Anne Hidalgo dévoile son programme centré sur la revalorisation du travail et l’écologie

Anne Hidalgo dévoile son programme centré sur la revalorisation du travail et l’écologie

En difficulté dans les sondages, la candidate socialiste a présenté ce 13 janvier à Paris les 70 propositions de son projet présidentiel. Elle espère donner le véritable coup d’envoi de sa campagne.
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La présentation de son programme s’est faite à Paris, dans un ancien centre tri postal de la SNCF reconverti en lieu culturel branché. A moins de trois mois du premier tour de la présidentielle, Anne Hidalgo espère elle aussi redonner de la même façon du lustre à sa candidature. Après un début d’année marqué par des sondages inquiétants et l’échec d’un processus de rassemblement de la gauche, la maire de Paris veut ouvrir un nouveau chapitre dans cette course à la présidentielle. « La vraie campagne, elle commence maintenant, et personne ne peut prévoir quel sera le résultat. Les campagnes présidentielles réservent toujours des surprises », veut-elle croire.

En attendant, l’élue parisienne reste distancée par Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) et Yannick Jadot (Europe Ecologie-Les Verts), mais elle renvoie chacun dans le même étiage : « Personne n’a réussi à créer un quelconque effet dans les mesures d’opinion. » Les vrais coups sont dirigés contre le président de la République, Emmanuel Macron. « Quelle France voulons-nous ? Certainement pas la France d’Emmanuel Macron. » Face à un chef de l’Etat accusé de « négliger ceux qui ne sont rien », Anne Hidalgo entend « réunir la France dans la justice ».

Hausse du Smic de 15 %

Et « rendre justice », commence avant tout selon la maire de Paris par les « travailleuses et les travailleurs ». Pour la première de ses 70 propositions, elle a choisi d’y inscrire une revalorisation du Smic de 200 euros net (15 %), et une conférence sur les salaires avec les partenaires sociaux. Le coup de pouce rappelle celui de François Mitterrand en 1981, avec une augmentation à l’époque de 10 %. Cette mesure « phare » serait mise en œuvre en début de mandat. « La gauche, c’est le parti du travail, de sa juste rémunération », insiste-t-elle.

Si la candidate socialiste imagine de nouveaux droits sociaux, comme un « minimum jeunesse » ou un capital de 5 000 euros versés aux Français à leur 18e anniversaire, son discours sur les fruits du travail tranche avec la stratégie suivie en 2017 par Benoît Hamon. « C’est un discours très différent de celui d’un autre candidat, qui avait porté les couleurs socialistes il y a cinq ans, au travers du revenu minimum », juge Patrick Kanner, le président du groupe socialiste au Sénat. La seconde proposition ? L’écart entre les rémunérations dans les entreprises ne pourrait être supérieur à 20, une mesure déjà défendue par Jean-Luc Mélenchon dans le passé.

Toujours sur le pouvoir d’achat, Anne Hidalgo réitère sa promesse d’augmenter le salaire des enseignants « au niveau de celui des cadres ». « La grève de ce jour, qui se base sur cette déconsidération, est aussi un cri d’alarme », observe la socialiste.

« Tiers payant » pour la rénovation des logements

Deuxième urgence à traiter, selon le programme : l’écologie. La maire de Paris envisage « une très forte intervention publique » et une « planification » pour accélérer la transition écologique. Celle-ci passera notamment par un vaste programme de rénovation des passoires thermiques. La Caisse des Dépôts et Consignations serait chargée d’avancer l’argent nécessaire au paiement des travaux. La puissance publique se rembourserait ensuite, à travers les droits de mutation, au moment de la revente du bien immobilier. Son ampleur dépendrait du « niveau des revenus », ce qui n’empêche pas la candidate d’évoquer un « tiers payant rénovation », à l’image de la Sécurité sociale.

Parmi les autres objectifs environnementaux de sa feuille de route, Anne Hidalgo promet une TVA réduite pour les billets de train - un combat que les parlementaires PS ont déjà engagé - ou encore un seuil ambitieux de 100 % d’énergies renouvelables. « Je ne construirai pas de nouveaux réacteurs », tranche la socialiste, qui ne voit le nucléaire uniquement comme une « transition ». Autre engagement : conditionner « toutes » les aides publiques adressées en entreprises à des critères sociaux et environnementaux.

