La Nouvelle-Calédonie choisit la France mais le camp indépendantiste progresse

La Nouvelle-Calédonie choisit la France mais le camp indépendantiste progresse

Le Premier ministre Édouard Philippe est arrivé lundi en Nouvelle-Calédonie, où il vient rencontrer les forces politiques, au lendemain d'un...
Public Sénat

Par Cécile AZZARO

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Le Premier ministre Édouard Philippe est arrivé lundi en Nouvelle-Calédonie, où il vient rencontrer les forces politiques, au lendemain d'un référendum d'autodétermination qui a vu la victoire du maintien dans la France, malgré une forte percée des indépendantistes.

Édouard Philippe, qui arrive du Vietnam, doit rencontrer à tour de rôle chaque force politique présente au congrès de Nouvelle-Calédonie.

Il veut poursuivre le dialogue de réconciliation engagé depuis 30 ans après la quasi guerre civile des années 80 entre les Kanak, peuple autochtone du territoire, et les Caldoches, population d'origine européenne, et discuter avec chaque partie de l'avenir de ce territoire stratégique, qui dispose d'importantes réserves de nickel et représente le dernier territoire européen dans la zone suite au Brexit.

La Nouvelle-Calédonie a choisi dimanche de rester dans le giron français avec 56,4% des voix lors d'un référendum d'autodétermination historique, consacrant selon le président Macron une "marque de confiance dans la République".

Mais les indépendantistes (avec 43,6% pour le oui), que les sondages donnaient largement perdants, ont au contraire créé la surprise et conforté leur position, faisant notamment le plein des voix kanak sur la grande terre.

La participation a été massive, avec 80,63 % de votants.

Le chef de gouvernement, dont c'est la deuxième visite sur le Caillou, doit s'exprimer en fin de journée devant la presse (lundi matin à Paris). Auparavant il se rendra dans le nord, pour rencontrer deux figures des indépendantistes, Paul Néaoutyine président de la province nord de la Nouvelle-Calédonie et Daniel Goa, président de l'Union Calédonienne.

Sa visite marque l'attention du gouvernement pour le territoire calédonien, après l'intervention dimanche du président de la République Emmanuel Macron, qui a dit dans une allocution télévisée son "immense fierté que nous ayons passé ensemble cette étape historique" et que "la majorité des Calédoniens ait choisi la France".

Le chef de l'Etat a ajouté qu'il n'y avait désormais "pas d'autre chemin que celui du dialogue" et a invité "chacun à se tourner vers l'avenir".

- "Préparer la mariée" -

Nouvelle-Calédonie: référendum
Résultats définitifs du référendum sur l'indépendance en Nouvelle-Calédonie
AFP

Fort de leur score, les partisans d'une rupture avec la métropole ont dès dimanche soir réaffirmé leur volonté d'aller jusqu'au bout de l'accord de Nouméa (1998) et de demander l'organisation de deux autres référendums dans les quatre ans à venir, comme prévu par l'accord.

Pour Louis Mapou, chef du groupe UNI-FLNKS au Congrès, "les indépendantistes sont encore plus motivés qu'avant pour demander le deuxième et troisième référendum. Dès demain, on va préparer la mariée pour qu'elle soit encore plus belle en 2020", a-t-il dit à l'AFP.

"On est à deux doigts de la victoire, et il nous reste deux consultations à venir", a aussi souligné Alosio Sako, président du rassemblement démocratique océanien (FLNKS).

De fait, l'ambiance était plus festive dimanche soir chez les perdants que chez les vainqueurs. "Ce sont ceux qui ont perdu qui font la fête", a constaté Philippe Gomès, leader du principal parti non indépendantiste, Calédonie Ensemble (droite modérée) à 01H00 du matin dans un QG désert.

Nouvelle-Calédonie
Le vote du référendum sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie par communes
AFP

Les trois partis loyalistes, très divisés, avaient mis en avant la protection qu'apporte la France et son 1,3 milliard d'euros d'aides annuelles, et espéraient qu'une large victoire éloigne la perspective de nouveaux référendums.

