Une semaine après l’agression d’Yvan Colonna par un codétenu à la maison centrale d’Arles, la situation est toujours tendue en Corse. Les manifestations, notamment universitaires et lycéennes, continuent, alors que Jean Castex a décidé hier de lever le statut de « détenu particulièrement surveillé » (DPS) qui avait empêché Yvan Colonna d’être « rapproché » en Corse. Un geste symbolique que le sénateur LREM-RDPI Alain Richard trouve « normal, vu la responsabilité du système pénitentiaire » : « C’est une réévaluation après 20 ans de détention. L’agression justifie que le gouvernement revoit la situation et donne la perspective d’obtenir un rapprochement. Si le dossier de détenu de Colonna avait été négatif le gouvernement aurait dû maintenir la décision d’éloignement. Dans son cas à lui il n’y avait plus de raison de maintenir son statut DPS. »
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« La justice a prononcé la peine qui s’imposait pour un crime odieux »
Matignon a en effet indiqué que « cette décision […] se fonde sur la particulière gravité de la situation de santé de M. Colonna et s’appuie sur l’avis rendu ce jour par la commission de la maison centrale d’Arles. » Du côté des nationalistes corses, on y voit la preuve que la décision de lever ou non le statut de DPS des membres du commando Erignac était une décision politique, et qu’elle intervient un peu tard.
Le sénateur de la majorité présidentielle admet que la décision « aurait pu être prise un mois plus tôt » et que Jean Castex a « pris en compte le contexte corse. » Mais sur le fond, il conteste les revendications nationalistes, et les accusations d’une responsabilité de l’Etat, ou de pressions du corps préfectoral : « La justice a prononcé la peine qui s’imposait pour un crime odieux. On n’est absolument pas dans une gesticulation entre administration et mouvement politique. » D’après Alain Richard, les nationalistes corses portent un discours « contestant l’Etat de droit » : « Les gens qui administrent la région de Corse présentent des réclamations qui vont contre la loi de la République. On ne peut pas être une ambiance de jardin d’enfants. Toutes les voies de recours ont été utilisées par les avocats, dont l’actuel président de la région de Corse [Gilles Simeoni, ndlr], qui se situe d’un côté ou de l’autre selon son emploi du temps. C’est le motif du crime que Colonna a commis, qui le classe comme DPS. Cela n’avait rien d’original et n’est en rien de lié à la pression d’une administration. »
« Les nationalistes n’ont pas de vraies perspectives politiques »
« On verra ce qu’il en sera pour les autres détenus [du commando Erignac]. S’ils se sont comportés sur une longue période en détenus observant les règles et ne manifestant pas d’agressivité, quelle que soit la violence du crime qu’ils ont commis, il est licite de leur reconnaître leur droit au rapprochement », poursuit Alain Richard. Le sénateur LREM-RPDI « comprend, humainement, le sentiment d’indignation que perçoivent les personnes qui partagent, ou non, la cause dite ‘nationaliste’, et qui sont tout simplement choqués et indignés qu’un détenu ait subi une agression comme celle-là. »
Mais sur un plan plus politique, Alain Richard estime que la majorité nationaliste, qui dispose actuellement des « pleins pouvoirs » au niveau local sur l’île, « n’est pas en mesure de peser dans le débat national » : « Il y a une tentation de revenir dans l’actualité par cette affaire, c’est de la tactique politique. Mais ça ne change pas que les nationalistes n’ont pas de vraies perspectives politiques sur un changement de statut de l’île. » D’après lui, la majorité corse actuelle se décrédibilise plutôt d’un point de vue de gestion administrative : « C’est un moment où on les voit à l’œuvre : ils ont des pouvoirs administratifs et financiers très étendus. Les insulaires sont amenés à voir si les pleins pouvoirs les conduisent à faire des progrès. Or ça n’a rien d’évident pour moi. » La question du débouché politique des mobilisations actuelles après l’agression d’Yvan Colonna reste effectivement encore ouverte.