pas de sièges en plus…. Donc ce n’était pas un accord national. Entre les fédérations PS et les équilibres socialistes, ça n’a pas pu se faire. Je le regrette » soutient Bruno Bernard, nouveau président de la métropole de Lyon, membre du bureau exécutif d’EELV et délégué aux élections. Le responsable « constate que sur une élection où on aurait pu envoyer un signal avec des listes de rassemblement, nous n’y sommes pas arrivés. Il y a eu des échanges cordiaux mais peu productifs ». Il ajoute :

Il y a de gros départements où EELV est fort et il n’y a pas de proposition du PS. C’est compliqué (Bruno Bernard, responsable des élections d'EELV)

L’union est – encore une fois – un combat à gauche. « Quelques accords » sont cependant sortis du chapeau, comme dans le Rhône, « où c’est gagnant-gagnant. Le fait d’être ensemble, c’est une garantie de l’élection probable de trois sénateurs » salue Bruno Bernard, dont deux écolos, avec Thomas Dossus et Raymonde Poncet.

Au total, EELV « espère avoir entre 4 et 6 nouveaux sénateurs écologistes », dans une série où les écolos n’en comptent aucun. Après la victoire de Pierre Hurmic, à Bordeaux, ils peuvent espérer l’élection de Monique de Marco, en Gironde. EELV place de sérieux espoirs aussi dans le Bas-Rhin, avec Jacques Fernique, ainsi qu’en Haute-Savoie, après la victoire à Annecy. « L’ambition est de refaire le groupe écologiste au Sénat » soutient Bruno Bernard. A la Haute assemblée, il suffit d’être 10 pour former un groupe. Les écolos pourraient notamment compter sur les renforts d’Esther Benbassa, membre d’EELV, mais aujourd’hui au groupe communiste, ou celui de Guillaume Gontard. Chez les RDSE, Ronan Dantec et Joël Labbé, deux anciens d’EELV, seront aussi de la partie.

La sénatrice Sophie Taillé-Polian (Génération.s) prête à rejoindre un groupe écologiste

La sénatrice Génération.s Sophie Taillé-Polian, actuellement au groupe PS (dont elle était membre), pourrait bien aussi faire le transfert. « Oui, c’est une question qui se pose » confirme la sénatrice du Val-de-Marne, coordinatrice de Génération.s. D’autant que son parti a tenu son université d’été avec EELV. Dans le Doubs, un accord a été trouvé entre les deux formations. L’ancienne députée PS Barbara Romagnan, aujourd’hui à Génération.s, a le soutien d’EELV mais l’espoir de victoire est mince.

« Ce sera intéressant que le Sénat se ré-enchérisse d’un groupe qui puisse porter l’écologie politique, dans une vision intégrée entre environnement, social et démocratie », espère Sophie Taillé-Polian, qui sera « dans les discussions pour tâcher de constituer ce groupe ». Le sénateur apparenté socialiste à la fibre écolo, Bernard Jomier, pourrait aussi se poser la question.

PS et PCF s’accordent… ou pas

Si PS et EELV ont échoué à trouver un accord national, les choses semblent mieux engagées avec le PCF. Du moins selon Patrick Kanner : « Il y a un accord national avec le PCF, qui est encore en train d’être finalisé. C’est un accord gagnant-gagnant, un bon accord ». Le PS a ainsi laissé la première place au PCF dans les Alpes-Maritimes, où le scrutin sera cependant très compliqué, ou la seconde place dans les Côtes-d’Armor. « Dans d’autres départements, ils sont derrière nous, comme dans l’Aisne, le Vaucluse ».

Une présentation que ne partage pas tout à fait la présidente du groupe CRCE (communiste), Eliane Assassi. « Jusqu’à cette heure, n’y a pas d’accord national. Rien n’est finalisé » soutient la sénatrice PCF de Seine-Saint-Denis… « Cela se fait plutôt avec les élus dans les départements, en fonction des rapports de force, des projections ». Eliane Assassi ajoute : « Je n’appellerais pas ça un accord, mais une volonté politique qu’il y ait le plus de sénateurs de gauche élus. Et dans les départements, des constructions politiques se font ». Nuance.

« Tout le monde y va de son jeu de poker menteur. Tu donnes là, je donne là »

Mais « jusqu’au bout, les choses vont s’ajuster » pense la présidente du groupe communiste. Une bonne « négo » se mène jusqu’au dernier moment. « Tout le monde y va de son jeu de poker menteur. Tu donnes là, je donne là. C’est de la construction dans la dentelle. On a passé notre temps à calculer » raconte avec franchise la sénatrice. Des calculs qui peuvent amener à l’union, mais localement : « Là où les socialistes n’ont pas assez de grands électeurs, et où ça ne nous rapporte rien, on regarde pour que nos voix aillent à la liste de gauche ».

Mais même avec les meilleurs experts en carte électorale, les projections ont leur limite, plus qu’avant. Exemple avec les Bouches-du-Rhône, suite à la victoire de la gauche du Printemps marseillais, à Marseille. « Le temps où on mettait tout le monde dans un accord et on votait pour la même liste, c’est fini » selon Eliane Assassi. La faute, ou plutôt grâce à l’élection dans les municipalités de membres de la société civile, moins sensibles aux consignes des partis. « Les sénatoriales, ce sont de vraies campagnes de proximité, il faut aller chercher les voix » met en garde la communiste. De quoi créer quelques petites surprises le soir du 27 septembre.

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