La grippe de Hong Kong ou la pandémie oubliée : symbole d’une époque révolue

La grippe de Hong Kong ou la pandémie oubliée : symbole d’une époque révolue

La grippe de Hong Kong, une pandémie oubliée qui fît 36 000 morts en France dans l’indifférence quasi générale, sans rien changer aux habitudes de la population : c’était en 1969, il y a seulement cinquante ans. Mais la situation était-elle comparable avec la Covid-19 ? L’intensité d’une crise sanitaire est-elle corrélée à la gravité d’une épidémie ? Des questions auxquelles tentent de répondre les invités de Jérôme Chapuis, dans l'émission Un Monde en Docs.
Public Sénat

Par Hugo Ruaud

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Samedi 17 octobre, l’état d’urgence sanitaire a été rétabli pour faire face à la seconde vague de Covid-19. Le pays semble paralysé par cette pandémie qui, depuis plusieurs mois, a bousculé nos modes de vie de manière inédite. Mais quelques décennies en arrière, la grippe de Hong Kong, survenue en 1969, avait très durement touché la France dans une indifférence quasi générale. Les chiffres sont révélateurs : 700 morts par million d’habitants en France à l’époque, 477 pour la Covid-19 aujourd’hui. Dans les deux cas, la mortalité fut très élevée. Pourtant, pas de gros titres dans les journaux pour couvrir l’épidémie à l’époque. Chez les hommes politiques, les ministres contaminés se targuaient même de continuer à travailler. Le contraste avec notre façon de percevoir et de lutter contre la Covid-19 est saisissant.

« Il y avait une forme de fatalité »

Pour comprendre cette différence de perception, il faut comparer les deux périodes. « À l’époque, il y avait une forme de fatalité, la maladie et la mort faisaient partie de nos vies » explique le sénateur Bernard Jomier. En cinquante ans, notre perception de la mort a beaucoup changé, et les morts « évitables » sont devenues intolérables, selon Frédéric Keck, anthropologue. Pour lui, tout est une question de perspective historique : « 35 000 morts pour une grippe, vingt-cinq ans après la seconde guerre mondiale, ça ne suscitait pas la même crainte qu’aujourd’hui ». C’est ce qui fait, selon le Sénateur Bernard Jomier, « qu’on n'accepte plus le fait qu’une maladie fasse 30 000 ou 50 000 morts. C’est un progrès. » 

« La crise n’est pas liée au nombre de victimes »

C’est de la perception de l’épidémie que dépendra la crise sanitaire. « La crise n’est pas liée au nombre de victimes. Cela dépend de l’interaction entre une menace perçue comme inquiétante, nouvelle, imprévisible par la population, et la réaction des autorités sanitaires » explique Anne-Claude Crémieux, Professeure en infectiologie à l’hôpital Saint-Louis de Paris. Elle en veut pour preuve la canicule de 2003, qui fît la une des médias, engendra une crise politique, et « fût vécue comme une véritable crise sanitaire ». Alors que de l’autre côté des Alpes, en Italie, « on a su en hiver qu’il y avait eu pratiquement le même nombre de victimes par habitant en France, mais ça n’a pas déclenché de crise » souligne-t-elle. Une notion de perception qui s’avère donc centrale, et qui n’est pas étrangère à la multiplication des moyens d’information et de communication.

Le documentaire "69, année pandémique" est rediffusé ce mardi 22 décembre, à 18h00, suivi du débat "un monde en doc", sur le canal 13 de la TNT.

Retrouvez le débat en intégralité, en replay ici

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