Le programme économique de Jean-Luc Mélenchon : « Difficilement finançable dans la France de 2017 »

Le programme économique de Jean-Luc Mélenchon : « Difficilement finançable dans la France de 2017 »

Alors qu’une centaine d’universitaires français et étrangers s’engagent pour soutenir son programme économique, les propositions économiques de Jean-Luc Mélenchon sont-elles réalistes ? Difficilement répond la majorité des experts.
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Par saveria rojek

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Un programme « communiste » pour François Fillon, « délirant » pour le Figaro, qui dans son éditorial décrit « la France mélenchonisée comme un pays de fonctionnaires surnuméraires payés par un secteur privé à qui on réclamerait toujours davantage d’impôts ». Emmanuel Macron lui n’est pas en reste, qui raille « le révolutionnaire communiste ».

A contrario, ils sont une centaine d’universitaires du monde entier à signer une tribune dans laquelle ils affirment que le projet de Jean-Luc Melenchon est le meilleur pour la France, en dépit de son impact sur les finances des Français. Pour ces enseignants français, britanniques, allemands ou encore américains, le projet de la « France Insoumise » est le seul à offrir un « cadre cohérent et rigoureusement chiffré, un programme économique précis et ambitieux reposant sur une plus grande justice fiscale, une politique d’investissement et une émancipation vis-à-vis des marchés financiers ».

Coté chiffres, Jean Luc Mélenchon prévoit un plan d'investissement de 100 milliards d'euros, ainsi que 173 milliards d’euros de dépenses supplémentaires. En ce qui concerne les recettes, elles passent par l'augmentation des prélèvements obligatoires de quatre points de PIB, soit 90 milliards d'euros d'impôts supplémentaires. Sans parler des 4% d’inflation d’ici la fin du quinquennat…

« Le gros problème de ce programme est que M. Mélenchon vit dans un monde où dette et dépenses publiques ne sont pas importantes. Or les dernières années nous ont prouvé qu’on ne peut pas accumuler de la dette sans cesse. Ce qu’il faut voir dans son programme c’est que l’Etat, la dépense publique, remplacent les initiatives privées. C’est en fait un programme classique des années 30 mais qui ne marche pas dans la France de 2017 » explique Christopher Dembik, économiste chez Saxobank.

 « Comment relance-t-on la croissance ? Par la dépense publique. Or, à partir de 2025, les taux d’intérêt vont compter beaucoup plus dans le budget de l’Etat avec une charge de la dette plus importante. Aujourd’hui, nos taux sont exceptionnellement bas, d’ici 2024-2025, ils vont remonter ce qui grèvera forcément le budget de l’Etat » poursuit Christopher Dembik.

Autre mesure phare prônée par le candidat, l’augmentation du Smic de 16% soit 1326 euros net par mois. Une mesure qui permettrait, selon lui, de relancer la demande et donc la croissance. Faux, rétorque l’institut Montaigne, un think tank plutôt libéral, cette hausse du coût du travail non qualifié coûterait 10 milliards d’euros aux entreprises et à l’Etat employeur. Elle pourrait surtout conduire à la suppression de 40 à 170.000 postes.

Pour financer ce programme, Jean-Luc Mélenchon augmentera les prélèvements obligatoires. Au-delà de 400.000 euros de revenus par an, les ménages seront imposés à 90%. « Ce sont des mesures qui vont faire fuir les investisseurs. Je ne pense pas qu’aux super taxes pour les riches, mais la sortie de la zone euro, et surtout la proximité idéologique de Jean-Luc Mélenchon avec le chavisme. C’est ça surtout qui effraie les investisseurs étrangers. En fait, c’est un programme keynésien que je qualifierai de dépassé, car il ne s’applique plus aujourd’hui » détaille Christopher Dembik.

Pour Jean-Hervé Lorenzi du Cercle des Economistes et qui soutient Emmanuel Macron, le principal problème français « c’est la capacité d’offre. Les augmentations de demande sont massivement satisfaites par des importations. Il faut donc avant tout remuscler le tissu économique et ce n’est pas ce que propose M. Mélenchon. Son programme se fonde sur des calculs simplistes. Ce n’est pas financé. Nous avons un déficit de 60 à 70 milliards d’euros. Donc 100 milliards d’investissement public, c’est irréaliste. L’idée n’est pas illégitime mais elle est infinançable. L’épargne privée ne financera pas ça, donc ce sera de l’argent public et ça creusera la dette de façon abyssale. » Jean-Hervé Lorenzi qui conclut « on peut appeler ça du rêve, mais ce n’est pas crédible une seconde ».

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