Caroline Collomb, l'épouse du ministre de l'Intérieur, peut-elle être juge administrative et responsable de LREM ? La question est posée au Conseil d’État par un Lyonnais qui évoque un "risque de conflit d'intérêts" et de manquement à son "obligation de réserve".
Le 25 octobre, comme l'avait révélé l'hebdomadaire satirique lyonnais Les Potins d'Angèle, Éric Forquin avait adressé un premier courrier au vice-président du Conseil d’État, Jean-Marc Sauvé. Sans obtenir de réponse, "signe d'embarras".
Mardi, dans une nouvelle lettre dont l'AFP a eu copie, ce juriste d'entreprise a réitéré sa demande de saisine du Collège de déontologie de l'institution. "Pas dans un but politique mais parce que je crois à la cause que je défends", a assuré cet ancien élu LR de Caluire, près de Lyon.
Sollicité par l'AFP, le Conseil d’État n'a pas fait de commentaires.
Caroline Collomb, qui travaillait depuis 2015 au tribunal administratif (TA) de Toulon, a été mutée durant l'été à Paris puis désignée "référente" de La République en Marche (LREM) pour le Rhône, le 6 octobre.
Le 18 septembre, le Conseil de déontologie a déjà rendu un avis sur sa mutation, à l'origine d'une polémique.
Il ne s'y était pas opposé, appelant toutefois Mme Collomb à être "tout particulièrement vigilante" quant à son "obligation de réserve" et sa "discrétion professionnelle" ; il avait enjoint aussi le TA de Paris à l'écarter de tout dossier "relevant du ministère de l'Intérieur, y compris naturellement au titre du contentieux des étrangers".
Le vice-président du Conseil d’État s'était alors fendu d'une "mise au point" en faveur de Mme Collomb. "Il ne saurait y avoir de stigmatisation ou d'interdiction professionnelle tenant aux liens familiaux des juges", affirmait alors Jean-Marc Sauvé.
Mais pour M. Forquin la donne a changé depuis que l'épouse du ministre a pris des responsabilités politiques.
Un avis partagé par Paul Cassia, professeur de droit à la Sorbonne. Sur un blog hébergé par Mediapart, il rappelait le 11 octobre le paragraphe 49 de la Charte de déontologie de la juridiction administrative.
Celui-ci stipule que "certaines responsabilités de premier plan, au sein d’un parti politique ou dans l’équipe de campagne d’un candidat à un mandat national, par exemple, peuvent, du fait notamment de leur exposition médiatique et de la charge de travail qu’elles comportent, se révéler en pratique inconciliables avec l’exercice normal des fonctions au sein de l’institution".