Lancement des emplois francs : les sénateurs sont partagés
Le gouvernement souhaite dynamiser l’embauche des habitants des quartiers prioritaires, et relance à Clichy-sous-Bois le dispositif des emplois francs. Les sénateurs gardent de cette mesure, un goût d’inachevé.

Lancement des emplois francs : les sénateurs sont partagés

Le gouvernement souhaite dynamiser l’embauche des habitants des quartiers prioritaires, et relance à Clichy-sous-Bois le dispositif des emplois francs. Les sénateurs gardent de cette mesure, un goût d’inachevé.
Public Sénat

Par Maud Larivière

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Le constat est éloquent : 25% de chômage dans les quartiers prioritaires en 2016, selon l’Observatoire national de la politique de la ville (ONPV), contre 10% pour l’ensemble de la France. Créés comme un moyen de lutte contre la discrimination, les emplois francs ont déjà été expérimentés sous le quinquennat Hollande, mais abandonnés en 2014. Le Président de la République affirme avoir retenu les leçons de ce ratage.

Qu’est-ce qu’un emploi franc ?

Les emplois francs sont des emplois qui bénéficient d’une aide de l’État pour l’embauche, par une entreprise, d’un habitant des quartiers prioritaires de la politique de la ville.

L’expérience d’un dispositif proche des emplois francs avait été un échec sous la présidence Hollande. Prévue sur deux ans, de 2013 à 2015, la mesure avait pris fin à mi-parcours. Par ailleurs, alors que le gouvernement attendait la création de 2 000 emplois à la fin de la première année, seulement 250 personnes avaient été embauchées en 2014.  Notamment mise en cause, l’accumulation des critères d’éligibilité à ces emplois limitait sérieusement les embauches.

Ce que contient le nouveau dispositif

Les emplois francs, une des promesses de campagne d’Emmanuel Macron, ont un objectif clair : abaisser le chômage dans les quartiers sensibles qui pâtissent d’une mauvaise image.

Le dispositif est simplifié : tous les demandeurs d’emploi pourront bénéficier de cette mesure, à condition d’habiter l’un des 194 quartiers prioritaires qui le testent. Les entreprises qui recrutent toucheront une prime : 5 000 euros sur deux ans pour un CDD de plus de six mois et 15 000 euros sur trois ans pour un CDI. Le gouvernement table sur 150 000 emplois d’ici à 2019 et budgétise le projet expérimental à hauteur de 11.7 millions d’euros pour l’année 2018. Martine Berthet, sénatrice Auvergne-Rhône-Alpes, voit d’un bon œil les changements apportés, et particulièrement la fin des nombreuses « obligations » que contenait l’ancienne mesure (être un demandeur d’emploi de moins de 30 ans, résider depuis 6 mois en zone urbaine sensible, faire état d’une durée minimum de 12 mois de recherche d’emploi au cours des 18 derniers mois…).Fabien Gay, sénateur communiste de Seine-Saint-Denis, ne voit pas vraiment d’évolutions conséquentes : « C’est la même logique libérale » juge-t-il. Sophie Primas, sénatrice LR des Yvelines, reste sceptique : « On a déjà testé ce genre de dispositifs » rappelle-t-elle, tout en reconnaissant les quelques modifications, avant de déclarer : « Je pense qu’il vaut mieux se concentrer sur la formation ».

La première phase d’expérimentation des emplois francs est effective depuis le 1er avril 2018 et concerne sept territoires : toute la Seine-Saint-Denis, une partie du Val d'Oise et de l'Essonne et des agglomérations de Lille, Angers et Marseille. Martine Berthet, sénatrice LR, estime que ce dispositif est « une bonne chose sur le principe » et « bienvenu », mais émet néanmoins un bémol. « J’aurais souhaité que cette mesure soit étendue à l’ensemble des quartiers prioritaires, et non pas seulement aux zones plus urbaines ». La sénatrice rappelle que les difficultés sociales ne concernent pas exclusivement les grandes agglomérations, mais également les secteurs plus ruraux. Fabien Gay est quant à lui très « dubitatif » : « C’est encore un dispositif dérogatoire lancé en grande pompe en Seine-Saint-Denis » s’exclame-t-il. Selon lui, le problème « de fond » du chômage ne sera pas réglé de cette manière.

Cependant le sénateur ne « jette pas totalement aux orties » ce dispositif, et espère qu’il pourra « favoriser l’accès au premier emploi » pour certaines personnes. Pascal Savoldelli, sénateur communiste du Val-de-Marne est plus tranché : « c’est une nouvelle fois un cadeau fait aux entreprises » évalue-t-il.

 

 

 

Partager cet article

Dans la même thématique

Lancement des emplois francs : les sénateurs sont partagés
3min

Politique

Congrès du PS : « le Parti socialiste devrait prendre ses distances » avec les propos de Jérôme Guedj sur Jean-Luc Mélenchon, estime Éric Coquerel

Invité de la matinale de Public Sénat, le député (LFI) et président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale a réagi à la déclaration de Jérôme Guedj sur Jean-Luc Mélenchon lors du Congrès du PS, le traitant de « salopard antisémite ». Éric Coquerel et la France insoumise demandent au Parti socialiste de « prendre ses distances » avec cette déclaration.

Le

Lancement des emplois francs : les sénateurs sont partagés
3min

Politique

Brice Teinturier : « Il n'y a plus de débat en France, il y a de l'invective »

Lors de ses vœux, le Président a annoncé son souhait de voir les Français « trancher » sur « des sujets déterminants », ce qui laisse supposer que le chef de l'État envisage un retour au référendum. Néanmoins, les sujets sur lesquels les Français souhaitent trancher sont nombreux, pouvoir d'achat, fin de vie… Le référendum recolle-t-il vraiment les Français à la politique ? Invités de l’émission spéciale Dissolution, un an après, Brice Teinturier, Anne Levade, Laure Salvaing et David Djaïz tentent d'y répondre.

Le