S’agissant de la fiscalité écologique, Anne Hidalgo s’engage sur des prélèvements « justes ». Les plus fortunés seront davantage mis à contribution, à travers un ISF (Impôt de solidarité sur la Fortune) climatique. Trois ans après le mouvement des Gilets Jaunes qui s’étaient opposés aux hausses des taxes sur le carburant, la candidate insiste sur la nécessité de faire preuve de transparence dans le fléchage de la fiscalité écologique. 50 % devront financer des actions liées à la transition énergétique, quand l’autre moitié viendra appuyer les ménages les plus fragiles avec des aides sociales.

Une revendication de taille des Gilets Jaunes se retrouve également dans le programme : la création d’un référendum d’initiative citoyenne (RIC). La candidate ne se risque pas pour le moment à préciser un seuil dans ses propositions, mais elle s’engage à abaisser le seuil nécessaire au référendum d’initiative partagée. La barre est haute actuellement, 4,5 millions de signatures d’électeurs, elle n’a jamais été franchie pour les initiatives tentées (référendum sur la privatisation d’Aéroports de Paris ou encore sur la situation de l’hôpital). Le programme présidentiel d’Anne Hidalgo suggère de ramener cette barre à un million de soutiens. « Pour couper l’herbe sous le pied des populistes, il faut donner des droits nouveaux, comme la démocratie directe », estime-t-elle.

« Je veux mettre fin à cette monarchie républicaine qui étouffe »

Des propositions portées depuis longtemps par les socialistes, comme le droit de vote à 16 ans ou le droit de vote des étrangers aux élections locales, viennent compléter ce chapitre démocratique. La réforme institutionnelle ne s’arrêterait pas là. Anne Hidalgo entend recentrer la présidence de la République uniquement sur les « grandes orientations ». « Elle doit cesser de se mêler de tout […] Je veux mettre fin à cette monarchie républicaine qui étouffe ».

La maire de Paris se prononce pour une partie de proportionnelle substantielle aux législatives, à l’allemande (probablement un tiers) ainsi que pour un renforcement des droits du Parlement. Sous sa présidence, le Parlement gagnerait la maîtrise de son ordre du jour et verrait disparaître certains freins à son pouvoir d’amendement, notamment sur les textes budgétaires.

Les mesures sociétales, bien qu’elles ne soient pas placées en première ligne du programme, ne sont pas en reste. Dans ses « 70 propositions pour la France » figurent également l’accès à des soins palliatifs et le droit d’accéder à « une aide active à mourir ». Le texte serait à l’agenda du Parlement dans les « premiers mois » du quinquennat. La maire de Paris veut s'engager contre les violences faites aux femmes et contre les féminicides, en promettant un budget d’un milliard d’euros à ces politiques.

Selon son équipe en charge de l’évaluation du projet, l’ensemble des nouvelles propositions se chiffrerait à 50 milliards d’euros. « C’est un système qui est équilibré », assure Claude Raynal, président PS de la commission des finances du Sénat. En face de ces dépenses se trouvent 50 milliards d’euros. Le sénateur évoque un alourdissement de la taxation des plus grosses successions, et les revenus tirés de l’ISF climatique. « Ça été fait avec sérieux », appuie Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du Budget sous François Hollande.

Avec l’ossature du programme, les soutiens d’Anne Hidalgo veulent désormais peser dans le débat à gauche. « La candidate a un projet complet, détaillé et financé », se satisfait Rémi Féraud, sénateur de Paris. « Peut-être qu’on sort de la pré-campagne, la question des projets va devenir essentielle. » Anne Hidalgo, qui prépare un meeting devant un millier de personnes le 22 janvier à Aubervilliers, dans la banlieue populaire du nord de Paris, promet de faire le service après-vente ses propositions « sereinement ». « Qu’on ne compte pas sur moi pour la cacophonie médiatique ».

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