Philippe Michel, secrétaire général de Calédonie Ensemble, "continue de penser que c'est mieux si on peut se passer d'un deuxième et d'un troisième référendum", mais qu'il ne s'opposerait pas à l'accord de Nouméa, qui est "constitutionnalisé".

"Est-ce que la Nouvelle-Calédonie a vraiment quatre ans à perdre ?", a de son côté demandé Sonia Backès, présidente du groupe Les Républicains au Congrès. Elle plaide pour "trouver une solution et remplacer ce deuxième et troisième référendum" afin de "stabiliser enfin la Nouvelle-Calédonie".

- Incidents -

A la mi-journée, la participation dans le référendum pour ou contre l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie était largement supérieure à celle pour les élections provinciales de 2014 à la même heure
A la mi-journée, la participation dans le référendum pour ou contre l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie était largement supérieure à celle pour les élections provinciales de 2014 à la même heure
AFP

Selon Pierre-Christophe Pantz, docteur en géopolitique, il est "clair qu'on ne discute pas de la même manière quand on fait 43% plutôt que 30%". "Cela va forcer les non-indépendantistes à revoir leur copie", ajoute l'expert.

Le référendum de dimanche était destiné à poursuivre le travail de réconciliation, entamé avec les accords de Matignon de 1988, entre les Kanak et les Caldoches. Ces accords avaient été signés après les violences des années 1980, qui avaient culminé avec la prise d'otages et l'assaut de la grotte d'Ouvéa en mai 1988 (25 morts).

La soirée a été émaillée d'une série d'incidents, dont le plus significatif a été l'incendie d'une ancienne animalerie en plein centre de Nouméa, sans qu'il soit pour l'heure possible de faire le lien avec un acte criminel ou avec le référendum.

Dans les quartiers nord populaires de Nouméa, plusieurs voitures ont également été brûlées et des "faits de caillassage" ont été signalés.

En amont du scrutin, les autorités craignaient qu'une victoire du non puisse inciter une partie de la jeunesse kanak, marginalisée, à des débordements, alors que les inégalités entre les différentes communautés restent criantes.

Dans la même thématique

Paris: Conference Bruno Retailleau Salon Made in France
8min

Politique

Elections sénatoriales 2023 : le groupe LR mise sur une « stabilité », sans exclure une « petite érosion »

Le groupe LR n’anticipe pas de grands changements à l’issue du scrutin sénatorial dimanche. « J’attends que la majorité sénatoriale soit confortée », affirme Bruno Retailleau, président du groupe LR. « Nos divisions sont souvent délétères. C’est souvent ce qui nous fait perdre quelques sièges », met en garde le sénateur, qui doit faire face aussi à « l’émergence d’Horizons ».

Le

Paris Matignon consultations
9min

Politique

Elections sénatoriales 2023 : l’Union centriste, le groupe pivot de la majorité sénatoriale

C’est le groupe faiseur de roi. L’union centriste, sans qui les LR n’ont pas la majorité au Sénat, mise globalement sur une stabilité pour les sénatoriales. Alliés des LR à la Haute assemblée, certains de ses membres soutiennent néanmoins Emmanuel Macron, au risque pour le groupe de jouer parfois le grand écart. Mais son président Hervé Marseille sait veiller sur « la marmite centriste » par son habileté politique.

Le

La Nouvelle-Calédonie choisit la France mais le camp indépendantiste progresse
5min

Politique

Sénatoriales 2023 : dans le Lot, la succession de Jean-Claude Requier rebat les cartes

Dans le Lot, neuf candidats sont sur la ligne de départ. Dans ce département rural, qui élit deux sénateurs au scrutin majoritaire, la bataille se joue essentiellement entre socialistes et radicaux. A gauche, l’élection de Jean-Marc Vayssouze-Faure semble assurée. Chez les radicaux en revanche, plusieurs candidats se disputent la succession de Jean-Claude Requier, président du groupe au Sénat.

Le