« La seule issue positive du Brexit, ce sera la refondation de l’Europe », assure Jean-Pierre Raffarin (voir vidéo ci-dessus). Le sénateur Les Républicains brandit fièrement l’épais rapport intitulé « Relancer l’Europe : retrouver l’esprit de Rome » (à lire sur le site du Sénat), fruit du travail conjoint de la commission des affaires étrangères du Sénat, dont il est le président, et de celle des affaires européennes, dirigée par Jean Bizet (LR).
La feuille de route des deux sénateurs avoisine les 400 pages. « Le Brexit est un sujet difficile et dangereux, prévient Jean-Pierre Raffarin. Mais c’est une opportunité historique pour refonder l’Europe ». L’ancien Premier ministre précise ensuite les trois axes autour desquels s’articule la « nouvelle énergie européenne » qu’il propose avec Jean Bizet : puissance, compétitivité et lisibilité.
Créer une Europe de la défense
« La guerre gronde à la périphérie de l’Europe et celle-ci est impuissante », alerte le président de la commission des affaires étrangères. Selon lui, il faut créer une « Europe de la défense » et avoir une réelle « dynamique intergouvernementale sur ce sujet », indépendante de l’OTAN. Un projet auquel le Royaume-Uni s’oppose depuis plusieurs années, comme c’est le cas pour la proposition de moratoire sur l’élargissement de l’Union européenne, qui figure également dans le rapport des sénateurs.
La crise migratoire est aussi au nombre des inquiétudes du groupe de suivi sur le retrait du Royaume-Uni et la refondation de l’Union européenne. Jean-Pierre Raffarin et Jean Bizet estiment en effet qu’il faut « refonder le fonctionnement de l’espace Schengen », dont les Britanniques ne font pas partie (ils bénéficient d’un statut particulier).
« On ne peut pas se permettre d’attendre »
Finalement, la majorité des préconisations des sénateurs aurait fortement déplu au Royaume-Uni s’il n’avait pas décidé de sortir de l’Union. Cela se confirme une fois encore lorsque Jean Bizet évoque la nécessité de « mettre l’accent sur le marché unique », dont la Première ministre Theresa May a annoncé au début de l’année qu’elle voulait en sortir.
« On ne peut pas se permettre d’attendre certains pays qui ne sont pas prêts sur tel ou tel projet », affirme Jean Bizet. Pour le président de la commission des affaires européennes, le Brexit est l’occasion de remettre « cohésion et solidarité » au cœur du projet européen. Et de confirmer la position de leader du couple franco-allemand : « La méthode, on ne va pas la réinventer : il faut conjuguer l’inventivité française et la rigueur allemande. » Exit donc le Royaume-Uni.
Jean Bizet : "L'Europe doit reprendre la main sur le numérique"
Europe de la défense, moratoire sur l’élargissement de l’Union, ou encore protection des données et harmonisation fiscale et sociale : les propositions du rapport sont multiples, mais pas nouvelles. La plupart sont même de vieux « serpents de mer » que l’Union n’a jusqu’ici pas réussi à mettre en place. Jean Bizet insiste donc sur le numérique : « L’Europe doit reprendre la main » (voir vidéo ci-dessus). « Pour une fois, c’est une politique neuve », admet-il. Reste à savoir si la proposition ne finira pas, elle aussi, en vieux serpent de mer.