Après la victoire d’Emmanuel Macron à l’Élysée, les partis de la gauche abordent les législatives dans un état de division avancée.
Le Parti socialiste joue sa survie
Pris en tenaille entre les candidats de la République en Marche et ceux investis par la France insoumise, le Parti socialiste espère limiter la casse aux élections législatives de juin, après les 6,36% réalisés par Benoît Hamon à la présidentielle. Le PS, qui avait envoyé 280 députés au palais Bourbon en 2012, se rassure publiquement sur les dimensions locales du scrutin, comme l’affirmait Jean-Christophe Cambadélis ce lundi sur France Inter :
« Nous ferons plus dans la plupart des circonscriptions et pour une raison toute simple : c’est qu’il y a une implantation, des députés sortants, il y a des maires, et donc un rapport à l’opinion qui n’est pas obligatoirement le rapport global que nous connaissons dans les sondages. »
Avec environ 400 candidats investis, le PS sera absent dans près de trois circonscriptions sur dix, là où le Front national a réalisé des scores très élevés, mais aussi dans les 49 circonscriptions réservées à EELV dans le cadre de l’accord Jadot-Hamon.
Si Solférino fait campagne au niveau national sur une ligne « autonome » d’une « gauche exigeante », en se montrant mécontent du nouveau gouvernement, la réalité sur le terrain est beaucoup plus contrastée.
Certains candidats, comme Benoît Hamon, se projettent déjà dans la future « opposition ». D’autres, comme les anciennes ministres Marisol Touraine et Myriam El Khomri, se présentent comme des candidats de la « majorité présidentielle ». Selon Jean-Christophe Cambadélis, ils seraient « une petite quinzaine ». Dans l’Essonne, c’est également le cas de Manuel Valls et Malek Boutih, que le PS n’a d’ailleurs pas investis.
D’autres enfin font campagne sans arborer sur leurs affiches le logo le poing à la rose. Dès le lendemain des élections, le PS s’engagera dans un processus de restructuration. Le premier secrétaire n’exclut d’ailleurs pas un changement de nom ou de siège.
Le troisième tour pour la France insoumise
Fort de ses 19,58% en avril, le mouvement de Jean-Luc Mélenchon espère surfer sur ce résultat aux législatives et prendre sa revanche. Présente dans 560 circonscriptions (sur 577), la France insoumise joue clairement le troisième tour de la présidentielle. « M. Macron n’est pas sûr de gagner », a prévenu dimanche sur France 3 Jean-Luc Mélenchon qui considère que le rendez-vous de juin sera un match à trois : entre « la grande coalition PS-droite au milieu », « l’alternative d’extrême-droite » et son mouvement qu’il présente comme « l’alternative humaniste, écologique et sociale ».
Dans cette nouvelle campagne, l’enjeu de Jean-Luc Mélenchon est d’apparaître comme la nouvelle force principale à gauche. « Je ne veux pas affaiblir le PS, je veux le remplacer », avait-il affirmé le 11 mai à Marseille, où il se présentera. Le but est aussi de se présenter comme « l’alternative à Emmanuel Macron », qu’il considère comme le principal adversaire. Hier encore, il considérait :
« M. Mennucci a tort de croire que je viens à Marseille à cause de lui, le PS est quasiment éliminé du second tour dans toutes sortes de circonscriptions […] Ma concurrente, c’est la candidate de M. Macron. »
À défaut d’une victoire en juin, son mouvement endossera la place de premier opposant et espère peser sur l’Assemblée nationale. « À partir du moment où on sera très nombreux, nous la France insoumise, nous exercerons une presse telle sur le PS qu’il sera obligé de passer dans l’opposition », martelait-il dans Dimanche en politique.
Le Parti communiste, inquiet du « calcul dangereux » Jean-Luc Mélenchon
Le Parti communiste, ne digère pas d’avoir été laissé de côté par la France insoumise. « Malgré nos appels à l'unité de candidatures dans le maximum de circonscriptions, la direction nationale de France insoumise nous a opposé un refus de principe. Je le regrette profondément. C'est une faute», a déclaré le secrétaire national du PCF Pierre Laurent lors d’une conférence de presse ce lundi.
Faute d’accord avec Jean-Luc Mélenchon, la place du Colonel-Fabien s’engage dans la majorité des cas seule dans la bataille des législatives. Le PCF présente 452 candidats. Il apporte également son soutien à 72 autres candidats issus du reste de la gauche (EELV, PS ou autres), comme François Ruffin, Isabelle Attard (Nouvelle donne) ou encore Clémentine Autain (Ensemble !).
« Ensemble, ce n’est pas derrière un seul », considérait Pierre Laurent (mercredi sur CNews), qui refuse tout « alignement » derrière le quatrième homme de la présidentielle :
« Je conçois notre capacité à nous unir autrement que sous la forme de l’alignement : Jean-Luc Mélenchon semble penser qu’à lui seul avec la France insoumise il va remplacer absolument tout le monde et qu’ils construiront la seule opposition. C’est un calcul dangereux : les forces de gauche sont diverses. »
La guerre froide entre les deux formations politiques s’est poursuivie la semaine dernière. Après les menaces de poursuites judiciaires à l’encontre des candidats communistes utilisant son image sur les affiches, Jean-Luc Mélenchon a reproché jeudi dans l’Émission politique l’absence de soutien du PCF :
« Nous avons investi dans le cadre de la France insoumise une trentaine de communistes. Êtes-vous capable de me dire où il y a un candidat de la France insoumise soutenu par la direction du Parti communiste ? Non, il n'y en a pas. »
Une accusation qui a piqué au vif le secrétaire national du PCF, qui lui a rappelé l’absence de candidat dans la circonscription de Jean-Luc Mélenchon.
Lors des législatives de 2012, le Front de gauche avait obtenu 10 députés (9 PCF et un du Parti de gauche), loin des 19 récoltés en 2007 (16 communistes et apparentés, et trois du Parti de gauche).
Des accords avec les socialistes et les communistes pour EELV
Europe Écologie-Les Verts présentera eux 459 candidats aux élections législative. En vertu de l'accord signé entre Yannick Jadot et Benoît Hamon avant la présidentielle, le PS soutient 49 candidats écologistes. Le PCF en soutient une quinzaine. Dans la réciprocité, EELV soutient 52 candidats socialistes, 16 communistes et au moins un candidat de La France insoumise, François Ruffin.
Avant l’éclatement de son groupe à l’Assemblée nationale, EELV avait démarré la mandature 2012-2017 avec 18 députés.