Sommes-nous en train d’assister à la fin des partis ? En tout cas à gauche, ça en prend le chemin. En pleine déliquescence depuis le score historiquement bas de son candidat à la présidentielle, le PS vient de subir une nouvelle journée noire. Hasard du calendrier ou non, certains de ses cadres ont choisi cette journée du 10 mai pour lancer non pas un mais deux « mouvements », transpartisans ». Tandis qu’une procédure d’exclusion à l’encontre de Manuel Valls est en cours devant la commission des conflits du parti.
Benoît Hamon invite à « reconstruire la gauche »
Invité de France Inter, c’est Benoît Hamon qui donne le premier coup de pelle au trou dans lequel risque de s’enterrer le Parti socialiste. Le 1er juillet, il lancera « un mouvement, large, qui s'adressera aux hommes et aux femmes de gauche, citoyens ». « Pour être en situation de penser les suites que nous pouvons donner à ce travail que nous avons commencé lors de la campagne présidentielle, un travail sur ces idées nouvelles » annonce-t-il avant d’ajouter qu’il invitera « des hommes et des femmes qui appartiennent aux partis politiques ou n'y appartiennent pas » à « reconstruire la gauche ». Il précise qu’il ne quitte pas, pour autant, le Parti socialiste.
« Dès demain » un nouveau mouvement au PS
Quelques heures plus tard, c’est dans le journal Le Monde que la création d’un autre mouvement lui aussi transpartisan est annoncé à gauche. Anne Hidalgo, Christiane Taubira, Martine Aubry ou encore le sénateur PS Luc Carvounas et le président PS du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel signent une tribune définissant le (nouveau) « mouvement d’innovation pour une démocratie européenne, écologique et sociale » intitulé « Dès demain ». Comme celui de Benoît Hamon, il ouvre les bras aux personnes issues de la société civile. Yann Arthus-Bertrand, président de la Fondation GoodPlanet et l’humoriste Christophe Alévêque en font, par exemple, partie. « Nous revendiquons la révolution pacifique parce que démocratique, au terme de laquelle ce sont les citoyens engagés qui relèveront à la fois localement et globalement les grands défis auxquels est confrontée l’humanité (…) Il s’agit donc de libérer notre avenir français et européen de la catastrophe environnementale, de la casse sociale, de la faillite démocratique, de l’abandon des valeurs républicaines » indiquent les auteurs.
Interrogé par Public Sénat, le sénateur de PS Paris, David Assouline, l’un des signataires de cette tribune, ajoute que ce mouvement à pour vocation de « reconstituer un projet commun, généreux, européen qui refuse le populisme et ‘le tout dérégulation’ (…) C’est ouvrir un chemin après cette élection présidentielle où beaucoup se sentent orphelins, désorientés, pris dans l’étau de cette fausse alternative ». Toutefois, le sénateur ne ferme pas la porte à un rapprochement avec le futur mouvement de Benoît Hamon. « Je ne vois rien aujourd’hui qui doit être contradictoire entre tous ceux qui veulent reconstruire une espérance de progrès social et écologiste ».
Du côté du candidat malheureux à l’élection présidentielle, l’initiative d’un mouvement transpartisan pour le début de l’été « n’enterre pas le PS mais prépare l’avenir du parti après les législatives » estime Alexis Bachelay, député des Hauts-de-Seine, proche de Benoît Hamon. « Il faudra discuter avec tout le monde mais à ce stade, c’est difficile d’envisager une plateforme programmatique. Celle du PS est une plateforme à minima. Mais on va dire qu’elle a le mérite d’exister ». En effet, les propositions emblématiques du candidat Hamon, tel que le revenu universel, le 49.3 citoyen, ou l’augmentation du Smic à 10% n'y figurent plus.
Et La France insoumise ?
Renouveau démocratique et écologique, préservation des acquis sociaux, implication de la société civile, pour ces deux nouveaux mouvements, il n’aura échappé à personne qu’il y a comme un cousinage avec le programme « L’Avenir en commun » de la France insoumise. « Si ce n’est que Jean-Luc Mélenchon ne veut travailler avec personne et demande la soumission. Nous, nous ne sommes pas dans une démarche sectaire. Nous n’imposons pas une seule tête » tacle Alexis Bachelay.
«Se cacher derrière la personnalité de Jean-Luc Mélenchon, c’est assez feignant et malhonnête » réplique Raquel Garrido, porte-parole de La France Insoumise. « Utiliser le cartel des partis, les accords d’appareils ce n’est pas ce que souhaitent les citoyens. Les 7 millions de Français qui ont voté pour La France insoumise ont voté pour la possibilité de révoquer des élus ou la sortie du nucléaire. Donc tous les élus qu’ils veulent venir nous rejoindre sur la base du programme L’Avenir en commun sont les bienvenues » rappelle-t-elle.
À gauche, on semble avoir intégré que le renouveau passe par le ou plutôt les mouvements. Quant à leur transformation en une véritable force politique, l’issue des élections législatives en donnera la première indication.