La tension monte au Sénat lors d’un débat sur le port du voile par les accompagnateurs de sorties scolaires
Alors que la majorité sénatoriale a adopté la proposition de loi de Max Brisson sur l’Ecole, c’est l’obligation de neutralité pour les accompagnateurs de sortie scolaire qui a occasionné les débats les plus houleux. La droite a accusé la gauche d’avoir abandonné la laïcité, tandis que le sénateur écologiste Thomas Dossus a fait allusion au « petit fumet de racisme » qui entourerait les propositions de la droite sur le sujet.

La tension monte au Sénat lors d’un débat sur le port du voile par les accompagnateurs de sorties scolaires

Alors que la majorité sénatoriale a adopté la proposition de loi de Max Brisson sur l’Ecole, c’est l’obligation de neutralité pour les accompagnateurs de sortie scolaire qui a occasionné les débats les plus houleux. La droite a accusé la gauche d’avoir abandonné la laïcité, tandis que le sénateur écologiste Thomas Dossus a fait allusion au « petit fumet de racisme » qui entourerait les propositions de la droite sur le sujet.
Louis Mollier-Sabet

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Il est un peu plus d’une heure du matin quand le ton monte au Sénat, lors de l’examen d’une proposition de loi de Max Brisson sur « l’École de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité. » Si l’auteur LR de la proposition de loi s’attendait à un débat « clivant », mais « noble », sur des sujets aussi brûlants pour les connaisseurs de l’Education nationale que l’autonomie des établissements, il met aussi en cause « quelques dérapages et propos un peu insupportables, parce qu’il n’y a pas de racistes sur ces bancs. »

« C’est la 4ème fois qu’on en débat en 4 ans, cela devient une véritable obsession »

En cause, l’intervention de Thomas Dossus (voir la vidéo ci-dessus), accusant la droite sénatoriale « d’instrumentaliser une nouvelle fois la laïcité pour discriminer nos compatriotes de confession musulmane avec ce petit fumet de racisme permanent qui entoure vos propositions pour la laïcité. » Le sénateur écologiste s’opposait à la proposition de la majorité sénatoriale de rendre la neutralité religieuse qui incombe aux dépositaires du service public aux « personnes participant au service public de l’éducation », et notamment les accompagnateurs et accompagnatrices de sorties scolaires. Un serpent de mer s’il en est des débats sur l’éducation et la laïcité au Sénat, comme l’a fait remarquer la gauche. « Avec cet article qui dénature le principe de neutralité, c’est la quatrième attaque de la droite sénatoriale en quatre ans », a notamment fustigé le sénateur socialiste Yan Chantrel, dénonçant une « véritable obsession. »

Et si le débat revient aussi souvent à la Chambre haute, c’est parce que la jurisprudence du Conseil d’Etat a toujours estimé que les parents accompagnateurs n’exerçaient pas de mission de service public et n’étaient donc pas soumis aux obligations de neutralité des agents du service public. « Ce débat, nous l’avons eu pendant plus d’une dizaine d’heures, nous connaissons parfaitement vos arguments et vous aussi. La seule différence, c’est que le droit est de notre côté, ne voulant pas l’accepter vous décidez de rejouer la scène comme si c’était la seule issue. Vous ne changerez pas les conclusions du Conseil d’Etat : les parents sont des collaborateurs occasionnels du service public », a notamment tancé la sénatrice socialiste, Sylvie Robert. « Il faut que ces activités soient encadrées par des fonctionnaires, ce sera beaucoup plus clair pour tout le monde », a ajouté Pierre Ouzoulias pour le groupe communiste. « Cette disposition nie une réalité grandissante dans notre territoire : dans certaines classes vous priverez certains élèves de sorties scolaires », a enfin ajouté le sénateur radical Henri Cabanel.

« Un entrisme rampant qui fragilise le cadre scolaire »

Du côté de la droite sénatoriale, on assume de revenir à la charge. « Nous sommes constants parce que nous sommes obligés à nous suppléer à une gauche qui ne défend plus la laïcité dans le creuset même où elle a défendu la République, nous en sommes réduits à vous remplacer », a répondu Max Brisson, sénateur LR auteur de la proposition de loi. Sa collègue du groupe LR, Jacqueline Eustache-Brinio a vu dans cette disposition qu’elle avait fait adopter dans une proposition de loi en octobre 2019 un moyen de défendre « une laïcité de plus en plus remise en cause », notamment par le port de plus en plus fréquent d’après elle de kamis et d’abayas en contexte scolaire. La sénatrice du Val d’Oise a ainsi souhaité attirer l’attention du gouvernement sur « cet entrisme rampant qui fragilise le cadre scolaire », en fustigeant une « absence de clarté et de fermeté » du ministre de l’Education nationale, qui s’est rangé derrière les arguments de la gauche en séance.

