Après les marches contre l’antisémitisme de dimanche qui ont réuni 182 000 personnes partout en France, Raquel Garrido, la députée insoumise de Seine-Saint-Denis a regretté la présence de l’extrême droite dans le cortège parisien. Le président du Sénat Gérard Larcher et la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet avaient appelé à « une marche civique » ce qui relève d’une « grande naïveté » selon Raquel Garrido : « Le citoyen Eric Zemmour, la citoyenne Marine Le Pen, ce ne sont pas des forces politiques anodines. Elles ont pour fonction de faire développer le regard xénophobe dans la société ».
Malgré la position de la France insoumise (LFI) de ne pas participer à la manifestation appelée par les présidents des deux chambres du Parlement, plusieurs députés du mouvement ont participé à des rassemblements. Raquel Garrido était, par exemple, à Strasbourg avec ses collègues députés François Ruffin, Clémentine Autain et Alexis Corbière. L’élue de Seine-Saint-Denis dénonce les mots employés par Jean-Luc Mélenchon, fondateur de la France insoumise, qui a estimé que « toute la droite et l’extrême droite pourtant unies ont échoué à reproduire les mobilisations générales du passé. » « On voulait quoi ? Que les gens n’aillent pas manifester contre l’antisémitisme ? Ça n’a pas de sens, nous sommes les tenants de ce fil qui nous différencie de l’extrême droite ! »
« Il y a besoin d’un sursaut éthique » à la direction de LFI
Son désaccord avec les instances dirigeantes de la France insoumise porte aussi sur le sort réservé à son collègue David Guiraud. Le député du Nord a créé la polémique lors d’une conférence en Tunisie vendredi 10 novembre en compagnie de l’ancien militant insoumis Taha Bouhafs et de la militante pro-palestinienne Rima Hassan. Sur scène, il avait affirmé que « chaque accusation d’Israël est une confession », avant d’expliquer que certains des crimes imputés au Hamas avaient été commis, de la même manière, par Israël dans le passé. « Ce sont des erreurs historiques et un discours profondément inacceptable », regrette Raquel Garrido.
L’élu de Roubaix ne sera pas sanctionné par LFI qui soutient celui qui est aussi son porte-parole. « Il y a besoin d’un sursaut éthique. La boussole de la direction de LFI est déboussolée », juge Raquel Garrido. Elle appelle les dirigeants du mouvement dont Manuel Bompard est le coordinateur, à faire son bilan, un an après sa prise de fonction : « Objectivement leur bilan est mauvais et moi j’ai une gêne par rapport à la position prise par la direction. »
Sanction contre Raquel Garrido
Cette gêne exprimée ces derniers mois par Raquel Garrido lui a valu une sanction par le bureau de LFI à l’Assemblée nationale. La députée n’a plus le droit pendant quatre mois de représenter son groupe en commission et dans l’hémicycle. « C’est une procédure opaque qui n’a été transmise à personne », indique la députée qui explique qu’elle a été sanctionnée pour « des désaccords politiques, des expressions publiques ». Selon elle, sa sanction entache la crédibilité de LFI : « Tous les jours, nous dénonçons les opacités et les arbitraires dans les procédures », indique-t-elle, en prenant les exemples de l’utilisation du choix du véhicule législatif pendant la réforme des retraites. « Si nous faisons la même chose chez nous, nous perdons toute crédibilité à les dénoncer », tranche-t-elle.
Appel à continuer la Nupes au-delà des directions de partis
Malgré les divisions, Raquel Garrido estime toujours que la Nupes est la solution pour faire gagner la gauche à l’élection présidentielle de 2027. L’union entre LFI, le Parti socialiste (PS), les Ecologistes et le Parti communiste (PCF) pour les élections législatives de juin 2022 est tout de même régulièrement contestée par ses membres. Les Ecologistes ont souhaité établir leur propre liste aux élections européennes, tout comme le PCF dont le patron Fabien Roussel affirme que l’union est « enterrée ». De leur côté, les socialistes ont adopté un moratoire sur leur participation à la Nupes après que LFI n’a pas qualifié le Hamas d’organisation terroriste.
« Tous les états-majors sont en échec, mais nous les députés, nous sommes élus par des citoyens, pas nos directions, appuie Raquel Garrido. Nous ne sommes pas là pour faire de la décoration autour de gens qui veulent s’entredéchirer », martèle la députée de Seine-Saint-Denis pour qui l’alliance est une nécessité à gauche : « La thèse des deux gauches irréconciliables, c’est celle qui donne les clés du camion à l’extrême droite et aux macronistes ».