D’un point de vue juridique, Max Brisson met en avant le statut particulier de l’Ecole en matière de régulation de ports de signes religieux : « L’Ecole a une exigence de neutralité supplémentaire depuis longtemps. La neutralité s’impose aux usagers, aux élèves, c’est la spécificité de la laïcité à l’Ecole. C’est ce qui la différencie de beaucoup d’autres services publics. Vous avez abandonné un héritage qui était noble, nous le conserverons. À l’Ecole, la neutralité s’impose aux agents, aux usagers et nous souhaitons qu’elle s’impose à celles et ceux qui font la classe, puisqu’une sortie scolaire n’a de raison d’être que pédagogique. » La proposition de loi ayant été adoptée, elle devra maintenant être mise à l’agenda de l’Assemble nationale, puis adoptée par les députés pour entrer en vigueur. Un cheminement qui n’a jamais été entamé pour les précédentes dispositions sur le port du voile lors de sorties scolaires adoptées par le Sénat ces dernières années.

Partager cet article

Dans la même thématique

La tension monte au Sénat lors d’un débat sur le port du voile par les accompagnateurs de sorties scolaires
3min

Politique

Parlement européen : « la droite traditionnelle pro-européenne joue avec l’extrême droite » pour Javier Moreno Sanchez   

« Un discours ferme et rassembleur ». Pour la députée centriste du groupe Renew, Fabienne Keller, les propos tenus par Ursula von der Leyen sont « absolument essentiels en ce moment historique où nous sommes en tension maximum avec Vladimir Poutine ». La présidente de l’exécutif européen a en effet annoncé une esquisse de nouvelles sanctions contre la Russie. Dans ce contexte, l’eurodéputée française estime que « la défense que l’on n’a pas voulue dans les années 50, s’impose à nous » désormais.   « C’est un peu tard mais elle commence à réagir »   Concernant le conflit israélo-palestinien, l’eurodéputé espagnol Javier Moreno Sanchez espère que qu’Ursula von der Leyen ira plus loin dans la condamnation des actes commis par l’Etat hébreu. « Ce que nous lui demandons, c’est qu’elle agisse avec la même fermeté dans les deux guerres qu’on a à nos portes ». A la surprise générale, la présidente de la Commission a annoncé vouloir suspendre une partie de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, mais pour le social-démocrate, c’est l’ensemble de ce texte qui doit remis en cause.     Mais pour l’eurodéputé espagnol, l’urgence est de ne pas revenir sur les grands textes des précédentes mandatures de la Commission. Qu’il s’agisse du pacte migratoire ou des mesures écologiques, « il ne faut pas qu’Ursula von der Leyen démonte les propositions qu’elle a faites (…) on ne savait pas que la droite traditionnelle pro-européenne allait jouer avec l’extrême droite ».  « Ce n’est pas une Europe sociale, mais une Europe militariste »   Le groupe des Conservateurs et réformistes est nettement plus critique vis-à-vis du grand oral de la présidente de la commission. L’élu roumain Gheorghe Piperea souhaite la démission de la commissaire allemande. En juillet, il faisait déjà partie de ceux qui avait voté une motion de censure à l’encontre de cette dernière. Pour cet eurodéputé conservateur l’Union européenne nourrirait le conflit ukrainien en multipliant ses aides, notamment militaires. Ce député a par ailleurs dénoncé l’accord commercial conclu « sur un terrain de golf en Ecosse » entre Ursula von der Leyen et Donald Trump, le qualifiant « d’échec ».    Retrouver l’intégralité de l’émission en intégralité ici  

Le

Avis d’arret de travail Illustration
9min

Politique

Report de congés pour cause d’arrêt maladie : la délégation aux entreprises du Sénat saisit Sébastien Lecornu face à une décision « terrible » pour les PME

« Je saisis par courrier le premier ministre pour qu’une action au sommet de l’Etat soit engagée dans les plus brefs délais auprès des instances européennes », annonce à publicsenat.fr le président de la délégation aux entreprises du Sénat, le sénateur LR Olivier Rietmann, alors qu’un salarié malade pendant ses vacances pourra reporter ses congés, selon une décision de la Cour de cassation.

Le